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Crise en Ukraine : la Slovaquie refuse l'OTAN sur son sol et réarme en vitesse
Louis-Benoit Greffe |
Mondialisme
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La France va être de plus en plus isolée avec sa politique de coupes massives de moyens à la Défense, jusqu'à des niveaux rarement atteints sinon au plus fort de la débâcle de juin 40. Tout le monde réarme, notamment les Etats-Unis, la Chine, le Japon et l'Australie à cause des tensions dans le Pacifique. Et l'Europe n'est pas épargnée par le mouvement. En effet la crise ukrainienne pousse plusieurs pays d'Europe à accélérer leurs efforts de réarmement. Ainsi, la Tchéquie et la Slovaquie, qui viennent de refuser la présence de l'OTAN sur son sol, réarment. Surtout la seconde.
Après la République Tchèque, qui avait refusé quelques jours avant la présence des forces de l'Alliance sur son sol, le premier ministre slovaque Robert Fico (prononcer Fitso) a déclaré qu'il « ne pouvait imaginer la présence de soldats étrangers sur notre sol », estimant que depuis la répression du Printemps de Prague par plus de 500.000 soldats issus de tout le bloc de l'Est, la Slovaquie est « sensible » à ce genre de situation. C'est probablement la même raison qui a conduit la Tchéquie à refuser aussi la présence de l'OTAN. Les Etats-Unis n'ont pourtant pas perdu espoir d'amener les deux pays à collaborer à la mobilisation antirusse générale qu'ils essaient de mettre en place en Europe.
Il risque pourtant de tomber sur un os. Malgré le souvenir pénible de 1968, Robert Fico ne cache pas ses sentiments russophiles. D'ailleurs pendant la crise du gaz qui avait déjà mis aux prises la Russie avec l'Ukraine en 2009 et pendant la guerre russo-géorgienne d'août 2008 il s'était abstenu d'hurler avec les loups euratlantistes contre la politique de Poutine et l'avait au contraire ouvertement soutenue.
En attendant la Slovaquie réarme, à toute vitesse. Elle est en effet frontalière de l'ouest de l'Ukraine – le fief des ultranationalistes d'extrême-droite, qui commencent d'ailleurs activement à se tailler des baronnies dans les alentours de Lviv, Vinnitza et Uzhgorod. Par là passent tous les trafics – armes, drogues, argent – alors que le pouvoir central de Kiev, corrompu jusqu'à la moëlle et totalement dépassé par l'insurrection des populations russophones à l'est peine à garder le contrôle sur les plus incontrôlables de ses nationalistes.
Heureusement pour la Slovaquie, la République Tchèque a conservé l'important potentiel industriel qui faisait déjà la renommée de la Bohême-Moravie. Ainsi, la Slovaquie a commandé à la manufacture d'armes tchèque Ceská zbrojovka de la ville d'Ugerski Brod les nouveaux fusils d'assaut CZ805 BREN qui sont utilisés depuis 2012 par l'armée tchèque ; le montant de la commande se chiffre en centaines de millions d'euros. Par ailleurs, d'ici la fin de l'année les soldats slovaques auront entièrement renouvelé leurs pistolets et leurs fusils mitrailleurs qui seront respectivement remplacés par les modèles CZ75 et Scorpion.
Face à face : la Pologne et la Biélorussie
Autour de l'Ukraine, d'autres pays réarment. La Russie, depuis des années – elle doit aussi faire face à des menaces dans le Caucase, en Géorgie, mais aussi sur le Pacifique. Les pays Baltes, tant bien que mal – ce sont d'ailleurs actuellement des Rafale français et des avions polonais de fabrication soviétique qui patrouillent au-dessus de leur espace aérien. Les polonais surtout – qui remplacent presque tous leurs armements soviétiques par des équivalents américains. Les Etats-Unis et l'OTAN qui sont derrière ce réarmement brossent dans le sens du poil les ambitions nationales polonaises – dirigées vers l'ancien espace du duché lituano-polonais : les états baltes, la Biélorussie et l'Ukraine – tout en ressassant ses vexations du passé. Résultat : la Pologne ne marche pas, mais court pour devenir le foudre de guerre et gardien de l'Occident en Europe de l'Est.
Un autre pays regarde avec beaucoup d'inquiétudes les évolutions polonaises. Et pour cause : lorsque la Pologne était forte, ce pays avait subi nombre de vicissitudes historiques, d'invasions, de massacres et de destructions. Il s'agit de la Biélorussie. Fermement ancrée dans l'orbite russe, elle vient d'entrer dans l'Union Eurasiatique que la Russie a conclu avec le Kazakhstan. Si ce dernier pays ne veut que des alliances économiques – pour s'ouvrir les marchés russe et européen, donc diminuer un peu sa dépendance énorme envers la Chine – la Biélorussie a appelé dernièrement à la formation d'une « union culturelle, humanitaire et de défense » avec la Russie. Une sorte de contre-OTAN où pourraient venir s'agglomérer l'Arménie, l'Ossétie du sud, l'Abkhazie, les républiques indépendantes de Novorussie (Donbass et Lugansk) et plusieurs pays d'Asie centrale, dont le Turkménistan et le Kirghizstan.
Dans ce cas, comme par le passé, la Pologne et la Biélorussie seront face à face, dans des camps différents. D'ores et déjà, la Biélorussie s'est préparée et s'est dotée depuis 2011 de systèmes anti-aériens de courte portée Tor-M2 – une version modernisée du modèle soviétique des années 80 Tor M1, produite à l'usine russe d'Ijevsk – et une base aérienne devrait y être implantée en 2015 au plus tard. La Biélorussie accueille déjà depuis l'époque soviétique un radar militaire et une station de transmission des forces sous-marines russes.
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