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Mercredi, 27 Janvier 2016 |
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Suspension de l'état d'urgence: le Conseil d'Etat tranche mercredi
Le Conseil d'Etat dira mercredi s'il juge ou non nécessaire de suspendre tout ou partie de l'état d'urgence instauré après les attentats de Paris comme le lui demande la Ligue des droits de l'Homme.
Ce dossier est particulièrement sensible au moment où le gouvernement envisage de prolonger pour la deuxième fois et pour trois mois supplémentaires ce régime d'exception qui devait prendre fin le 26 février.
Le projet de loi prolongeant l'état d'urgence sera débattu et voté le 9 février au Sénat, puis le 16 février à l'Assemblée nationale.
Mardi, la Ligue des droits de l'Homme a demandé à la plus haute juridiction administrative de "suspendre tout ou partie" de ce régime et à défaut "d'enjoindre le président de la République de procéder à un réexamen des circonstances de fait et de droit" qui ont conduit à sa mise en oeuvre.
"On est à la croisée des chemins", a lancé à l'audience l'avocat de la LDH Patrice Spinosi avant que Serge Slama, représentant 450 universitaires qui se sont joints à la procédure, n'appelle le juge de référé à "oser assumer un rôle historique".
Pour Patrice Spinosi, le maintien de l'état d'urgence ne se justifie plus aujourd'hui. C'est "un piège politique" dans lequel s'est enfermé le gouvernement de peur d'être accusé de laxisme en cas de nouvel attentat, a-t-il assuré.
L'avocat en veut pour preuve les conclusions d'une communication d'étape de la commission des lois de l'Assemblée nationale qui contrôle l'application de l'état d'urgence. Pour la commission, "les principales cibles et objectifs" ont été traités, "l'effet de surprise s'est largement estompé" et "l'extinction progressive de l'intérêt des mesures de police administratives (...) montre bien plus qu'un essoufflement".
Se défendant de vouloir "désarmer l'Etat", l'avocat a réclamé un retour au régime de droit commun des lois antiterroristes "qui permettent aussi les perquisitions de nuit et les assignations à résidence, mais sous le contrôle d'un juge judiciaire, juge de "l'autorisation"
- 'Persistance de la menace' -
La représentante du ministère de l'Intérieur, Pascale Léglise, a de son côté justifié le maintien de ce régime administratif dérogatoire, qu'elle a jugé "adapté et proportionné", par la persistance de la menace terroriste. Elle a cité la récente vidéo du groupe Etat islamique (EI) ciblant à nouveau la France.
"On est dans la prévention d'un risque majeur et le juge judiciaire n'a pas à intervenir à ce stade", a-t-elle estimé.
Elle a également mis en avant la nécessité pour la police de maintenir les mesures déjà prononcées et d'attendre que le Parlement ait voté les mesures de la prochaine réforme pénale, renforçant les outils de la lutte antiterroriste, qui doit être présentée dans une semaine en conseil des ministres.
L'état d'urgence renforce les pouvoirs de la police en permettant notamment les assignations à résidence, les perquisitions administratives de jour comme de nuit ou l'interdiction de rassemblement, le tout sans le contrôle d'un juge judiciaire.
La perspective de sa prolongation a fait réagir lundi le secrétaire général du Conseil de l'Europe, qui a dit sa "préoccupation" au président François Hollande auquel il a proposé son assistance juridique.
Et un collectif d'associations et de syndicats, baptisé "Nous ne cèderons pas!", a appelé à manifester samedi à Paris contre cette perspective, craignant que l'état d'urgence ne devienne "un état permanent".
Plus généralement, le débat enfle en France sur l'équilibre entre mesures sécuritaires et contrôle judiciaire. La garde des Sceaux Christiane Taubira elle-même a estimé lundi qu'il y "avait lieu de s'interroger" sur la place du juge judiciaire dans le contrôle des mesures prises en riposte aux attentats et a qualifié de "pertinent" ce débat.
Mercredi, Manuel Valls présentera à l'Assemblée nationale les "avant-projets d'application de la révision constitutionnelle". L'exécutif veut inscrire dans la Constitution à la fois l'état d'urgence et la très controversée déchéance de nationalité.
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