Voxnr – Emprise

Alep outragé, Alep brisé, Alep martyrisé ! Mais Alep libéré ! Enfin…

Alep-Est, la seule partie de la capitale économique de la Syrie jamais tombée aux mains des nazislamistes takfirî, est enfin revenu à sa mère-patrie, la République arabe syrienne (RAS). Les premières réactions de Jacques Borde sur le sujet.

« Ni oubli, ni pardon, ni reconnaissance diplomatique, ni négociations. Destruction du pseudo-État islamique. Totale. Partout. Maintenant ».
Une amie Internaute sur Facebook !!!

Q. Alors, Alep, c’est fini ?

Jacques Borde. Si vous parlez de la Bataille d’Alep-Est, oui.

L’Al-Jayš al-’Arabī as-Sūrī (AAS)1 et des milices populaires sont en train de terminer le nettoyage des quartiers est de la ville d’Alep, c’est ce qu’a annoncé lors d’un point de presse le n°2 du Bureau opérationnel de l’État-major russe, le lieutenant-général Viktor Poznikhir.

« Les troupes gouvernementales et les milices terminent de libérer des terroristes des quartiers est de la capitale économique de la Syrie, Alep. Au cours de l’offensive, les djihâdistes ont été chassés de tous les quartiers qui étaient sous leur contrôle (…). L’armée syrienne a éliminé dans les combats plus de 900 terroristes, ainsi que [récupéré, NdlR] plusieurs dizaines d’armes lourdes et beaucoup d’équipements militaires », a précisé Poznikhir.

En clair, les 105 quartiers de la ville, dont la superficie est estimée à 78,5 km2, ont été complètement libérés.

Q. Vous ne croyez pas que les derniers Contras d’An-Nusrah vont s’en sortir ?

Jacques Borde. S’ils ne passent pas par les Fourches caudines des vainqueurs, assez difficilement. En effet, les nazislamistes takfirî que regroupe Al-Jayš al-Fateh (Armée de la conquête)2 étaient dans une nasse et, sauf à se rendre, il leur était malaisé d’en sortir indemnes, comme lors des précédentes trêves. Sauf, une fois encore, à passer par les conditions qui leur ont été imposées. Et, tout juste.

Q. Pourquoi donc ?

Jacques Borde. Parce que :

1- ils n’avaient plus véritablement de monnaie d’échange. Beaucoup de ceux et celles qu’on nous présente comme des civils d’Alep, sont des proches de la soldatesque nazislamiste. Et la plupart, s’ils parlent arabe, le parlent avec des accents étrangers. Ils étaient donc à la merci des vainqueurs. C’est aussi simple que cela.

2- les forces engagées sous commandement iranien, pour l’essentiel des commandos du Nirouy-é Ghods3 et du Hezbollah, placées sous le commandement du major-général Qassem Soleimani, n’ont pas fait dans la dentelle. Du coup, le message est passé.

3- ensuite, comme l’a, fort justement, écrit Slobodan Despot, sur Antipresse, « L’évacuation de Saïgon ne se répétera pas. Les terroristes mandataires de l’Occident ont été abandonnés sans appui aérien à Alep-Est et coincés dans des trous à rats ».

Tout le monde le savait. Eux les premiers.

Q. Et nous Européens, devons-nous être soulagés ?

Jacques Borde. Beaucoup moins, en fait.

Q. Et pourquoi ?

Jacques Borde. Parce que nombre de ces activistes d’Al-Jayš al-Fateh vont, malgré tout, passer entre les mailles du filet.

Lisez encore ce qu’en dit Slobodan Despot : « Le seul véhicule d’exfiltration qui leur reste: leur rasoir! Celui-là même qu’ils ont laissé rouiller depuis 2012. Aussitôt les rues de la vieille ville se sont couvertes… de poils de barbe! Oubliant leur vocation au martyre et les 72 vierges qui les attendent au paradis d’Allah, les héroïques “rebelles modérés” se sont rasés en masse. Les voici mêlés à la foule des civils qui fêtent la fin du cauchemar islamiste. Et demain, ils seront où ? On vous le donne en mille: sur les radeaux pour l’Europe où les ONG viendront les repêcher à quelques encablures de la côte libyenne pour soigner leurs traumatismes aux frais du contribuable européen. Juste retour à l’expéditeur… ».

Assez clair : les premiers des Sonderkommandos nazislamistes de DA’ECH à s’être mêlés aux migrants que nous expédie Ankara au moindre prétexte seront là bientôt chez nous. Avant le Nouvel An, qui sait ?

Q. Sinon, vous ne semblez pas tant surpris que ça par les cris d’orfraie des Occidentaux ?

Jacques Borde. À propos d’Alep ? Disons que comme toujours, j’essaie de me mettre à la place des différents acteurs de ce grand jeu au Levant qu’a été la Bataille d’Alep.

Or, ce que je constate c’est que ceux-ci se retrouvent dans une situation qu’ils n’avaient pas connu depuis longtemps. Car, même si c’est par proxies interposé, à Alep, l’Ost occidentalis vient de mordre la poussière. Ou comme l’a dit Jean Dominique Merchet, l’Occident est confronté à une « guerre qui ne se termine pas par sa victoire ».

Bien sûr, je vous l’accorde les victoires de ce même Occident ont souvent été des leurres ou des victoires à la Pyrrhus. Mais, pour le moins, elles avaient été présentées comme telles : Irak, Afghanistan. Et, surtout, avalisées comme telles.

Là, ni flonflons, ni fanfares, ni show à l’américaine sur un beau porte-avions comme avec Bush, mais un champ de ruines. Et, un dernier carré de Sonderkommandos nazislamistes assiégés.

Q. Une dernière question : comment a fonctionné la désinformation sur Alep ?

Jacques Borde. Vous voulez parler de l’Ad Majorem djihadi gloriam : la nouvelle religion de nos Munichois transfusés à l’or golfique, je suppose !

C’est souvent assez simple.

Ainsi, le vrai professionnel du reportage en zone de guerre (entendez qu’il ne se contente pas d’aller de l’hôtel des journalistes au centre de Presse, comme la plupart de nos petits camarades), Philippe Buffon, nous a déniché un jolie, au sens d’émouvante, photo d’une fillette courant aux milieu de ruines que les petits télégraphistes des Sonderkommandos nazislamistes de DA’ECH nous affirment qu’elle vient d’Alep. Or, précise Philippe Buffon, « Il ne s’agit pourtant pas d’une image prise à Alep ces derniers jours, mais d’une image tirée du tournage d’un clip de la chanteuse libanaise Hiba Tawaji en 2014. Des articles d’alors sur la chanson Al-Rabih Al-Arabi contiennent l’image en question. La  »petite fille qui court » apparaît en outre dans le clip en question ».

Dans le même registre, Un ex-rebelle syrien torturant son propre enfant sur l’île de Chios, passé à la moulinette médiatique devient: « … un soldat syrien torture un enfant à Alep » !

Bon, c’est le coup cent fois réchauffé des couveuses de Koweit-City. Mais plus c’est gros, plus ça passe.

Notes

1 Armée arabe syrienne.
2 Coalition articulée autour d’an-Nusrah li-Ahl ach-Chām (Front Al-Nosra), le bras armé d’Al-Qaïda en Syrie. Se compose, pour être complet, de : Ahrār ach-Chām (Mouvement islamique des hommes libres du Cham), Jund al-Aqsa (Les soldats de Jérusalem), Liwāʾ al-Haqq, Jayš al-Sunna, Ajnad ach-Chām et de la Légion de Cham.
3 Force de Jérusalem, une branche à part entière du Sêpah-é Pâsdâran-é Enqelâb-é Eslâmi, en français Corps des Gardiens de la révolution islamique). Force spéciale en charge des opérations extérieures dévolues aux Pâsdâran. Elle dépend exclusivement du Rahbar-é Enqelâb (guide de la révolution), l’Ayatollah Sayyed Ali Hossaini Khâmeneî (et non du président), un peu comme le Kidon du Mossad reçoit ses ordres du seul Premier ministre israélien (la ressemblance s’arrêtant là).