Le gouvernement a décidé, tard dans la soirée du lundi 30 juin, de remettre à plus tard les votes à l'Assemblée sur les articles et amendements au projet de budget rectificatif de la Sécurité sociale, provoquant la consternation dans l'hémicycle et l'indignation d'une partie de la majorité.
Christian Eckert :

Le secrétaire d'Etat au budget, Christian Eckert, a demandé au début de la discussion « la réserve des votes » jusqu'« au moment où [le gouvernement] estimera utile et nécessaire de reprendre les votes », en précisant que le recours à l'article 44-3 de la Constitution sur le vote bloqué n'était qu'une possibilité.
« Le gouvernement fera savoir [mardi] s'il fera reprendre le vote des amendements ou s'il aura recours à d'autres procédures prévues par la Constitution. »
Dans l'entourage du premier ministre, Manuel Valls, on a justifié cette méthode par la volonté d'« avancer dans les meilleures conditions ».
Mais cette décision peut laisser présager le recours au vote bloqué sur tout ou partie du texte, ce qui permettra de ne retenir que les amendements présentés et acceptés par le gouvernement. C'est ainsi que l'ont interprété, notamment, le patron des députés UMP, Christian Jacob, et l'ancienne ministre écologiste Cécile Duflot.
« CARICATURE DE DÉMOCRATIE »
Dans les rangs du PS, se trouvaient alors présents de nombreux « frondeurs », prêts à défendre notamment un amendement pour une contribution sociale généralisée (CSG) progressive. L'un d'eux, Christian Paul, a dénoncé le recours à « des outils rouillés qui n'honorent pas le gouvernement », face à des députés « nombreux et soucieux de défendre leurs propositions ».
Le vice-président (PS) de la commission des finances, Pierre-Alain Muet, s'est aussi insurgé dans un tweet contre « une caricature de démocratie qui ôte le seul vrai pouvoir des députés : le droit d'amender ».
Les écologistes ont évoqué une « crise des institutions », le Front de gauche un gouvernement qui « ne recule devant rien ». Dans l'opposition, le président du groupe UDI Philippe Vigier a pointé « un blocage institutionnel majeur » et Christian Jacob « une situation totalement inédite », en demandant une réunion immédiate de la conférence des présidents de l'Assemblée.
A l'inverse, le président du groupe socialiste, Bruno Le Roux, a salué une décision « sage » du gouvernement afin de permettre « le débat ».
ÉCHANGE NOURRI SUR UNE CSG PROGRESSIVE
Les députés ont ensuite discuté vaille que vaille du premier article du projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificative (PLFSSR), consacré à des allégements de cotisations salariales, dans le cadre de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité. Un article qui aurait pu recueillir les suffrages de l'opposition, ont remarqué plusieurs de ses représentants.
Puis les échanges ont été nourris sur l'idée, déjà ancienne, d'une CSG progressive, proposée par 25 députés PS et le groupe écologiste mais encore repoussée par le gouvernement à une éventuelle réforme fiscale ultérieure. « C'est manifestement à cause de cet amendement que nous sommes privés de vote », a lancé Isabelle Le Callennec (UMP), dont les propos ont été approuvés par certains à gauche.
L'examen du budget rectificatif de la Sécu s'annonçait, dès avant cette décision sur les votes, périlleux pour l'exécutif, entre la grogne du patronat, qui veut que les aides aux entreprises annoncées en janvier par François Hollande arrivent plus rapidement, et la contestation d'une partie de la majorité qui souhaite une réorientation de certaines aides en direction des ménages.
Les débats, prévus jusqu'à mercredi soir avant un vote global de l'Assemblée le 9 juillet, vont être rythmés par le scrutin solennel, mardi après-midi, sur le projet de budget rectificatif de l'Etat (PLFR), qui prévoit 4 milliards d'euros d'économies et pour lequel le gouvernement s'affiche « très confiant ».