Voxnr – Emprise

Du dollar comme SIGNE de la puissance américaine

Du dollar comme SIGNE de la puissance américaine

 

Beaucoup n’ont cessé dont moi d’évoquer la fin de la puissance américaine, le crépuscule de l’épouvantail américain. Beaucoup depuis des lustres… Il est certain que la puissance militaire n’est plus ce qu’elle était, mais il est encore plus certain que les USA n’ont jamais été assez fous pour attaquer les deux puissances qu’ils ont eux-mêmes créées dans les années quarante (lisez un certain McCarthy qui avait bien compris le problème), et qui les ont toujours servi depuis, la Chine et la Russie, fournissant deux repoussoirs propres à maintenir les gallinacées à la ferme.

Les récents événements monétaires et financiers, la soumission de l’Italie (« souverainiste mais pas souveraine », souligne Manlio Dinucci), tout montre que l’on est sur un champ de bataille dont pour l’instant sortent gagnants les américains – et sans se forcer. Depuis un an, ils ruinent le reste du monde une nouvelle fois et le vieux vampire n’a même pas eu à changer ses recettes : pousser les idiots comme Erdogan à emprunter à bas taux en dollars (c’est ce qu’on appelle « se faire mener en bas taux ») et  ensuite remonter ces mêmes taux pour ruiner tout le monde.

 

Historien et analyste antisystème, le renommé William Engdahl écrivait récemment, traduit par mes amis de lesakerfrancophone.fr:

« Malgré tous les efforts de la Russie, de la Chine, de l’Iran et d’autres pays pour s’affranchir de leur dépendance envers le dollar américain pour le commerce et les finances internationales, le dollar reste encore incontesté en tant que monnaie de réserve des banques centrales du monde entier, composant environ 63 % de toutes les réserves mondiales. De plus, près de 88 % des transactions quotidiennes en devises étrangères sont effectuées en dollars américains. »

 

Le dollar est encore et toujours incontournable.

La « forteresse Europe » restera donc esclave et elle refera la guerre à la Russie quand on le lui ordonnera (comme en 41), le Brésil, l’Argentine, l’Amérique du sud sont comme on sait totalement rentrées dans le rang, le petit comique Lénine équatorien s’est soumis prudemment et on attend une prochaine reddition bolivienne, qui ne pèse pas beaucoup dans la balance de toute manière. Les Américains (je veux dire l’élite des « manipulateurs de symboles » dont a parlé Robert Reich dans sa Mondialisation) ont toujours et le pouvoir et l’apparence du pouvoir. L’extraordinaire matrice internet qu’ils ont créé leur appartient totalement, ils ont créé les plus formidables capitalisations boursières de l’histoire, ridiculisé les petits acheteurs d’or, et ils contrôlent et étudient la pensée mondiale dans leur flux. C’est ce que j’appelais la technoosphère (cf. Teilhard) dans mon livre sur internet au début des années 2000. Au risque de choquer j’ajouterai que l’humanité passant la moitié de sa vie connectée ou devant son écran allumé ne doit pas s’étonner des cours de bourse de Facebook, Amazon et autres ; et que si illusoires soient-ils, ces cours n’empêchent pas comme l’a bien expliqué Eric Zuesse (car plusieurs antisystèmes commencent à comprendre confusément que l’empire contre-attaque), les boîtes américaine de valoir dix fois plus que leurs équivalentes européennes et donc de les racheter ou de les contrôler comme elles veulent. Les élites US donc ont réussi à surévaluer leurs actifs (merci à Frédéric) sans coup férir, à la barbe de tous les antisystèmes pro-or ou libertariens, plus marginalisés que jamais.

Enfin le fait que de plus en plus d’américains vivent mal ne prouve pas du tout une faillite impériale, au contraire : un empire romain ou autre n’a jamais été conçu pour faire mieux vivre les populations locales (lisez Juvénal enfin, l’empire remplaça son peuple à Rome comme en Amérique) mais pour contrôler le monde. Et l’empire sémiotique américain avec son sénat (SPQR…), ses signes, son tout-puissant dollar, les armes cinématographiques, le web et sa matrice, y parvient parfaitement. Nous sommes tous sous hypnose dépendant en Europe d’ailleurs des sites antisystèmes américains.

Je rappelle Lucien Cerise :

« Le pouvoir de la finance repose entièrement sur ce que l’on appelle communément le bluff, comme au Poker. D’ailleurs, on attribue à Mayer Rothschild, le fondateur de la dynastie, la remarque suivante : « Prenez l’apparence du pouvoir, et on ne tardera pas à vous le donner réellement. »

 

Mais je rajouterai Vauvenargues pour qui il ne faut pas tant d’acquis pour être habile que pour le paraître.

L’arme sémiotique suprême c’est le dollar ! Lisez Attali qui rappelle que dans numisma il y a nomos, la loi. Et mettez des roubles d’un côté et des dollars de l’autre et vous allez voir ce que les russes vont choisir – et les chinois…

Plusieurs commentateurs antisystèmes comme Engdahl ont enfin réagi dans ce sens et dans Rt.com Dan Glazebrook, traduit par Hervé pour lesakerfrancophone.fr, souligne qu’on est revenu comme en 1997. Les pays émergents-submergés, résistants (Turquie, Iran) ou consentants (Amérique du Sud) sont ruinés les uns après les autres par l’hydre verte  et tout le monde se signe et se soumet gentiment. Rien de nouveau sous le sommeil, Engdahl ayant évoqué cette affaire de 97 qui fut comme presque toutes les crises une crise créée (quand elles ne sont pas créées, elles sont récupérées, les crises, et elles le sont vite).

Le dollar est donc une arme de destruction massive. Je cite cinq lignes de William Engdahl :

« La Fed utilise le dollar américain comme une arme et les conditions financières sont à bien des égards similaires à celles de la crise asiatique de 1997. Tout ce dont il y a eu besoin fut une attaque concertée des fonds spéculatifs américains contre l’économie asiatique la plus faible, le baht thaïlandais, pour déclencher l’effondrement de la majeure partie de l’Asie du Sud jusqu’à la Corée du Sud et même Hong Kong. »

Le coup de la guerre commerciale, de la hausse des taux ? Engdahl nous dessille :

« Aujourd’hui, le déclencheur est Trump et ses tweets belliqueux contre Erdogan. »

Et il explique la guerre en cours :

« Les guerres commerciales, les sanctions politiques et les nouvelles lois fiscales américaines, dans le contexte de la stratégie évidente de la Fed de resserrement du dollar, fournissent la toile de fond pour mener une guerre utilisant le dollar contre les principaux opposants politiques à l’échelle mondiale, sans jamais avoir à déclarer officiellement une guerre. »

Et Engdahl remarque l’impuissance russe et chinoise dans cette affaire et il prévoit au passage le martyre du pauvre Iran.

« Si Washington réussit, à partir du 4 novembre, à faire réduire les exportations de pétrole iranien, les prix mondiaux du pétrole pourraient dépasser les 100 dollars, ce qui aggraverait considérablement la pénurie de dollars dans les pays en développement. C’est une guerre par d’autres moyens. »

This is war by other means.

On n’en a pas fini avec l’empire anglo-américain (anguleux, amer et Caïn). Engdahl a rappelé que l’Angleterre s’était sentie menacée par l’Allemagne dès 1870 (Disraeli en parlait). Elle a préféré détruire sa puissance et l’Europe pour se débarrasser des Allemands (voyez Preparata).

Il me semble pour terminer que ceux qui devront avoir recours aux armes, hypersoniques ou pas, pour se défendre et pour survivre contre l’empire anglo-américain sont les deux puissances actuellement dos au mur – la Chine et la Russie. La stratégie tyrannique des américains créera une génération de pays kamikaze.