Pour que l’Europe continue d’être la première puissance civilisatrice du monde
Jean Thiriart : Juan Peron, pourriez-vous, tout d’abord, nous parler de l’ouvrage que vous venez de publier : La hora de los pueblos (L’heure des peuples) ?
Juan Domingo Peron : Dans ce livre, j’ai voulu donner une vision d’ensemble de l’emprise et de la domination impérialiste en Amérique latine. Je pense que les pays latino-américains s’acheminent vers leur libération. Bien entendu, cette libération sera longue et difficile, car elle intéresse la totalité des pays d’Amérique du Sud. Il n’est pas pensable en effet qu’il y ait un homme libre dans un pays esclave, ni un pays libre dans un continent esclave. Pendant dix années de gouvernement justicialiste, en Argentine, nous avons vécu libres dans une nation souveraine. Personne ne pouvait s’immiscer dans nos affaires intérieures sans avoir maille à partir avec nous. Mais en dix ans, la synarchie internationale, c’est-à-dire l’ensemble des forces impérialistes qui dominent actuellement le monde, a eu raison de nous. Une cinquième colonne, les « cipayes » comme nous les appelions par référence à l’Inde, avait opéré scientifiquement un efficace travail de sape, et le régime que je présidais fut renversé. Cela prouve que si les peuples peuvent arriver à se libérer du joug impérialiste, il est beaucoup plus difficile pour eux, par la suite, de conserver leur indépendance, car les forces internationales que je viens de dénoncer les reprennent en main... En ce sens, l’échec du péronisme doit être une leçon et une expérience entre bien d’autres, hélas !, pour tous les pays qui veulent se libérer et rester libres.
Il faut envisager la lutte de libération des pays d’Amérique du Sud comme une lutte globale, au niveau du Continent. Dans cette lutte chaque pays est solidaire de ses voisins, chez qui il doit trouver un appui. Le premier impératif pour ces pays est donc de s’unir, de s’intégrer. Le deuxième point est de réaliser l’alliance effective avec le Tiers-Monde, ainsi que nous le préconisons, mes collaborateurs et moi-même depuis vingt-cinq ans ! C’est cette voie qu’il faut indiquer au peuple sud-américain ; pas seulement aux dirigeants, mais aussi à la masse populaire qui doit prendre conscience de la nécessité de cette lutte contre l’impérialisme. Unifier le continent et le libérer des influences extérieures, s‘allier au Tiers-Monde pour participer à l’échelon mondial à la lutte contre l’impérialisme, tels sont donc les premiers objectifs. Ensuite, le processus de libération interne peut se dérouler : le peuple obtiendra le gouvernement qu’il réclame tous les jours et qu’on lui refuse sans cesse, d’où cette succession de dictatures éphémères et de gouvernement fantoches mis en place grâce aux combines mais jamais aux élections, ce qui permet de maintenir le peuple sous différentes dominations. C’est ce processus que mon livre veut faire comprendre aux masses populaires.
Jean Thiriart : Y a-t-il, en Amérique du Sud, une classe sociale, une bourgeoisie qui collabore systématiquement avec les Etats-Unis ?
Juan Domingo Peron : Malheureusement oui ! Dans notre pays, la division entre le peuple et une oligarchie par la fortune, la naissance, est très nette, de même que celle entre le peuple et la nouvelle bourgeoisie « d’affaires » qui se développe très vite. En chaque industriel qui s’enrichit dort un oligarque en puissance. Cette oligarchie domine le pays, mais il ne faut pas sous-estimer l’ampleur de la lutte d’une immense masse populaire qui exige sa liberté. C’est ce mouvement que nous avons mis en marche, dans une certaine mesure, durant les dix ans de gouvernement justicialiste. Le justicialisme est une forme de socialisme, un socialisme national, qui répond aux nécessités et aux conditions de vie de l’Argentine. Il est naturel que ce socialisme ait entraîné la masse et qu’en son nom, par la suite, aient éclaté les revendications sociales. Il a créé un système social tout à fait nouveau, totalement différent de l’ancien libéralisme « démocratique » qui dominait le pays et s’était mis sans vergogne au service de l’impérialisme yankee.
Jean Thiriart : En Europe, les Américains ont corrompu toutes les tendances politiques, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche. Il y a des collaborateurs vendus aux Etats-Unis, aussi bien chez les socialistes que chez les catholiques et les libéraux. Les Américains parviennent à acheter tous les partis. Observez-vous le même phénomène en Amérique latine ?
Juan Domingo Peron : Exactement. Les Américains utilisent la même technique partout dans le monde. Tout d’abord, ils procèdent par la pénétration économique, par l’intermédiaire de cette oligarchie dont je parlais tout à l’heure, qui y trouve un substantiel intérêt... Ensuite, ce sont les pressions politiques plus ou moins directes, dans tous les secteurs politiques. Ainsi, s’ils ne peuvent les acheter, les contrôler, les Américains tentent de faire éclater et de diviser les forces politiques nationales. La CIA est passée maître dans l’art d’organiser des provocations. Ces objectifs atteints, ils s’attaquent alors aux milieux militaires, qu’ils pénètrent par différents moyens, dont le plus efficace est certainement l’utilisation libérale du pot-de-vin. C’est ainsi qu’ils ont opéré au Vietnam du Sud, par l’intermédiaire de quelques « conseillers militaires » dont l’activité principale a été de soudoyer des généraux dont l’intégrité morale était déjà fort loin d’être à toute épreuve, et qui n’ont pas dit non à l’octroi d’avantages financiers considérables (attributions massives d’actions dans des sociétés étrangères, par exemple, ou nominations à des postes de directions générales de sociétés). Ces hommes gagnés à l’impérialisme américain, il ne reste plus qu’à organiser le coup d’Etat militaire qui établira une dictature, comme c’est le cas en Argentine, comme ce le fut au Brésil, en Equateur, comme ça l’est depuis peu au Pérou et à Panama. La méthode est toujours la même. Dans un premier stade, une fois la situation bien en leurs mains, les Américains commencent alors à accaparer toutes les richesses économiques du pays, en muselant systématiquement toutes les forces politiques et sociales d’opposition. Tel est le mécanisme, en Amérique du Sud, en Asie, en Europe et ailleurs.
Jean Thiriart : Il y a encore plus fort. En Europe, les Américains ont réussi à contrôler des mouvements dont le but officiel est l’unification européenne ! Ainsi, à Bruxelles, les mouvements pro-européens parallèles au Marché commun ont fait l’objet d’une telle infiltration qu’ils proclament maintenant « qu’il faut faire l’Europe avec les Américains ». Ce qui est évidemment stupide puisque l’unification européenne, ainsi que nous l’avons maintes fois exposé dans La Nation européenne, implique le départ des Américains. Mais ces derniers sont tellement habiles qu’ils sont même arrivés à prendre en main la tendance européenne pour mieux l’étouffer, pour mieux la faire échouer !
Mais revenons à l’Amérique Latine. Certains gouvernements ne tentent-ils pas de résister à la pénétration américaine ?
Juan Domingo Peron : Pratiquement pas, car nous sommes dans une phase de domination presque absolue. Il y a, bien sûr, quelques gouvernements qui ne sont pas gangrenés par l’impérialisme américain, mais dans le contexte général de soumission, étant donné le caractère dérisoire et aléatoire, parce qu’isolé, des mesures qu’ils adoptent pour faire face à cet impérialisme, ils n’arrivent pas à grouper une véritable opposition. D’autre part, tous les mouvements révolutionnaires d’opposition à l’impérialisme en Amérique du Sud sont pourchassés, en Argentine en particulier. C’est également vrai partout dans le monde, parce que tous les pays, en général, sont plus ou moins dominés, directement ou indirectement, par l’influence impérialiste, qu’il s’agisse de l’impérialisme américain ou de l’impérialisme soviétique. Les deux, au fond, étant d’accord pour un partage du monde « à l’amiable ».
Jean Thiriart : A votre avis, pourquoi les Russes ont-ils apparemment abandonné toute action révolutionnaire en Amérique Latine ? Par accord tacite, et avec la promesse de non-intervention dans une autre partie du monde, les Russes n’auraient-ils pas promis aux Américains de ne rien faire en Amérique Latine ?
Juan Domingo Peron : Certainement si ! C’est le même phénomène qu’en Europe. A Yalta, le monde a été divisé en deux zones d’influences par les deux « super-grands » : une à l’Est du Rideau de Fer, l’autre à l’Ouest. C’est ainsi que l’occupation de la Tchécoslovaquie, comme celle de la Hongrie en 1956, s’est faite avec l’assentiment des Américains. Réciproquement, l’exploitation économique et le contrôle de l’Europe de l’Ouest par les Américains ne sont possibles qu’avec l’accord des Russes. Yalta a divisé le monde en deux chasses gardées au profit des deux puissances impérialistes. C’est à Potsdam que furent signés ces traités par lesquels Russes et Américains sont liés. Cette division a été établie pour éviter ultérieurement des sources de conflits entre les deux impérialismes. A Yalta et à Potsdam, Staline a imposé sa volonté à deux hommes d’Etat déjà presque moribonds, Roosevelt et Churchill. Depuis la conférence de Yalta et les traités de Potsdam ont force de loi permanente et sont entrés dans le droit public international. L’occupation de la Tchécoslovaquie est la conséquence directe de Yalta et Potsdam. Personne ne peut, de bonne foi, le nier.
Qui peut s’opposer à cet état de fait ? Le Tiers-Monde. Mais le Tiers-Monde monde est divisé, ce n’est encore qu’un concept abstrait et un espoir pour tous ceux qui souhaitent la liberté. Le problème de la libération de nos pays ne trouvera sa solution qu’à long terme. C’est le problème non pas d’une mais de plusieurs générations. Dès lors, notre tâche à nous est de préparer ces nouvelles générations qui devront lutter de toutes leurs forces pour la libération à venir. En Argentine, le mouvement justicialiste, le mouvement péroniste, comprend 90 % de la jeunesse. C’est capital, car la jeunesse représente l’avenir et notre action est orientée vers le futur. Nous, les vieux, nous avons fait notre devoir.
Nous laissons maintenant le flambeau aux jeunes.
Jean Thiriart : La libération de l’Argentine seule, ou du Chili seul, vous paraissent vouées à l’échec. Selon vous, les différents mouvements de libération doivent être simultanés et s’exercer à l’échelle continentale. Vous êtes donc un partisan résolu de l’intégration ?
Juan Domingo Peron : Oui. Parce que je crois à un certain déterminisme historique. Le monde a toujours été sous la férule d’un impérialisme. Aujourd’hui, nous avons la malchance d’avoir à lutter contre deux impérialismes complices. Mais la puissance des impérialismes suit une courbe parabolique, et une fois atteint le plus haut point de l’axe des ordonnées, le sommet de la courbe, la décadence commence. Selon moi, les impérialismes sont déjà entrés dans la phase de décadence. Nous avons vu qu’ils ne peuvent être renversés ou ébranlés de l’extérieur, sauf par intégration de tous les moyens de lutte et de toutes les forces concernées. Mais cette « union sacrée » est longue et difficile à réaliser, ce qui permet aux impérialismes de couler des jours heureux. Pourtant, un danger les menace : ils pourrissent de l’intérieur et cette corruption est déjà bien avancée, en Amérique du Nord comme en Russie. Il faut se servir de cela pour précipiter le processus de dégradation. Pour y parvenir, une lutte isolée, aussi héroïque soit-elle, resterait vaine.
Je crois que nous arrivons à une phase de l’histoire de l’humanité qui sera marquée par le déclin des grandes puissances de domination. Nous sommes arrivés là au terme d’une évolution de l’humanité qui, depuis l’homme des cavernes jusqu'à nos jours, s’est faite par l’intégration. De l’individu à la famille, à la tribu, à la cité, à l’Etat féodal, aux nations actuelles, on en arrive à l’intégration continentale. Actuellement, en dehors des quelques colosses, USA, Russie, Chine, un pays seul ne représente pas une grande force et dans l’avenir, dans un monde où l’Europe va s’intégrer, comme l’Amérique et l’Asie, les nations isolées de petites dimensions ne pourront plus survivre. Aujourd’hui, pour vivre avec les moyens de la puissance, il faut rejoindre un bloc, déjà existant ou restant à créer. L’Europe s’unira ou succombera. L’an 2000 verra une Europe unifiée ou dominée. Il en va de même pour l’Amérique Latine.
Une Europe unie compterait une population de près de cinq cents millions d’habitants. Le continent sud-américain en compte déjà plus de deux cent cinquante millions. De tels blocs seraient respectés et s’opposeraient efficacement à l’asservissement aux impérialismes qui est le lot des pays faibles et divisés.
Jean Thiriart : Estimez-vous que le travail d’agitation entrepris par Fidel Castro est utile à la cause latino-américaine ?
Juan Domingo Peron : Absolument. Castro est un promoteur de la libération. Il a du s’appuyer sur un impérialisme parce que la proximité de l’autre menaçait de l’intégrer. Mais l’objectif des Cubains est bien la libération des peuples d’Amérique latine. Ils n’ont d’autre intention que celle de constituer une tête de pont pour la libération des pays continentaux. Che Guevara est un symbole de cette libération. Il a été grand parce qu’il a servi une grande cause, jusqu'à finir par l’incarner. C’est l’homme d’un idéal. Beaucoup de grands hommes sont passés inaperçus parce qu’ils n’avaient pas de cause noble à servir. En revanche, des hommes simples, normaux, loin d’être prédestinés à un tel rôle, qui n’étaient pas des surhommes, mais des hommes tout simplement, sont devenus de grands héros parce qu’ils ont pu bien servir une noble cause..
Jean Thiriart : Avez-vous l’impression que les Soviétiques empêchent Castro d’exercer une action importante en Amérique Latine ? Qu’ils retiennent Castro pour lui interdire de dépasser un certain niveau d’agitation ?
Juan Domingo Peron : Parfaitement. Ce rôle, les Russes ne le jouent d’ailleurs pas seulement à Cuba, mais dans d’autres pays. Ainsi Guevara, après avoir accompli sa mission à Cuba était parti en Afrique pour entrer en contact avec le mouvement communiste africain. Mais les responsables de ce mouvement avaient reçu l’ordre de refouler Guevara. Guevara dut alors quitter l’Afrique, parce que les Russes y travaillaient : un conflit opposait, au Congo, les deux impérialismes concurrents. Les deux tendances opposées qu’ils représentent peuvent, à certains moments, unir leurs forces pour défendre la même cause : celle de l’ordre établi. C’est logique, ils défendent l’impérialisme, et non pas la liberté des peuples !
Jean Thiriart : Que penseriez-vous de la mise en place d’un système mondial d’information et de liaison entre toutes les tendances qui luttent contre les impérialismes russe et américains, et de la mise en commun d’un certain nombre d’efforts politiques ?
Juan Domingo Peron : Il faut considérer que l’unification doit être le principal objectif de tous ceux qui luttent pour une même cause. Je dis unification et non pas union ou association. Ce qu’il faut c’est s’intégrer. Parce que nous aurons bientôt l’occasion d’agir, et pour une action efficace, il faut être intégré et pas seulement associés.
Jean Thiriart : Vous estimez donc qu’il faut aller très loin, beaucoup plus loin que la simple connexion, dans l’alliance tactique avec les ennemis de l’impérialisme américain. Même avec Castro, avec les Arabes, avec Mao-Tse-Tung, si c’est nécessaire ? Vous pensez que l’ennemi est tellement puissant, tellement envahissant, qu’il faudra se mettre tous ensemble pour en venir à bout, en ayant soin de laisser dans l’ombre les différences idéologiques ?
Juan Domingo Peron : Je ne suis pas communiste. Je suis justicialiste. Mais je n’ai pas le droit de vouloir que la Chine soit elle aussi justicialiste. Si les Chinois veulent être communistes, pourquoi voudrions-nous à tout prix les « rendre heureux » contre leur volonté ? Ils sont libres de choisir les régime qu’ils souhaitent, même s’il est différent du nôtre. Chacun est souverain en ce qui concerne ses affaires intérieures. Mais si les chinois luttent contre la même domination impérialiste que nous, alors ils sont nos compagnons de lutte. Mao lui-même a dit : « La première chose à distinguer, c’est l’identité véritable des amis et des ennemis. Ensuite, on peut agir ». Je suis partisan des alliances tactiques, selon la formule : les ennemis de nos ennemis sont nos amis.
Jean Thiriart : Selon vous, la Méditerranée Orientale pourrait-elle être, dans les mois qui vont venir, le foyer d’un très important conflit ?
Juan Domingo Peron : Je considère que la situation de l’Europe n’a jamais été aussi dangereuse qu’actuellement. Tout ce qu’a fait l’Europe pour éviter d’être à nouveau un champ de bataille dans une prochaine guerre est menacé d’être réduit à néant. Avec les bases soviétiques en Afrique, la flotte russe en Méditerranée, les cent vingt-cinq divisions du Pacte de Varsovie, face à une OTAN déclinante qui, de toute manière ne saurait remplacer une armée européenne moderne, l’Europe pourrait être envahie en quelques semaines si les Russes le décidaient. Il est certain que la poudrière moyen-orientale pourrait être à l’origine d’un conflit qui serait ensuite presque impossible de limiter, et dont l’Europe pourrait être une des premières victimes, dans son état actuel de division.
Jean Thiriart : Dans cette optique, la Palestine vous semble-t-elle appelée à devenir un second Vietnam, soumis à une guerre d’abord localisée ?
Juan Domingo Peron : Oui, parce que le Moyen-Orient a une importance stratégique très grande. C’est le pont entre eux continents qui s’éveillent : l’Asie et l’Afrique. C’est pourquoi, sous-jacente à la lutte entre Israël et les pays arabes, les Américains et les Russes se livrent à une lutte d’influences acharnée dont le but est la possession de ce point stratégique.
Jean Thiriart : Je vous remercie. J’en ai maintenant terminé avec mes questions. Souhaiteriez-vous faire une déclaration sur des sujets particuliers ?
Juan Domingo Peron : Je lis régulièrement La Nation européenne et je partage entièrement ses idées. Non seulement en ce qui concerne l’Europe, mais le monde. Un seul reproche, j’aurais préféré au titre La Nation européenne celui de Le Monde nouveau. Parce que l’Europe seule, dans l’avenir, n’aura pas toutes les ressources suffisantes pour la défense de ses intérêts. Aujourd’hui, les intérêts particuliers se défendent souvent dans des endroits fort lointains. L’Europe doit y penser. Elle doit s’intégrer, certes, mais en s’intégrant, elle doit garder des contacts étroits avec les autres pays en voie d’intégration. L’Amérique Latine en particulier, qui est un élément essentiel devant s’allier à l’Europe. Nous Latino-américains, sommes Européens, et non pas de tendance américaine. Je me sens personnellement plus Français, plus Espagnol ou plus Allemand qu’Américain. Le vieux juif Disraéli avait bien raison quand il disait : « Les peuples n’ont ni amis ni ennemis permanents, ils ont des intérêts permanents ». Il faut associer ces intérêts, même s’ils sont géographiquement lointains, pour que l’Europe continue d’être la première puissance civilisatrice du monde.
Madrid, le 7 novembre 1968.