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Terrorisme : Hollande prêt au référendum sur la déchéance de nationalité
Nathalie Schuck @NathalieSchuck |
Intérieur
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La déchéance de nationalité, que l'on croyait enterrée, sera bien soumise au vote du Parlement. Et le président menace de faire appel au peuple. Les secrets d'un revirement.
On croyait que la déchéance de nationalité, mesure la plus décriée de la réforme constitutionnelle concoctée après les attentats, avait été écartée par le gouvernement. Elle est finalement maintenue. Quitte à faire hurler la gauche. Récit, côté coulisses, de cette folle journée.
Jamais Hollande n'a vacillé. Si la presse et Christiane Taubira se sont emballées en annonçant le retrait de cette mesure, le président, en son for intérieur, ne l'a jamais envisagé. « Il n'a pas vacillé, ça prouve qu'il n'a pas la main tremblante », vante un vieux copain. Alors, pourquoi ce pataquès ? « Ce sont des conseillers qui ne savent rien qui ont parlé. Ils nous emm... ! » peste un ténor du PS. Lorsqu'il annonce cette disposition au congrès de Versailles, trois jours après les attentats, François Hollande est inondé d'appels de reproches. « Tu ne peux pas faire ça », supplient des élus, horrifiés. C'est à l'origine, il est vrai, une proposition du FN ! Mais il tient bon.
Loin des caméras, Bernard Cazeneuve entame un intense lobbying pour enterrer la mesure. Pour le ministre de l'Intérieur, elle ne dissuadera pas les terroristes. Un argument va faire fléchir le président : la gauche est vent debout. Anne Hidalgo, Jean-Christophe Cambadélis, Martine Aubry hurlent. « On me dit qu'il n'y a pas de majorité, je réfléchis. Mais je l'ai dit, donc je le fais », répète-t-il. Persuadé d'être dans le vrai. La preuve ? Au lendemain des régionales, il dîne avec les chefs de la majorité. « Quand on lui a dit que la droite était piégée, ses moustaches frisottaient », rigole un des convives.
Le triple strike de Valls. Dans cette épreuve de force avec sa propre majorité, Hollande est soutenu par le Premier ministre et Ségolène Royal. « Si tu recules, tout ton discours de Versailles est frappé d'insincérité », lui répètent-ils. Lundi, la ministre de l'Ecologie l'appelle pour le prévenir qu'elle va faire une sortie au canon pour l'exhorter à « ne pas renoncer ». « Pas de problème », répond-il, serein.
Mardi, au petit-déjeuner de la majorité, Manuel Valls laisse entendre que le gouvernement ne lâche rien. « Il faut se soucier de l'avis des Français », lance-t-il. Mardi soir, Hollande et Valls mettent la dernière main à la réforme : la déchéance de nationalité y figure. Le Premier ministre réussit, au passage, un joli coup. Voilà Christiane Taubira, qu'il affronte régulièrement, désavouée. Un rival potentiel pour Matignon, Bernard Cazeneuve, remis à sa place. Et l'aile gauche de la majorité, qui le déteste, mise devant le fait accompli.
La droite piégée, la gauche prise à revers. Malgré les articles annonçant son recul, Hollande laisse dire. Objectif : laisser la droite s'enferrer. Et ça marche puisque, dès qu'elle entend Taubira annoncer le retrait de la mesure, l'opposition saute sur l'occasion pour proclamer qu'elle ne votera pas la réforme constitutionnelle. « Il a laissé courir la droite pour la ramasser », rigole un fidèle. Mais la gauche est prise à rebrousse-poil. « Ça va tanguer à la rentrée », souffle un responsable du PS. Hier, en Conseil des ministres, le chef de l'Etat a donc calmé le jeu, sachant son gouvernement divisé. George Pau-Langevin, ministre de l'Outre-Mer, s'en est ouverte : « C'est contraire à nos valeurs ». Hollande s'est fait apaisant. « Je sais ce que ressentent un certain nombre d'entre vous, je connais vos convictions. Je vous demande de la solidarité et de l'unité. » Reste qu'il va falloir trouver les trois cinquièmes des voix au Parlement. Faute de quoi, selon nos informations, le président est prêt à consulter les Français par référendum ! L'arme atomique, d'un usage toujours risqué. « Bien sûr qu'il le fera ! L'option est sur la table », certifie un fidèle.
Père de la nation, sa posture pour 2017. Tous ses proches le disent, l'année 2015, avec les attentats de janvier et de novembre, l'a « changé ». « Il va prendre des mesures fortes pour le pays, quitte à choquer. Il va parler aux Français, pas à la gauche », promet un habitué de l'Elysée. « Il veut être un président au-dessus des partis, l'homme de la France unie », décrypte un autre. Et tant pis pour ceux qui parlent de couac après le revirement d'hier. Un de ses amis achève : « François s'en tape, qu'on le prenne pour une bille. Il joue aux échecs ! »
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