Kulturkampf ou Guerre d’attrition : Le Burkini sera-t-il le nouveau front (mobile) du djihâd ? [1]
Questions à Jacques Borde
Sisco épisode isolé ou signe que quelque-chose venait de changer quant aux frappes asymétriques dont le terrorisme intérieur d’inspiration takfirî a le secret ? Plus qu’un abcès de fixation local, le Burkini serait plus une sorte de front mobile du djihâd takfirî ! Une affaire à suivre, donc. 1ère partie.
| Q. Que pensez-vous du débat sur le burkini opposant le Premier ministre à plusieurs de ses ministres ?
Jacques Borde. Pas grand-chose en vérité. Ce que j’en dis, c’est qu’à l’évidence, burkini, burqa, hidjab sont clairement détournés par la minorité agissante des agents dormants takfirî comme autant d’armes de guerre psychologique. De la bonne vieille Psy Op, comme savent en monter tous les SR du monde. Et l’on n’en manque pas de l’autre côté de la Grande bleue.
Partant de là, je donne entièrement raison au Premier ministre Manuel Valls. Tout en trouvant que, comme à son habitude, en termes de décisions à prendre, il s’arrête un peu au milieu du gué. Comme d’ailleurs le Conseil d’État dans un arrêt qui dit tout et son contraire. Et, in fine, ne règle pas grand-chose
| Q. Pourquoi dites-vous ça ?
Jacques Borde. Mais parce que, seul l’arrêté de Villeneuve-Loubet est invalidé, car c’est le seul auquel se sont attaquées les associations. Dans les 30 autres communes ayant pris des arrêtés similaires, les arrêtés municipaux sont toujours en vigueur jusqu’à ce qu’ils soient contestés en justice. Ce que va faire, n’en doutez pas, une ribambelle d’associations…
Et comme le Conseil d’État ne veut se fâcher avec personne, il a, par ailleurs, rappelé à tous les maires qui ont invoqué le principe de laïcité qu’ils peuvent se fonder sur « d’autres considérations » que l’ordre public, « le bon accès au rivage, la sécurité de la baignade ainsi que l’hygiène et la décence » pour interdire l’accès aux plages. Ce qui laisse bien des possibilités aux municipalités concernées.
| Q. Et les positions de ses ministres ?
Jacques Borde. Najat Vallaud-Belkacem et Marisol Touraine ? Sujet sans intérêt : Question suivante s’il vous plaît…
| Q. Vous me disiez que Sisco a été salutaire. Pourquoi ?
Jacques Borde. Quelque part, oui ! Parce qu’à l’évidence, opération duplicable à l’envie, il s’agissait d’un test en grandeur nature. Le fait qu’il se soit plutôt mal passé pour la mouvance takfirî nous a, sans doute, préservé d’autres opérations du même type. Mais, là encore, pas d’illusion, tout ce qui a été gagné, c’est un peu de temps : voir ce qui vient de se passer à Châteauneuf-sur-Charentes…
| Q. Et, ça aurait été grave ?
Jacques Borde. Sans Sisco ? Oui, évidemment. Imaginez, ad minimo, plusieurs dizaines d’actions du même type se déroulant le même jour. Ce à quoi nous avons échappé une partie de l’été[1] ce sont – et je pèse mes mots – des après-midi de Cristal, comme celle qui a visé nos compatriotes juifs de Sarcelles. Heureusement, la perspective de se retrouver face à des gens ayant du répondant ne faisait pas partie du plan. Surtout si d’autres opérations étaient en préparation en Corse.
| Q. Et, face à ce phénomène, jusqu’où faut-il aller selon vous ?
Jacques Borde. Il faut savoir reconnaître ses erreurs. J’ai cru, trop longtemps, qu’on pouvait composer : j’avais tort ! Mea culpa, maxima culpa !
Donc, à titre personnel je pense que ceux, qui comme une partie de la droite se prononcent pour « une loi d’interdiction générale des signes religieux ostensibles dans l’ensemble de l’espace public », ont raison.
Face au danger et aux provocations en tous genres qui s’annoncent, il faut revenir en arrière et proscrire tout signe de prosélytisme communautariste : foulard y compris.
| Q. Lorsque vous parlez de signes religieux. Lesquels, selon vous ? Que ceux du prosélytisme islamique ?
Jacques Borde. Oui, bien sûr ! Mais, d’abord, ce correctif : prosélytisme, ou plutôt propaganda staffel takfirî. Soyons précis dans les termes.
Arrêtons de nous cacher derrière notre petit doigt, nous savons parfaitement d’où vient la menace, non ?
Pour le reste : vous connaissez beaucoup de Haredim[2] poursuivant armés des non-juifs dans la rue, au cri de : Shabbesh, Shabbesh[3] ? Moi : aucun. La communauté arménienne de France compte, peu ou prou, 700.000 âmes. Ça en fait du monde, non ? Vous connaissez beaucoup de ses membres menaçant d’égorger des jeunes femmes court vêtues ? Pas davantage.
En revanche, nous sommes bien en guerre (enfin théoriquement) avec une mouvance radicale (les Takfirî) issue de l’Islam politique. Et pas du bouddhisme ou du sikhisme[4] . D’ailleurs, les plus en guerre, contre les idées et les crimes des takfirî sont des pays eux-mêmes majoritairement musulmans : Liban, Irak, Iran, Maroc, Syrie, Tunisie. Alors, franchement, je ne vois pas où se trouve le problème !
Au niveau de ce que nous avons à faire, c’est assez simple à énoncer et à comprendre. C’est la théorie du poisson dans l’eau : vidons, d’abord, le bocal. Et si certaines musulmanes se sentent si gênées (personne m’empêche le port de casquettes, chapeaux, bonnet, par ailleurs) que ça par les lois de la République : personne ne retient personne. En tout cas, pas moi ! Et beaucoup de mes amies sont musulmanes…
Quant au burkini, ou toute manière de se baigner habillé : c’est tout simplement anti-hygiénique. Fin de la discussion.
| Q. Par poisson dans l’eau, vous entendez quoi exactement ?
Jacques Borde. Ce qu’a dit (écrit, en fait) beaucoup mieux que moi Denis Bachelot[5] , lorsqu’il rappelle qu’ « il y a une identité de nature entre la haine de la France de la racaille ordinaire et la haine de la France du djihâdiste ; ce n’est ensuite qu’une question de psychologie personnelle, de circonstance et de séquençage. La grande majorité des terroristes est d’abord passée par la case violence civile et délinquance ».
C’est très exactement, ce que je vous disais dans un précédent entretien.
Partant, de là, comme le souligne encore Denis Bachelot, « Il faut ainsi clairement faire le lien entre la culture de la violence du milieu délinquant qui impose sa domination dans les cités ghetto et la radicalisation religieuse. La culture de la violence, quasi légitimée et si peu réprimée, est bien la matrice de la violence terroriste et religieuse. La violence ne se limite pas au terrorisme ; contraindre les femmes à porter le voile ou ne plus sortir comme elles le veulent, attaquer en meute des femmes européennes, laisser des pans entiers du territoire être contrôlés par des bandes, racketter les ”babtous fragiles’, permettre et promouvoir des chansons qui profanent la France et les Français ou appellent au meurtre de policiers, c’est déjà ouvrir la voie au terrorisme » .
Denis Bachelot a cent fois raison : nous sommes, là, dans une des phases initiales du conflit de basse intensité qui est l’objectif militaro-stratégique d’Al-Dawla al Islāmiyya fi al-Irāq wa al-Chām (DA’ECH)[6] . Ni plus, ni moins. Et tout ce que Vallseurs et Vallssettes ont à dire sur ce sujet est de l’onanisme médiatique, de la part de personnes n’ayant pas le logiciel interne leur permettant de faire une mise à jour salutaire.
Notes
[1] Et les saisons estivales s’étendent parfois jusqu’en octobre.[2] Ou Craignants-Dieu, juifs orthodoxes ayant une pratique religieuse particulièrement intense. Ils ne constituent pas un ensemble uniforme et comprennent en leur sein des Hassidim, des Mitnagdim, des Sefardi, des Mizrahim, etc.
[3] Shabbat, en yiddish, si ma mémoire ne me fait pas défaut.
[4] Religion fondée dans le nord de l’Inde au XVe siècle par le Gurû Nanak. Ses adeptes sont les Sikhs.
[5] Journaliste & essayiste, auteur de L’Islam, le Sexe & L’Islam, le sexe & nous, Icône sexy ou femme voilée, réflexion sur deux images divergentes.
[6] Ou ÉIIL pour Émirat islamique en Irak & au Levant.