Oublions marches blanches, bougies, mots doux avec cœurs en guise de point sur les i, généralement écrits à l’encre violette et selfies humides : soit le bazar qu’on nous ressort à chaque drame que cette actualité déverse à cadences de plus en plus rapprochées.
Mettons, aussi, de côté le ressentiment légitime des proches des victimes. La souffrance ne se discute pas. Passons, aussi, sur les ignobles polémiques politiciennes selon lesquelles la promenade des Anglais n’aurait pas été assez « sécurisée » et autres formes de récupération électoraliste, d’où qu’elle vienne.
Au bout du compte, le véritable enjeu est ailleurs, sur la nature de ces assassins. En effet, quel que soit leur degré de radicalisation islamique, avéré ou non : ils sont tous français, à l’exception notoire du camionneur fou de Nice, Tunisien d’origine ; mais aujourd’hui, c’est un peu du pareil au même.
Et là, véritable question, au-delà des invectives, injures et amalgames de rigueur : comment a-t-on fait pour en arriver à une telle situation ?
En temps de vaches grasses, le grand patronat français a importé des dizaines de milliers de travailleurs, la plupart issus du Maghreb. Des années durant, ils ont survécu dans des cités d’urgence et si, en permanence, ils baissaient la tête, ce n’était pas parce que leurs chaussures étaient jolies. Puis, le regroupement familial. Encore une mesure patronale, vendue sous manteau humaniste – détresse sexuelle (réelle à l’époque) des « travailleurs immigrés », tel qu’on disait alors, avant le chômage de masse –, mais surtout diligentée par des objectifs autrement plus triviaux : le salaire que Mouloud envoyait au bled, il le dépenserait bien mieux chez nous, surtout en compagnie de madame et de ses onze enfants.
Lesquels ont grandi chez nous, sans savoir qui ils étaient vraiment. Autrefois, ils se voyaient déjà américains. Écoutaient de l’Elvis Presley du bout de leurs santiags, avant de se mettre au rap, chaussés de Nike toutes neuves flambantes.
Puis, les années maudites de SOS Racisme durant lesquelles il leur fut expliqué que, globalement, ils n’étaient que victimes du racisme ambiant. Paternalisme patelin les renvoyant une fois de plus au rang de victimes éternelles ; bref, au statut de gros cons à mettre sous tutelle. Nombre d’entre eux ont fini par y croire. Et presque autant de Gaulois aussi, n’ayant pourtant rien demandé à personne et qui, rapidement, en ont eu marre de passer pour de perpétuels salauds.
In fine, quelques millions de Français d’origine étrangère, lâchés en rase campagne. Certains s’en sont sortis seuls, la « beurgeoisie » n’est pas qu’une expression de journalistes et la réussite sociale de certains pourrait faire pâlir d’envie nombre de leurs compatriotes de plus vieille souche. D’autres se sont enfoncés dans le monde de la délinquance et de la subvention – dans les quartiers nord de Marseille, on savait autrefois reconnaître le caïd du coin au nombre de zéros sur son chèque signé de la mairie.
Et finalement, les derniers, laissés sur le bord du chemin. Trop crétins pour emprunter celui du travail ; pas assez finauds pour prendre celui de la délinquance. Quelle issue pour ces éternels recalés ? Djihad mortifère, versant dévoyé de cette célébrité éphémère qu’incarne la télé-réalité, horizon indépassable du quart monde intellectuel ? Oui. Certains égarés ont donc opté pour un islam, réduit à de simples codes vestimentaires et interdits alimentaires, le tout réduit à sa version low cost, en forme de suicide idiot, mais donnant pourtant une raison de vivre – ou de mourir – dans un monde, le nôtre, ayant perdu depuis longtemps perdu toute forme de bon sens.
C’est triste, mais nous en sommes là. Et le drame est que ces enfants perdus sont « aussi » nos enfants.
Source: Boulevard Voltaire :: lien