Selon l'Institut de la statistique, qui a baissé jeudi sa prévision de croissance moyenne en 2014, le chômage devrait augmenter d'ici à la fin de l'année.

Le chômage devrait augmenter de 0,2 point en métropole (à 9,9 %) et de 0,1 point avec l'outre-mer (10,3 %) d'ici à la fin de l'année, selon des prévisions de l'Insee publiées jeudi, plus pessimistes que les précédentes. L'Institut de la statistique tablait en juin sur des taux légèrement inférieurs : 9,8 % en métropole et 10,2 % avec l'outre-mer. Mesuré par l'Insee selon les normes du Bureau international du travail, le chômage avait baissé de 0,2 point fin 2013 en métropole, à 9,7 % de la population active, avant de se stabiliser sur les deux trimestres suivants.
Mais cette éclaircie devrait être de courte durée, à cause de la croissance nulle enregistrée depuis le début de l'année. D'autant que l'Insee ne prévoit que 0,4 % de croissance sur l'année entière, comme le gouvernement qui a dû revoir ses propres prévisions à la baisse. Or, selon la plupart des économistes, il faut au moins 1,5 % de croissance en moyenne pour faire refluer le chômage. Aucun organisme international ne prévoit, en conséquence, de baisse du chômage avant 2015, au mieux.
Plusieurs membres du gouvernement, Manuel Valls en tête, ont admis récemment que les chiffres du chômage ne pouvaient pas être bons en l'absence de croissance. Le ministre du Travail François Rebsamen s'est fixé l'objectif de maintenir le taux sous la barre des 10 % en métropole en 2014.
Plus de 50 000 destructions de poste
L'horizon s'assombrit également en termes d'emplois. "Avec l'atonie de l'activité, l'emploi marchand reculerait de nouveau au second semestre 2014", avec 52 000 destructions de poste, anticipe l'Insee dans son point de conjoncture. Le secteur marchand avait connu une relative accalmie au premier semestre (- 11 800 postes). Là encore, les prévisions sont plus pessimistes qu'en juin ; l'Insee ne prévoyait alors que 22 000 destructions de poste sur l'année. "Néanmoins, le soutien de l'emploi aidé compenserait le recul de l'emploi marchand et l'emploi total serait quasi stable au second semestre", prévoit l'Insee.
Contrairement au taux de l'Insee, le nombre d'inscrits à Pôle emploi, deuxième thermomètre du chômage, augmente de manière quasi continue : les demandeurs d'emploi sans activité étaient 3,41 millions fin août (+ 5,2 % sur un an), flirtant avec le record atteint en juillet.
François Rebsamen s'était fixé l'objectif de ramener leur nombre "le plus près possible des trois millions" d'ici à la fin du quinquennat en 2017. Pour ce faire, le gouvernement mise avant tout sur le pacte de responsabilité, dont il attend plusieurs centaines de milliers d'embauches. Le pacte octroie 40 milliards d'euros aux entreprises d'ici à 2017, en échange de négociations dans les branches professionnelles, sur l'emploi notamment. Pour l'heure, seules les industries chimiques ont signé un accord.
Aucune reprise prévue
L'Insee a par ailleurs baissé jeudi sa prévision de croissance moyenne en France en 2014 à 0,4 %, et a prévenu que le produit intérieur brut ne devrait progresser que de 0,1 % au troisième comme au quatrième trimestre. En juin, sa prévision était de 0,7 %. En l'abaissant, l'Insee s'aligne sur la prévision du gouvernement. Sans donner de prévision pour 2015, ce qui attendra décembre, l'Institut national de la statistique et des études économiques a toutefois indiqué que la France entamerait l'année sans filet, avec un "acquis", c'est-à-dire une réserve de croissance, de 0,1 %. L'acquis de croissance désigne ce que serait la croissance moyenne l'an prochain en France si l'économie stagnait sur chacun des quatre trimestres de 2015. S'il est presque nul, cela signifie que la conjoncture n'a pas de tremplin.
La croissance l'an prochain est la grande inconnue du budget 2015, qui a été présenté mercredi et qui est basé sur une hypothèse de 1 %, jugée "optimiste" par le Haut Conseil des finances publiques, organe indépendant de contrôle. Vladimir Passeron, chef du département de la conjoncture à l'Insee, a jugé lors d'une conférence de presse que la France se trouvait dans un "régime de croissance extrêmement bas", avec un taux de croissance de seulement 0,1 % par trimestre en moyenne depuis le printemps 2011.
Dans le détail, l'Institut a dressé le portrait d'une France au ralenti. Les ménages épargnent davantage (le taux d'épargne est prévu à 15,6 % en 2014, contre 15,1 % en 2013) et consomment à peine plus (+ 0,1 % en 2014). Par ailleurs, leurs investissements, c'est-à-dire essentiellement les achats de logements, s'effondrent : - 7,4 % attendus cette année, une baisse deux fois plus forte qu'en 2013, et un retour aux niveaux de 1998. Les entreprises, elles, vont de nouveau réduire les investissements (- 0,6 %) et leur taux de marge, un indicateur de rentabilité, se dégrade en dépit du soutien du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi : l'Insee le voit à 29,4 % en 2014, contre 29,8 % en 2013.