Seul magazine à voir ses ventes progresser régulièrement depuis quatre ans, l’hebdomadaire Valeurs actuelles doit sa réussite à « la droitisation de la France sur le plan sociétal », un « boulevard » sur lequel il compte « pousser son avantage », explique à l’AFP son directeur Yves de Kerdrel.
Dans un marché de la presse écrite déprimé, les performances du titre détonnent: diffusé à un peu moins de 85.000 exemplaires par semaine en 2012, année où Yves de Kerdrel est nommé directeur de la publication, « Valeurs actuelles », qui va fêter ses 50 ans début octobre, frôle aujourd’hui les 120.000 ventes hebdomadaires, selon les données de l’ACPM-OJD.
A l’origine de ce succès, une nouvelle formule lancée en 2013 par cet ancien journaliste des Échos et du Figaro. Formule s’inspirant du magazine libéral The Economist et opérant un virage assumé à droite sur les sujets de société.
« Ces lecteurs supplémentaires, nous les avons obtenus en réaffirmant notre côté engagé, notre parti-pris » avec une ligne « anti-système » et « souverainiste », explique M. Kerdrel. « Toutes les études sociétales menées ces dernières années montrent que la France se droitise sur le plan sociétal », avec une importance croissante donnée « à la valeur travail, à l’identité, au sens de la patrie », poursuit le directeur de la publication.
« Nous sommes installés sur un boulevard. Nous sommes le seul journal sur un créneau qui s’élargit de jour en jour », estime-t-il.
L’hebdo ultra-conservateur mise davantage sur les sujets sociétaux que sur la politique : « La politique nous intéresse moins, nous faisons peu de unes avec des hommes politiques », assure Yves de Kerdrel, réputé proche de Nicolas Sarkozy.
Élection présidentielle oblige, sur les neuf dernières semaines, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy, Najat Vallaud-Belkacem, Marine Le Pen et Jean-Yves Le Drian ont tout de même fait la une du titre.
« Notre cahier des charges stipule qu’il faut donner la parole à tout le monde, sans soutenir personne », indique le nouveau directeur de la rédaction, Geoffroy Lejeune, évoquant une « consigne de l’actionnaire ».
– ‘Encore plus loin’ –
Valmonde, auquel appartient, Valeurs actuelles, a été racheté l’an dernier par Privinvest media, propriété de l’homme d’affaires d’origine libanaise Iskandar Safa, avec le soutien de deux anciens de TF1, Étienne Mougeotte et Charles Villeneuve.
Après le rachat, 12 journalistes (sur 20) ont quitté le titre et ont été remplacés par des reporters âgés entre 25 et 30 ans, anciens d’Atlantico ou de L’Express (Renaud Revel, spécialiste des médias, va notamment contribuer à la nouvelle formule).
« A mon arrivée l’âge moyen des lecteurs était de 65 ans, aujourd’hui, c’est 54 ans », affirme Yves de Kerdrel.
Ces lecteurs, « situés à 80% hors de Paris et de la grande couronne » viennent de « la France des sous-préfectures, celle qui voit les centre-ville se vider ». Ils ont également de « très hauts niveaux de revenus », souligne M. Kerdrel, qui dit avoir plus que doublé le nombre de pages publicitaires dans le magazine, redevenu bénéficiaire dès 2013 après 25 ans dans le rouge.
Ces dernières années, le magazine a fait parler de lui avec des unes choc, souvent polémiques, dont certaines ont valu au directeur de la publication une condamnation en justice : un buste de Marianne voilé, accompagné du slogan « Naturalisés, l’invasion qu’on cache », en septembre 2013, et une une sur les Roms, « Roms, l’overdose ».
Ces condamnations ont valu au titre d’être exclu des aides à la presse, l’ancienne ministre de la Culture Fleur Pellerin, qui avait jugé ces unes « nauséabondes », ayant passé une réforme excluant les titres condamnés pour incitation à la haine raciale. M. Kerdrel a contesté devant le Conseil d’État.
Ses unes ont permis à l’hebdo d’augmenter ses ventes en kiosque (+20% en 2015), qui ont selon M. Kerdrel dépassé celles de L’Obs et égalé celles de L’Express cet été. « La prochaine cible, c’est Marianne avec lequel nous avons beaucoup de lecteurs en commun », lance-t-il.
Valeurs Actuelles espère gagner des lecteurs avec le lancement, le 6 octobre, d’une nouvelle formule, pour laquelle le titre a investi 150.000 euros: « C’est l’occasion de pousser notre avantage encore plus loin », juge M. Kerdrel qui vise une diffusion de 200.000 exemplaires en 2020.
Afp via Yahoo
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