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Le marché du gaz, test de l'ouverture au privé en Chine
Harold Thibault |
International
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L'entrouverture du secteur gazier a valeur de test dans la percée en faveur des réformes promises par le président chinois. En novembre 2013, à l'issue d'une réunion des plus hauts cadres du Parti sur l'agenda économique et social jusqu'en 2020, Xi Jinping promettait de laisser les forces du marché jouer un « rôle décisif ». Objectif : donner un nouvel élan à une deuxième économie mondiale en phase de décélération, où l'initiative privée est étouffée par la toute-puissance des groupes d'Etat.
Les annonces concrètes ont rapidement suivi. Mercredi 23 avril, le premier ministre, Li Keqiang, faisait savoir que 80 projets traditionnellement réservés au secteur public seraient ouverts aux investissements privés, surtout dans l'énergie. En première ligne : le financement des infrastructures gazières. Le 13 mai, le groupe CNPC, plus connu sous son nom en Bourse, PetroChina, annonçait qu'il mettait son gazoduc ouest-est sous le contrôle d'une nouvelle filiale ouverte aux investisseurs privés.
NOTION DE RARETÉ DES RESSOURCES
Long de 4 000 km, il transporte le gaz depuis le Xinjiang, région du Grand Ouest musulman chinois, jusqu'à Shanghaï et aux riches provinces côtières. « L'ouverture progressive du gaz au secteur privé est le développement concret le plus important depuis l'annonce de la nouvelle vague de réformes », analyse Lin Boqiang, directeur du Centre de recherche en économie de l'énergie à l'université de Xiamen (est).
Au même moment, Pékin entend laisser la loi de l'offre et de la demande jouer un plus grand rôle dans la fixation du prix du gaz au consommateur. Encore établi par l'État, il augmentera jusqu'à 50 % pour les plus gros consommateurs en 2015, selon le gouvernement. Les autorités veulent ainsi inculquer aux entreprises la notion de rareté des ressources.
Le choix de mettre PetroChina en première ligne n'est pas anodin. Depuis son arrivée à la tête de l'Etat-parti, M. Xi a fait du cinquième groupe mondial, selon le classement Fortune 500, un exemple des dérives chinoises. C'est au sein de ce mastodonte que son ennemi politique, Zhou Yongkang, a fait ses classes, jusqu'à en devenir directeur général en 1996.
CAMPAGNE ANTICORRUPTION
Il n'est aujourd'hui plus libre de ses mouvements et nombre de ses alliés politiques ont été arrêtés pour corruption : l'ancien président de CNPC, Jiang Jiemin, qui avait quitté l'entreprise en mars 2013 ; le vice-président chargé de l'international, Bo Qiliang ; Zhang Benquan, un temps responsable des opérations avec le Turkménistan, une importante source de gaz naturel pour la Chine.
Outre la purge sous forme de campagne anticorruption, les commentateurs chinois sont partagés sur ces annonces en faveur du privé et du marché du gaz. Habitués aux déceptions face aux cercles officiels qui s'agrippent à la rente publique, ils attendent de voir. L'ouverture dont fait preuve PetroChina n'est pas négligeable car le groupe contrôle environ 80 % du marché du gaz naturel.
Toutefois, comme l'écrit l'éditorialiste Hu Shuli dans le magazine Century Weekly : « Les mots sur le papier ne suffisent pas à convaincre les entrepreneurs qu'il y a du changement dans l'air. On se souvient que des directives ] fondamentales avaient été publiées en 2005 et 2010 en appui aux entreprises privées, mais elles n'ont toujours pas été appliquées. »
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