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Vendredi, 17 Juin 2016
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Espagne : le Parti socialiste débordé sur sa gauche
François Musseau
International
Dans le quartier ouvrier madrilène de Vallecas, la gauche radicale est sur le point de devancer le PSOE aux élections du 26 juin.

Un sentiment d’exaltation règne dans les locaux de Izquierda Unida («la Gauche unie»), dans le quartier de Vallecas, un énorme bourg de tradition ouvrière du sud-est de Madrid, le seul de la capitale qui se targue, en quarante ans de démocratie, d’avoir toujours voté majoritairement à gauche. A l’antenne locale, située au numéro 32 de la rue Sierra Carbonera, un groupe de militants commente les chances de la formation pour les législatives du 26 juin. «On pourrait bien vivre un moment historique, dit ce professeur auxiliaire, la trentaine, qui émarge petitement au gré des remplacements qu’on lui propose. Moi, depuis tout jeune, je milite dans ce parti militant, noble, fidèle à ses électeurs populaires, mais avec une mentalité de perdant. Or, aujourd’hui, on peut créer la surprise et gagner ! Et vraiment changer les choses…»

A côté de lui, un quadra, ancien ouvrier du BTP au chômage et qui vit depuis de chapuzas (des mini-jobs mal payés et non déclarés), partage cet enthousiasme : «A la Gauche unie, on était jusqu’ici des figurants. Cette fois-ci, on peut jouer un rôle central. Beaucoup de gens en ont marre.» Marre «de la corruption, de la morgue des politiciens, des inégalités qui n’arrêtent pas d’augmenter, de cette démocratie qui ne veut plus rien dire… Nous, nous sommes une alternative !»

Si la Gauche unie a ces jours-ci la foi chevillée au corps, c’est parce qu’elle s’est trouvé un allié de choix : Podemos. Ce parti émergent né en 2014, produit du mouvement des Indignés apparus en mai 2011, a scellé une alliance avec cette coalition de «la gauche de la gauche». Un ensemble disparate constitué autour du Parti communiste, légalisé à la fin du franquisme. Et cette «alliance» inédite pourrait bien être la révélation du prochain scrutin : certes, les conservateurs du Parti populaire (PP) sont donnés favoris, mais ils seraient talonnés par Unidos Podemos («Unis, nous pouvons»), la fusion préélectorale de la vieille Gauche unie et du néophyte parti indigné.

Orgueil

Autrement dit, si cette projection se réalise, le sorpasso(«dépassement») aura lieu pour la première fois en Espagne : le Parti socialiste, l’historique rival des conservateurs, serait devancé sur sa gauche par des mouvements plus radicaux (lire ci-dessous).

Dans les rangs de la Gauche unie, on se frotte les mains : à l’issue des très disputées législatives de décembre (dont aucun exécutif n’est sorti), ils n’ont obtenu qu’un petit million de suffrages. Et, en raison d’un découpage électoral défavorable, deux malheureux sièges de députés -sur 350. Main dans la main avec Podemos, troisième force parlementaire avec 69 sièges (derrière le PP et les socialistes), la donne change du tout au tout. Elle permettrait à la Gauche unie de tutoyer la pole position.

Lorsqu’il évoque Vallecas, qui compte près de 320 000 habitants, Jorge Luis, musicien de 29 ans, parle de «l’orgueil» de son quartier. Et ce, même si depuis une dizaine d’années, ce gros bourg accolé à Madrid a perdu de son homogénéité : les habitants vieillissent, les jeunes ont rejoint la grande banlieue pour vivre dans des logements plus vastes, et des immigrés venus du Maroc, de Chine et d’Amérique latine ont transformé l’environnement.«J’y suis né, dit Jorge Luis, et Vallecas restera toujours Vallecas : un village d’Astérix, de résistance, de fierté populaire. C’est truffé de collectifs libertaires, d’associations d’entraide, de locaux pour ouvriers à la retraite. Et même d’un club de foot qui fait souvent trembler les meilleurs !»

La nouveauté, à ses yeux ? Que, désormais, ce bastion de la gauche peut influer sur la destinée politique du pays. Aux municipales de mai 2015, Vallecas a ainsi voté massivement en faveur de l’ex-juge Manuela Carmena, 71 ans. La désormais maire de Madrid est en effet une ancienne communiste de l’ère franquiste, fervente partisane de la démocratie directe, de la transparence dans les comptes publics, du rapprochement entre élus et administrés. Bref, de la fin des privilèges des politiques. Comme elle, des personnalités de la société civile, au nom de «l’Indignation», dirigent les municipalités de Saragosse, Valence, La Corogne ou Cadix.

Désillusion

«Un an s’est écoulé, poursuit Jorge Luis. Les conservateurs avaient prédit un cataclysme, la paralysie de la ville, le chaos. Or, tout le monde peut constater que rien de pareil ne s’est produit. Au contraire, avec Manuela, les élus sont plus responsables, plus honnêtes, plus volontaristes. Et cela, c’est l’atout de la vraie gauche. Pas les socialistes, qui font partie de l’establishment.»

Une promenade dans Vallecas, dominé par des pâtés de maisons basses délimités par de grandes artères, l’atteste : cette mutation n’est pas évidente pour tous. Même si les sympathies sont majoritairement à gauche, beaucoup affichent une désillusion virulente à l’égard de leur classe politique. Accoudée à un bar, le visage résigné, Maria del Carmen, 47 ans, couturière au chômage qui ne touche plus que le subsidio (sorte de RSA, d’un montant de 426 euros), explique ainsi son regard désabusé : «Mon unique objectif est de survivre. Nos politiques ne font rien pour nous, et ne pensent qu’à se remplir les poches.» En contrebas, devant l’église San Ramon, des dizaines de gens font la queue pour la soupe populaire. Partout, le chômage et la pauvreté sont palpables, en dépit des indicateurs de légère reprise économique, comme la baisse des demandeurs d’emploi de 26 à 21 %. A l’échelle nationale, de source officielle, environ 32 % des Espagnols se trouveraient«en risque d’exclusion sociale». L’opinion de Maria del Carmen s’avère très représentative. Un récent sondage de Metroscopia l’atteste : plus de 80 % des Espagnols qualifient la situation politique de «mauvaise ou très mauvaise».

La montée en puissance de Unidos Podemos pourra-t-elle inverser la tendance ? «Ce qui est sûr, dit Juan Manuel, 57 ans, métallurgiste reconverti en chauffeur de taxi, c’est qu’au moins, la Gauche unie, et surtout Podemos, ont permis de calmer les frustrations, de donner un peu d’espoir. Au moins, en Espagne, ça ne passe pas par l’extrême droite !»

Pour piloter ce possible changement, les leaders sont jeunes, épargnés par les scandales de corruption : Podemos est dirigé par le politologue Pablo Iglesias, 37 ans. La Gauche unie, elle, vient de se débarrasser de son vieux leader communiste, Cayo Lara, au profit d’un jeune économiste de 30 ans, très versé dans les réseaux sociaux, Alberto Garzón. «Il ne faut pas s’attendre au miracle, mais si le pouvoir passait à gauche, dit Juan Ramon, 53 ans, buraliste, ces deux-là ont tout en main pour corriger le tir, réduire l’austérité, résister à Bruxelles et à Merkel. Donnons-leur au moins un vote de confiance !»

Scénario grec, allemand ou portugais  ?

Les législatives pourraient bien achever le Parti socialiste espagnol qui, pour survivre, devrait être contraint de gouverner avec l’un de ses rivaux, la gauche radicale ou la droite.

Au siège national, rue Ferraz à Madrid, c’est la panique à bord. Sur ce bateau ivre qu’est le Parti socialiste espagnol (PSOE), les dirigeants s’arrachent les cheveux pour tenter d’éviter ce que beaucoup voient comme une fatalité : leur «pasokización», soit la décomposition du parti, à l’instar du Pasok, l’alter ego grec. Six mois après des législatives qui n’ont pas permis de dégager une majorité parlementaire, les Espagnols retournent aux urnes, et les socialistes tremblent : en décembre, ils n’avaient recueilli que 22 % des suffrages et 90 sièges (le pire score de leur histoire). Selon les derniers sondages, la saignée devrait se poursuivre le 26 juin, jusqu’à se voir battre de cinq points par la coalition de la gauche radicale, Unidos Podemos (lire ci-dessus).

«Système». Une perspective terrifiante pour cette formation centenaire qui, depuis la fin de la dictature franquiste, a exercé un pouvoir hégémonique - avec les conservateurs du Parti populaire (PP) - tant à l’échelon national que dans la plupart des régions. Lors d’un récent meeting à Jerez, un bastion andalou, le chef de file du PSOE, Pedro Sánchez, a tenté de rassurer ses troupes : «Ne croyez pas les diseurs de mauvaise aventure, nous allons rebondir ! Les Espagnols savent que seul un leadership socialiste peut permettre à l’Espagne de sortir de l’austérité et de la corruption [allusion au PP, ndlr], ainsi que du piège des promesses populistes [allusion à Podemos].»

Pourtant, même à l’intérieur des instances dirigeantes, on craint le pire : «La vérité, c’est que le parti est en crise profonde, admet un de ses responsables. Comme tous les partis sociaux-démocrates en Europe, on est de moins en moins lisibles. Le désarroi des gens, les inégalités records en Espagne, le fait que beaucoup nous voient comme un parti du système, avec tous les travers que cela suppose, tout cela nous affaiblit.» Sans compter le flou des positions concernant le très sensible défi indépendantiste en Catalogne : un jour les socialistes se montrent intransigeants, le lendemain ils acceptent l’idée d’un référendum. La semaine dernière, énième revirement du parti lorsque Sánchez propose une «solution confédérale» avec un statut particulier pour cette région rebelle… Selon les sondologues, le PSOE, qui reste la deuxième force politique du pays, est pris dans des contradictions. Il alterne un discours de «régénération démocratique», que contredisent de nombreux scandales éclaboussant des caciques, et des promesses sociales qui cadrent mal avec l’obéissance à Bruxelles. «Du vieux avec l’apparence du neuf», résume sans piété un éditorialiste d’Eldiario.es, un pure player ancré à gauche.

«Idiot utile». Pedro Sánchez va en tout cas être confronté à un dilemme s’il se confirme que son parti est relégué au troisième rang parlementaire lors de ces législatives. Pour débloquer une situation inextricable, il lui faudra en effet choisir entre la peste et le choléra. Soit il appuie le PP de Mariano Rajoy, l’actuel chef du gouvernement - et l’ennemi juré -, pour former une coalition nationale sur le modèle allemand. Soit il accorde son soutien à Unidos Podemos, une option plus logique (et déjà vue au Portugal) mais qui reviendrait à se mettre au service de Pablo Iglesias, le leader de Podemos, détesté par tous les barons socialistes. «Sánchez est acculé à un choix cornélien, sur fond de sombre destin, résume le sociologue Enrique Gil Calvo. Ou il se conduit de façon responsable et trahit la gauche, ou alors il se transforme en idiot utile de Podemos.»

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