Voxnr – Emprise

René Guénon, la fin des monnaies et le retour de l'or…

L’or a pris 40% en six mois et montera à cinq mille dollars l’once ; les banques centrales continuent de faire bonne impression ex nihilo – 1100 milliards – pour sauver la bourse du Brexit ; à Londres on refuse la prestigieuse livre sterling ; vos comptes seront bientôt vidés.

Le règne de la quantité va-t-il nous mener au zéro dont se moque Eugène Onéguine ?

Relisons Guénon sur la question des monnaies qui ne valent plus le centième de ce qu’elles valaient en 1914

Règne de la Quantité donc (chapître XVI !!!):

« Le point de vue « économique » lui-même et la conception exclusivement quantitative de la monnaie qui lui est inhérente ne sont que le produit d’une dégénérescence somme toute assez récente, et que la monnaie a eu à son origine et a conservé pendant longtemps un caractère tout différent et une valeur proprement qualitative... »

La monnaie valait plus car elle était symbolique. Le symbolon réunissait notre monde à l’Autre.

« Il est une remarque qu’il est bien facile de faire, pour peu qu’on ait seulement « des yeux pour voir » : c’est que les monnaies anciennes sont littéralement couvertes de symboles traditionnels, pris même souvent parmi ceux qui présentent un sens plus particulièrement profond ; c’est ainsi qu’on a remarqué notamment que, chez les Celtes, les symboles figurant sur les monnaies ne peuvent s’expliquer que si on les rapporte à des connaissances doctrinales qui étaient propres aux Druides, ce qui implique d’ailleurs une intervention directe de ceux-ci dans ce domaine. »

La monnaie relève de l’ordre sacerdotal, non de la BCE (abysse) ou de la Fed (celle qui a dévoré, ou qui est fatiguée – fed up). Sur ces sujets, oubliez Sutton, et lisez les remarquables Steven Zarlenga, Elgin Groseclose, ou bien Edward Griffin (son histoire de la Fed).

Guénon toujours :

« Le contrôle de l’autorité spirituelle sur la monnaie, sous quelque forme qu’il se soit exercé, n’est d’ailleurs pas un fait limité exclusivement à l’antiquité, et, sans sortir du monde occidental, il y a bien des indices qui montrent qu’il a dû s’y perpétuer jusque vers la fin du moyen âge, c’est-à-dire tant que ce monde a possédé une civilisation traditionnelle. »

Autorité spirituelle et pouvoir temporel donc.

Le gâchis survient à des époques récurrentes, notamment sous Philippe le Bel et la destruction de l’Ordre du Temple, regrettée par Dante, qui met fin au Moyen Age traditionnel, ouvre son automne (voyez Huizinga), et précipite la première catastrophe française.

Guénon ajoutait dans une note :

« Voir Autorité spirituelle et pouvoir temporel, p. 111, où nous nous sommes référé plus spécialement au cas de Philippe le Bel, et où nous avons suggéré la possibilité d’un rapport assez étroit entre la destruction de l’Ordre du Temple et l’altération des monnaies, ce qui se comprendrait sans peine si l’on admettait, comme au moins très vraisemblable, que l’Ordre du Temple avait alors, entre autres fonctions, celle d’exercer le contrôle spirituel dans ce domaine ; nous n’y insisterons pas davantage, mais nous rappellerons que c’est précisément à ce moment que nous estimons pouvoir faire remonter les débuts de la déviation moderne proprement dite. »

Et Montesquieu se moque dans une lettre perçante de ce trait moderne et royal, qui scie la branche symbolique sur laquelle il est assis (lettre XXIV) :

« D’ailleurs, ce roi est un grand magicien : il exerce son empire sur l’esprit même de ses sujets ; il les fait penser comme il veut. S’il n’a qu’un million d’écus dans son trésor, et qu’il en ait besoin de deux, il n’a qu’à leur persuader qu’un écu en vaut deux ; et ils le croient. S’il a une guerre difficile à soutenir, et qu’il n’ait point d’argent, il n’a qu’à leur mettre dans la tête qu’un morceau de papier est de l’argent ; et ils en sont aussitôt convaincus. »

René Guénon, comme s’il avait entrevu le Prisonnier ou lu Prisonplanet.com ou Zerohedge.com, écrit ces lignes sur le NOM :

« Ce que nous avons dit du caractère quantitatif par excellence de l’industrie moderne et de tout ce qui s’y rapporte permet de le comprendre suffisamment : en entourant constamment l’homme des produits de cette industrie, en ne lui permettant pour ainsi dire plus de voir autre chose (sauf, comme dans les musées par exemple, à titre de simples « curiosités » n’ayant aucun rapport avec les circonstances « réelles » de sa vie, ni par conséquent aucune influence effective sur celle-ci), on le contraint véritablement à s’enfermer dans le cercle étroit de la « vie ordinaire » comme dans une prison sans issue. «

Le déclin symbolique signifie automatiquement ou plutôt ontologiquement (pour ne pas parler comme Eux) la disparition des monnaies :

Pour en revenir plus spécialement à la question de la monnaie, nous devons encore ajouter qu’il s’est produit à cet égard un phénomène qui est bien digne de remarque : c’est que, depuis que la monnaie a perdu toute garantie d’ordre supérieur, elle a vu sa valeur quantitative elle-même, ou ce que le jargon des « économistes » appelle son « pouvoir d’achat », aller sans cesse en diminuant, si bien qu’on peut concevoir que, à une limite dont on s’approche de plus en plus, elle aura perdu toute raison d’être, même simplement « pratique » ou « matérielle », et elle devra disparaître comme d’elle-même de l’existence humaine.

Et Guénon de marteler en or, pardon, encore…

« La conclusion qui s’en dégagera sera toujours la même en définitive : le terme réel de la tendance qui entraîne les hommes et les choses vers la quantité pure ne peut être que la dissolution finale du monde actuel. »

J’oubliais de rappeler : votre or, cet or, on vous le prendra, comme l’ont fait Hitler, Roosevelt (voyez le Gold Reserve Act: 10 ans de prison si vous ne le livriez pas) et bien sûr Léon Blum.

L’homme moderne, celui qui a renoncé aux symboles puis à l’étalon-or, n’est pas un étalon. C’est un dernier homme qui aime trier ses ordures. C’est un juste un petit bourrin. Alors autant en profiter.