Contre toute attente, Wall Street et les places européennes ont réalisé de beaux scores la semaine dernière malgré la victoire du milliardaire à l’élection américaine. Les secteurs de la santé, de la finance ou encore de la défense en sont les principaux bénéficiaires.
Et si Wall Street, finalement, s’accommodait bien de la victoire à l’élection présidentielle américaine de ce candidat imprévisible, qui dénonçait à chaque meeting « le système » et « l’establishment » ?
Contre toute attente, la Bourse américaine a réagi à la hausse après la victoire de Donald Trump, le 8 novembre, face à Hillary Clinton, qui était présentée durant la campagne comme la candidate la plus favorable aux marchés financiers. Mais, dans le détail, les secteurs américains ne se comportent pas tous de la même manière devant cette victoire surprise du milliardaire.
Si les secteurs de la santé, de la finance, ou encore de la défense, profitent pleinement de l’accession de M. Trump à la Maison Blanche, la donne est sensiblement différente du côté des valeurs du numérique.
Une Bourse américaine qui se porte bien
Les sondages ne sont pas les seuls à s’être trompés durant l’élection présidentielle américaine ; les analystes financiers aussi. La plupart d’entre eux prévoyaient une chute à Wall Street en cas de victoire de Donald Trump. C’est en effet ce qu’il s’est passé, mais seulement à court terme : à l’annonce des premiers signes d’une victoire républicaine, mercredi matin, la panique s’est emparée des marchés. Aux Etats-Unis, le dollar perdait 1,6 % face à l’euro par rapport à la veille. Au Japon, le Nikkei clôturait en baisse de 5,36 %, tandis qu’à l’ouverture des Bourses européennes, mercredi, le DAX de Francfort et le CAC 40 perdaient respectivement 2,7 % et 2,5 %.
Mais près d’une semaine après, la Bourse de New York a déjoué tous les pronostics. Ainsi, dans la foulée de l’élection présidentielle, l’indice vedette Dow Jones Industrial Average a signé sa meilleure semaine depuis 2011, avec une augmentation de 5 % entre mercredi et vendredi. Et l’indice S&P 500 des valeurs financières a terminé la semaine avec une augmentation de 8 % en trois séances, pour retrouver ses niveaux de 2008. De nombreux secteurs ont notamment bénéficié de cette hausse inattendue : la santé, la finance, la défense ou les infrastructures.
Une fois le choc passé, les investisseurs ont préféré voir d’un bon œil les principales promesses de campagne de Donald Trump en matière de relance économique et comptent sur une hausse de la croissance. Il a ainsi promis de mettre en place une politique de grands travaux, en annonçant vouloir reconstruire « des ponts, des routes, des aéroports » avec une enveloppe de 1 000 milliards de dollars d’investissement sur dix ans, grâce notamment à des partenariats publics-privés. Face à ces promesses, le groupe Caterpillar a, par exemple, pris 9,8 % depuis l’élection du milliardaire.
Dans le même temps, le milliardaire prévoit de vastes baisses d’impôts, de l’ordre de 4 400 milliards à 5 900 milliards de dollars (de 4 020 milliards à 5 390 milliards d’euros). De quoi réjouir les marchés financiers. M. Trump compte ainsi faire passer la tranche maximale de l’impôt sur le revenu de 39,6 % à 33 %.
Le secteur pharmaceutique est également un des grands gagnants de cette élection surprise. Le cours de l’action Pfizer a par exemple bondi de plus de 4 % depuis le 8 novembre, alors que Sanofi a connu une hausse de plus de 6 %. Les entreprises pharmaceutiques craignaient notamment l’arrivée d’Hillary Clinton à la Maison Blanche, car cette dernière avait promis de contrôler la hausse des prix spectaculaire de certains médicaments. Une promesse que n’a pas faite M. Trump.
Les marchés financiers jugent également positive la promesse du républicain de revenir sur la loi Dodd-Frank, votée en 2010 par les démocrates. Ce texte a notamment mis en place de nouvelles agences de contrôle et limité les activités spéculatives des banques. Dans une interview à Fox News en octobre 2015, il avait annoncé vouloir « se débarrasser de Dodd-Frank ».
« Les banques ne prêtent plus d’argent à ceux qui en ont besoin. […] Si vous avez besoin d’argent pour créer de l’emploi, construire un immeuble ou monter une entreprise, les banques ne sont pas là. Ce sont les régulateurs qui dirigent les banques. »
Ainsi, depuis la victoire du candidat « antisystème », les cours des banques américaines ont flambé : + 12 % pour Goldman Sachs, + 11,9 % pour Bank of America ou encore + 9,5 % pour JP Morgan Chase.
Mais tous les secteurs ne profitent pas de la victoire du milliardaire. A la Silicon Valley, place forte des entreprises du numérique, l’élection de M. Trump n’est pas réellement perçue d’un bon œil.
La Silicon Valley dans le flou
Apple est prévenu. Au cours de la primaire républicaine, en mars, Donald Trump a menacé l’entreprise :
« J’obligerai Apple à produire ses iPhone et ordinateurs sur notre territoire, pas en Chine. »
Le milliardaire s’en était également pris au patron d’Amazon, Jeff Bezos. Le nouveau président élu lui reprochait d’utiliser le quotidien Washington Post, qu’il a racheté il y a trois ans, comme un « outil de pouvoir politique contre [lui] » et « pour que les politiciens à Washington ne taxent pas Amazon comme ils le devraient ».
M. Bezos avait répliqué en suggérant de se débarrasser de M. Trump en l’envoyant dans l’espace, promettant de lui réserver une place dans la fusée d’une autre de ses sociétés, Blue Origin.
Ainsi après ces joutes verbales, et l’élection de M. Trump, la Silicon Valley se trouve dans une position inconfortable. Elle avait très majoritairement soutenu la candidate Hillary Clinton, jugeant M. Trump incompétent. « Je suis encore moi-même sous le choc », a ainsi reconnu Alexis Ohanian, cofondateur du site de partage Reddit.
« Mon espoir est que les actes du président Trump ne seront pas le reflet du discours du candidat Trump, sur un certain nombre de domaines, et en particulier sur les questions d’immigration. »
La question migratoire est en effet un sujet qui revient souvent dans la Silicon Valley, qui fait travailler énormément de programmateurs, ingénieurs et entrepreneurs venus du monde entier. D’ailleurs le secteur technologique est l’un des seuls sanctionnés à Wall Street depuis l’élection. Ainsi, jeudi, alors que le Dow Jones battait un nouveau record, Amazon, Alphabet, Apple, Facebook et Microsoft ont tous perdu entre 2 % et 4 %.
Depuis la victoire surprise du milliardaire, les grands patrons du secteur numérique jouent l’apaisement. « Le seul moyen d’avancer est d’avancer ensemble », a écrit Tim Cook aux salariés d’Apple. De son côté, Mark Zuckerberg a affirmé que « créer le monde que nous voulons pour nos enfants [est une tâche] plus grande qu’une quelconque présidence ». Facebook est toutefois accusé d’avoir favorisé la victoire de Donald Trump, en laissant circuler de fausses informations au cours de la campagne.
Des Bourses européennes également en hausse
A l’ouverture, lundi 14 novembre, les principales Bourses européennes gagnent plus de 1 %, après avoir bouclé leur meilleure semaine depuis juillet. Si les investisseurs s’interrogent toujours sur les véritables intentions de Donald Trump, dont le programme reste flou, la dynamique sur les marchés reste positive. Le CAC 40 a ainsi gagné 2,55 % la semaine dernière.
Pour expliquer cette hausse, les stratégistes du courtier Aurel BGC ont fait savoir à l’Agence France-Presse que « sur des marchés financiers privés de visibilité, les investisseurs réagissent à court terme à ce qu’ils pensent être l’hypothèse dominante, à savoir l’application d’une politique probusiness, reposant sur moins d’impôts et d’Etat ».
« Mais pour que la hausse se poursuive sur les marchés à court terme, il faut maintenant du concret. Les investisseurs devraient décortiquer les propos de Trump et des membres qui sont favoris pour figurer dans son administration. »
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