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Jeudi, 15 Octobre 2009
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Une éducation devenue impossible
Claude Bourrinet
Politique
Une éducation devenue impossible
La « réforme » du lycée annoncée le 12 octobre par Sarkozy, dont on attendait le pire et le meilleur, selon les conceptions que l’on se fait de l’éducation, a finalement abouti à de simples mesures d’ajustement qui, pour une part, se révèlent illusoires, et pour une autre confirment la nature nettement libérale d’un système éducatif dont le sort est de passer, in fine, dans le secteur privé.

Les suppressions de postes, bien qu’elles répondent en partie à des nécessités démographiques, traduisent nettement la volonté de rendre exsangue un corps de fonctionnaires. La réduction de celui-ci est proportionnelle à l’accroissement des sociétés très lucratives prospérant sur le marché de l’éducation. Le crédit d’impôt mirobolant (50% de déduction fiscale) accordé au titre de l’aide à domicile et au soutien scolaire, services octroyés par ces organismes, manifeste concrètement le choix politique de favoriser le secteur privé et la marchandisation de l’enseignement. La culpabilisation des parents face à un avenir problématique pour leurs enfants se nourrit des problèmes de plus en plus visibles de l’Ecole. Aussi bien parle-t-on de crise scolaire depuis sa massification, c’est-à-dire depuis trente ans. Mais il faut se rendre à l’évidence que nous sommes parvenus à un point où tout semble devoir basculer.

Nous pouvons laisser à sa juste place, irréaliste, la croyance que l’on puisse « casser le monopole de la filière scientifique », car notre société, de plus en plus quadrillée par un maillage technoscientifique prégnant et étouffant, ne jure que par les techniques et recherches de pointe aptes à assurer aux citoyens-consommateurs un bonheur tarifé et facile. Il serait de même étonnant que les écoles qui comptent vraiment, celles qui sélectionnent leurs étudiants, abandonnent un instrument d’élection aussi efficace que les mathématiques. A moins qu’on ne veuille noyer ces structures élitaires dans l’indifférenciation égalitariste qui a miné le système, du primaire au supérieur.

L’autre point fort du discours présidentiel est la place plus importante que doit prendre l’orientation. La réalité étant ce qu’elle est, ainsi que la relative rareté des emplois très rémunérés et passionnants, on ne voit pas comment on pourra arriver à convaincre le lycéen moyen que tout le monde ne peut devenir médecin ou ingénieur, et qu’il doit se résigner aux tâches ingrates et rémunérées. L’information, si elle n’est pas hypocrite, doit prendre en compte le principe de réalité. Peut-être est-ce au fond ce que l’on cherche, sous un discours bienveillant, afin de désengorger certaines facultés pléthoriques.

Laisser en effet croire que tout puisse être possible, sinon même dépendant du choix de chacun, c’est-à-dire émettre l’idée d’aménager une orientation progressive, en fonction d’une évolution raisonnablement évaluée au fil du cursus de chacun, ne constitue qu’un vœu pieux. Non seulement il nous faut concevoir un lycéen assez de lucide pour prendre de la hauteur par rapport à la machine éducative, et surtout par rapport à lui-même, à ses propres forces, à ses désirs, quand il en a, et à l’écart entre les unes et les autres, mais il s’agit aussi pour lui de prévoir l’état du marché de l’emploi dans les dix années à venir, ce qui est pratiquement impossible dans l’état dégradé où se trouve le travail, et pour encore bien longtemps, travail dont la nature fluctue en fonction de l’obsolescence de certains métiers et de la création d’autres. Malgré une bonne volonté affichée, ne demeurera qu’un brouillard épais voilant le futur pour une majorité d’élèves, ceux qui sont faibles, ou seulement moyens, et une très relative assurance pour les autres. Rien de nouveau sous le soleil, donc.

Le problème vient des difficultés rencontrées par un public scolaire de moins en moins assidu, insoucieux des enjeux d’une Ecole dont il ne saisit plus la finalité. Le manque de repères tant pour les enseignants que pour les familles est patent. Jadis, l’Ecole, outre la culture et l’ouverture intellectuelle qu’elle prodiguait comme allant de soi, se présentait comme un ascenseur social, au même titre que l’Eglise dans l’Ancien Régime. Tout est brouillé et les idéaux sont régulièrement bafoués. Il n’est pas besoin pour s’en rendre compte de prendre connaissance des comparaisons offertes par l’OCDE aux medias pour nourrir la propagande pro-libérale. Nul besoin d’accuser un pauvre chien déjà agonisant d’avoir la rage pour l’occire définitivement. L’immixtion massive d’une population inadaptée au travail abstrait a suffi pour l’achever.

Du reste, il est intéressant de s’attarder à ces comparaisons.

Pour preuve de ces falsifications pieusement transmises au bon peuple dans les homélies quotidiennes de nos medias, il n’est pas faire remarquer qu’en retranchant 10% du lot français analysé, à savoir les établissements en grande difficulté, lesquels se situent dans les banlieues des grandes villes, on arrive à des taux de réussite équivalents à ceux de Finlande, qui ne connaît qu’une immigration minime, souvent russe, et des classes fort réduites. Sans compter que si ce pays s’en tire bien, c’est au prix d’un enseignement allégé, dont les méfaits se font sentir dans le supérieur. Quant au système éducatif japonais, considéré comme l’un des meilleurs, nos libéraux le citent souvent en omettant son caractère militarisé et compétitif. S’il faut exiger de nos jeunes le port de l’uniforme, la pratique assidue des arts martiaux, une discipline de fer, et qu’ils se fassent seppuku après avoir échoué aux examens, eh bien chiche !

Il n’est pas inutile non plus de constater qu’un véritable débat sur les objectifs, autre que celui, déjà pipé d’avance, de la nécessaire « démocratisation » du savoir, fait défaut, et que l’accent est mis surtout sur les moyens pédagogiques, les savoir-faire, les comportements individuels et collectifs à acquérir. Dans quel but ? Comme l’affirme l’adage chinois : quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt. Il se peut bien que pour l’idiot contemporain, la lune n’existe même plus.

Aussi une autre mesure de Sarkozy est-elle de développer l’offre de soutien scolaire au sein des établissements. Il semblerait que ce dispositif d’aide ait éprouvé quelque difficulté à se mettre en place dans le primaire et au collège. Il est nécessaire évidemment, pour ce faire, de prévoir des structures adéquates, du temps, des locaux, ainsi que des cadres pour animer ces cours. Question de moyens : pour une fois, les syndicats, souvent démagogues, n’ont pas tort. Ce qu’ils oublient souvent de dire, c’est que cette recette apparemment (pour l’opinion) magique, possède ses limites (on décrète que l’élève a toujours envie d’apprendre : essayer de faire pisser un âne qui ne veut pas en jouant du pipeau !), mais aussi que l’extension de ce remède risque d’amputer le temps consacré aux cours fondamentaux, comme cela s’est produit dans le primaire et le secondaire. Depuis quelques dizaines d’années, le processus s’accélérant de plus en plus, l’enseignement des disciplines devient secondaire au profit de celui des « méthodologies », des techniques d’expression, des replâtrages en tous genres, des pratiques de découverte et d’autonomie, complètement illusoires, quand ce n’est pas à l’occasion de sorties qui transforment l’année scolaire en peau de léopard. Ajoutons à ce désastre la suppression complète de la sélection à la sortie de troisième, et nous avons le nécessaire pour cette fameuse crise du lycée.

Enfin, last but not least, notre président propose « un plan d’urgence » pour l’enseignement des langues étrangères. Entendez l’anglais, dont on nous dit que c’est une honte pour l’honnête homme contemporain de l’ignorer. Il va de soi que l’accent mis sur cet apprentissage, qui n’est même pas compensé par un rappel, même gratuit, de l’état désastreux de l’enseignement de notre propre langue et du besoin de la revaloriser, cache mal un projet politique par ailleurs de plus en plus revendiqué, d’intégrer la France et l’Europe au monde anglo-saxon et d’éradiquer toute racine incarnée par notre langue maternelle. Il est bien sûr profitable (culturellement et humainement) d’entretenir des relations avec d’autres peuples, et l’on ne saurait trop encourager nos jeunes à s’ouvrir, sans s’oublier soi-même, bien entendu. Mais on conviendra qu’il ne s’agit en l’affaire ni de l’anglais de Shakespeare, ni même d’un idiome assez riche pour être le véhicule d’une expression intellectuelle et émotionnelle profonde. Ce qui est visé est une adéquation de l’être au monde du commerce, au business, aux affaires, lesquels n’exigent que la finesse du renard et un conformisme, sinon une ignorance, tout à fait séduisants pour les tenants du système.

L’éducation, depuis qu’elle existe, poursuit apparemment deux buts distincts : la distanciation ou l’intégration. Certaines sociétés ont semblé valoriser la première, comme la Grèce et Rome, ou la troisième République, d’autres ont paru privilégier la seconde, comme Spartes et la Gaule. Les premières éduquaient les jeunes générations à partir d’un corpus humanistique ayant pour but de produire des personnes raisonnables, équilibrées, sensibles, curieuses, critiques et responsables. L’humanisme, en dernier recours, consiste à juguler les instincts violents, animaux, en l’homme. « Educere », c’est tirer (conduire : « ducere ») hors (e = ex) de la sauvagerie. Les secondes intégraient celles-ci dans des structures juvéniles paramilitaires, qui préparaient à la guerre et libéraient les instincts. La violence, voire la cruauté, quand elles étaient encouragées par le dressage, le rituel ou des activités comme la chasse ou le sport, permettaient à chacun de trouver sa place dans une société très compartimentée. Mais en même temps, l’éducation romaine était enracinée profondément dans le passé de la patrie, et les exempla étaient la base d’une étude des mœurs, des comportements et de la morale (laquelle souffrait l’expression d’une cruauté tempérée par le cérémonial du cirque). Education intégrative, donc. N’oublions pas non plus que nos « clercs », nos intellectuels républicains, bien que kantiens, rationalistes, débarrassés des superstitions et troubles de la subjectivité, adhéraient fortement au projet bourgeois, scientiste et patriotique d’une France qui semblait indéboulonnable, avant le traumatisme de la première guerre mondiale et l’appel des sirènes internationalistes et communistes. De même, dans les sociétés que l’on admettra plus « archaïques » (ce qui n’est pas une condamnation), certains corps, comme les druides, permettaient de se placer en retrait, mais à un niveau sacré supérieur, la caste religieuse celte (anticipant notre ordre monastique médiéval) étant dégagée des obligations militaires et dispensant un enseignement exigeant, hermétique et supérieur.

Quel est dont la finalité du système éducatif actuel ?

Il est évident qu’il a renoncé à former des êtres munis de capacités critiques susceptibles de les placer au-dessus de la mêlée, ou du moins à une hauteur telle qu’ils soient capables de comprendre suffisamment le monde et eux-mêmes. L’étude des humanités et le rappel du passé ont été sacrifiés sur l’autel de la mondialisation et d’un nivellement vers le bas prodigué par une société de consommation abrutissante, qui libère les instincts les plus égoïstes (rien à voir avec le jeune Celte qui se dévouait à sa phratrie et se sacrifiait sur le champ de bataille en vouant ses ennemis aux esprits infernaux). Ce n’est pas en les remplaçant par un catéchisme « citoyen », par une hypermnésie historique consacrée à certaines périodes, par un matraquage bien-pensant et par la bouillie du cœur qu’on en fera des hommes libres. Le discours de la liberté n’étant pas garant de la vraie liberté. On risque plutôt de les transmuer en éponges à propagande, en cœurs faibles, en bêtes à troupeau.

Aussi est-ce le véritable objectif de la révolution éducative de notre époque : intégrer les corps, les cœurs et les âmes au nouvel ordre mondial, les empêcher de se révolter avec autre chose que des t-shirts à l’effigie du Che.

Il se peut bien qu’une bonne partie de la population n’ait pas d’autre perspective, quelle que soit l’époque et la latitude, que de « s’intégrer » sans d’autre alternative. Telle fut le sort de la plèbe, qui n’avait que son cœur et son sang à donner aux mânes de la patrie ou du clan. Même l’alphabétisation, l’expansion de la lecture ont eu pour but une plus grande adhésion à l’offre idéologique, fût-elle chrétienne ou républicaine. Mais ce qui est singulièrement inquiétant, maintenant, c’est que d’une part disparaît une élite culturelle et intellectuelle capable de prendre des distances avec les pulsions et les pressions d’un environnement voué au pire matérialisme qui se soit vu de longtemps, et, d’autre part, que l’intégration des masses à cette nouvelle logique planétaire ne pourra s’effectuer qu’au prix, au sacrifice, de tout ce qui les reliait jusque là aux valeurs de liberté patriotique, nationale, identitaire et de maîtrise de soi et de leur destin.

Au moins Spartes préféra-t-elle disparaître, après de brusques révoltes, que de subir l’esclavage de Rome.

L’éducation communautariste reste-t-elle l’ultime secours ?
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depeches
Vengeance ? 3/11/09
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