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Législatives en Turquie : l'islamo-conservateur Erdogan joue gros
En élisant leurs députés ce dimanche, les Turcs vont dire à leur président Recep Erdogan s'ils acceptent sa réforme de la Constitution. Depuis douze ans au pouvoir, celui-ci espère présidentialiser le régime pour continuer sa politique à poigne.
La Turquie va-t-elle changer de régime ? Les Turcs ont commencé à voter dimanche pour élire leurs députés dans un scrutin déterminant pour l'avenir du président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan. 54 millions d'électeurs sont amenés à se prononcer pour un scrutin qui a déjà le mérite de calmer les tensions de la campagne, marquée par un attentat.
Vendredi, une bombe a explosé lors d'un meeting du parti kurde dans son fief de Diyarbakir (sud-est), faisant deux morts et une centaine de blessés.
Les résultats seront connus en soirée et devraient se solder par une nouvelle victoire du Parti de la justice et du développement (AKP), qui a remporté l'un après l'autre tous les scrutins depuis 2002. Recep Erdogan joue son va-tout dans cette élection. Il lui faut obtenir 367 des 550 sièges de députés pour s'assurer de la majorité des deux tiers lorsqu'il fera voter la réforme constitutionnelle qui modifiera la teneur du pouvoir exécutif en Turquie.
Premier ministre à poigne pendant onze ans, critiqué pour son autoritarisme, il a été élu chef de l’État en août dernier et a rendu sur le papier les clés de l'exécutif et du parti à son successeur, l'ancien ministre des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu. Mais, bien décidé à garder les rênes du pays, il milite depuis pour la présidentialisation du régime et le renforcement de ses pouvoirs.
Alors que la Constitution turque impose un devoir de neutralité au chef de l’État, Erdogan a a ouvertement fait campagne pour « sa » réforme et son parti. Samedi encore, il a attaqué l'opposition qui « cherche à arrêter la Nouvelle Turquie en marche ». Les deux grands partis d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) et le Parti de l'action nationaliste (MHP, droite) ont dénoncé pendant toute la campagne la volonté de Recep Erdogan d'instituer une « dictature constitutionnelle » et espèrent priver l'AKP de sa majorité absolue.
Erdogan attend prudemment les résultats. Contesté dans les zones urbaines et les milieux universitaires pour son emprise sur le pays, par les femmes et les laïcs pour ses dérives autoritaires, l'ancien Premier ministre a vu son étoile pâlir auprès des classes moyennes depuis le ralentissement de l'économie, qui était jusque là son étendard pour justifier une politique à poigne. Les derniers sondages créditent l'AKP de 40 à 42% des voix, en net repli par rapport aux 49,9% récoltés il y a quatre ans.
Le principal parti kurde, le Parti démocratique du peuple (HDP), pourrait constituer le principal obstacle sur la route d'Erdogan. S'il franchit la barre des 10% des voix, requise pour entrer au parlement, le HDP devrait obtenir une cinquantaine de sièges de députés et ainsi priver l'AKP de la majorité qualifiée qu'il convoite. De nombreux électeurs non-kurdes semblent tentés de voter pour le HDP et son leader Selahattin Dermitas pour faire barrage à l'AKP.
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