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Pourquoi j'ai tué Gandhi
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27/04/04 |
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3.40 t.u. |
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Nathuram Godsé |
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Nathuram Godsé, membre d’un groupe nationaliste hindou, assassina Gandhi le 30 janvier 1948, de trois coups de feu, sur la pelouse de Birla House. Il n’agit pas par haine personnelle, mais pour des raisons politiques. Il fut exécuté par pendaison, le 15 novembre 1949. Sa défense devant le tribunal fut interdite de publication pendant près de trente ans, jusqu’en 1977 où elle commença à circuler à l’initiative de son frère, Gopal Godsé ; mais c’est seulement après l’arrivée au pouvoir de la droite hindoue en 1992 que ce texte connut une large diffusion. C’est un document important pour l’Histoire, qui apporte un éclairage alternatif sur la personnalité de Gandhi et sur les conséquences de son action – faisant apparaître des aspects que l’establishment politique occidental a toujours tenté de nier et d’occulter.
Né dans une fervente famille de brahmanes, j’en vins instinctivement à vénérer la religion hindoue, l’histoire hindoue et la culture hindoue. Je fus donc intensément fier de l’hindouisme dans son ensemble. En grandissant, je développai une tendance à la libre pensée, libre de toute allégeance superstitieuse à une idéologie quelconque, politique ou religieuse. C’est pourquoi j’œuvrai activement à l’éradication de l’intouchabilité et du système des castes basé sur la seule naissance. Je rejoignis ouvertement les mouvements anti-castes et soutins que tous les hindous avaient un statut égal quant à leurs droits sociaux et religieux, et devaient être considérés seulement selon leur mérite et pas selon l’accident de la naissance dans une caste ou profession particulière. Je pris l’habitude de prendre part publiquement à des dîners anti-castes auxquels participaient des milliers d’hindous – brahmanes, kshatriyas, vaishas, chamars et bhangis. Nous brisions les règles des castes et dînions tous ensemble.
Je lus les discours et les écrits de Dadabhai Naoroji, Vivekananda, Gokhale, Tilak, ainsi que les livres sur l’histoire ancienne et moderne de l’Inde et de quelques pays de premier plan comme l’Angleterre, la France, l’Amérique et la Russie. De plus j’étudiai les principes du socialisme et du marxisme. Mais surtout j’étudiai très attentivement tout ce que Veer Savarkar et Gandhiji avaient écrit et déclaré, et à mon avis ces deux idéologies ont contribué à la formation de la pensée et de l’action du peuple indien pendant les 30 dernières années plus que tout autre facteur.
Toutes ces lectures et ces pensées me conduisirent à penser que mon premier devoir était de servir l’hindouité et les hindous, à la fois comme patriote et comme citoyen du monde. Assurer la liberté et sauvegarder les justes intérêts de quelque 300 millions d’hindous entraînerait automatiquement la liberté et le bien-être de toute l’Inde, un cinquième de la race humaine. Cette conviction me conduisit naturellement à me consacrer à l’idéologie et au programme sanghtaniste [nationaliste] hindou, qui seul, en vins-je à le penser, pouvait conquérir et préserver l’indépendance nationale de l’Hindustan, ma Mère-patrie, et lui permettre de rendre un vrai service à l’humanité aussi.
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Depuis l’année 1920, c’est-à-dire après la disparition de Lokamanya Tilak, l’influence de Gandhiji dans le [Parti du] Congrès s’accrut d’abord et ensuite devint suprême. Ses activités pour l’éveil du public furent phénoménales par leur intensité et furent renforcées par le slogan de vérité et de non-violence dont il faisait ostensiblement étalage devant le pays. Aucune personne sensible ou éclairée ne pouvait faire objection à ces slogans. En fait il n’y a rien de nouveau ni d’original en eux. Ils sont implicites dans tout mouvement public constitutionnel. Mais ce n’est qu’un rêve d’imaginer que la grande masse de l’humanité soit capable ou puisse devenir capable d’adhérer scrupuleusement à ces principes élevés dans la vie normale de tous les jours. En fait, l’honneur, le devoir et l’amour de ses amis et parents et de son pays peut souvent nous obliger à abandonner la non-violence et à faire usage de la force. Je n’ai jamais pu concevoir que la résistance armée à une agression soit injuste. Je considérerais comme un devoir religieux et moral de résister, et, si possible, de vaincre un tel ennemi par l’usage de la force. [Dans le Ramayana] Rama tue Ravana dans un violent combat et délivre Sita. [Dans le Mahabharata] Krishna tue Kansa pour mettre fin à sa méchanceté ; et Arjuna doit combattre et tuer un grand nombre de ses amis et relations, y compris le vénéré Bhisma, parce que ces derniers sont du coté de l’agresseur. Je crois fermement qu’en dénonçant Rama, Krishna et Arjuna comme coupables de violence, le Mahatma a montré une totale ignorance des sources de l’action humaine.
Dans l’histoire plus récente, ce fut le combat héroïque livré par Chhatrapati Shivaji qui mit d’abord en échec et finalement détruisit la tyrannie musulmane en Inde. Il était absolument nécessaire pour Shivaji de vaincre et de tuer l’agressif Afzal Khan, sans cela il aurait perdu sa propre vie. En condamnant les grands guerriers de l’histoire comme Shivaji, Rana Pratap et Guru Gobind Singh comme des patriotes égarés, Gandhiji a simplement montré sa vanité. Il était, même si cela peut paraître paradoxal, un pacifiste violent qui apporta des calamités inouïes au pays au nom de la vérité et de la non-violence, alors que Rana Pratap, Shivaji et le Guru resteront à jamais présents dans les cœurs de leurs compatriotes pour la liberté qu’ils leur apportèrent.
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Les provocations accumulées pendant 32 ans, culminant avec son dernier jeûne pro-musulman, me conduisirent à la conclusion qu’il fallait mettre fin à l’existence de Gandhi immédiatement. En Afrique du Sud, Gandhi avait très bien réussi à défendre les droits et le bien-être de la communauté indienne. Mais quand il revint finalement en Inde, il développa une mentalité subjective par laquelle lui seul devait être le juge final de ce qui était juste ou erroné. Si le pays le voulait pour leader, il devait accepter son infaillibilité ; s’il ne l’acceptait pas, il [Gandhi] se tiendrait à distance du Congrès et suivrait son propre chemin. Soit le Congrès devait s’en remettre à sa volonté et devait se contenter de jouer le second rôle derrière toute son excentricité, ses caprices, sa métaphysique et sa vision primitive, soit il devait poursuivre sans lui. Lui seul était le Juge de tous et de toutes choses ; il était le cerveau supérieur guidant le mouvement de désobéissance civile ; personne d’autre ne pouvait connaître la technique de ce mouvement. Lui seul savait quand le commencer et quand le terminer. Le mouvement pouvait réussir ou échouer, il pouvait apporter des désastres et des revers politiques immenses, mais cela ne pouvait faire aucune différence pour l’infaillibilité du Mahatma. « Un Satyagrahi ne peut jamais échouer » fut sa formule pour déclarer sa propre infaillibilité, et personne sauf lui ne savait ce qu’était un Satyagrahi.
Ainsi, le Mahatma devint le juge et le jury de sa propre cause. Cette folie et cet entêtement, associés à la plus sévère austérité de vie, à un travail incessant et à un caractère hautain, rendirent Gandhi formidable et irrésistible. Beaucoup de gens pensaient que sa politique était irrationnelle mais ils devaient soit se retirer du Congrès, soit placer leur intelligence à ses pieds et faire ce qu’il voulait. Dans une telle position d’irresponsabilité absolue, Gandhi se rendit coupable de bévue après bévue, échec après échec, désastre après désastre.
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La politique pro-musulmane de Gandhi est flagrante dans son attitude perverse sur la question de la langue nationale de l’Inde. Il est absolument évident que le hindi a droit à la plus grande priorité à être choisi comme langue principale. Au début de sa carrière en Inde, Gandhi donna une grande impulsion au hindi mais comme il trouva que les musulmans ne l’aimaient pas, il devint un champion de ce qu’il appelait l’hindoustani. Chacun sait en Inde qu’il n’existe aucune langue du nom d’hindoustani ; il n’a pas de grammaire ; il n’a pas de vocabulaire. C’est un simple dialecte, il est parlé, mais pas écrit. C’est une langue bâtarde et hybride entre l’hindi et l’ourdou, et même les sophismes du Mahatma ne pouvaient le rendre populaire. Mais dans son désir de plaire aux musulmans, il insista pour que seul l’hindoustani devienne la langue nationale de l’Inde. Ses partisans aveugles, bien sûr, le soutinrent, et la langue hybride commença à être utilisée. Le charme et la pureté de la langue hindi durent se prostituer pour plaire aux musulmans. Toutes ses expérimentations se faisaient aux dépens des hindous.
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A partir d’août 1946, les armées privées de la Ligue Musulmane commencèrent à massacrer les hindous. Le Vice-Roi d’alors, Lord Wavell, bien que peiné par ce qui arrivait, n’utilisa pas ses pouvoirs sous l’Acte de 1935 du Gouvernement de l’Inde, pour empêcher le viol, le meurtre et l’incendie. Le sang hindou commença à couler du Bengale à Karachi, avec quelques représailles de la part des hindous. Le Gouvernement Intérimaire formé en septembre fut saboté par ses membres appartenant à la Ligue Musulmane dès sa mise en place, mais plus ils devenaient déloyaux et traîtres au gouvernement dont ils faisaient partie, plus l’engouement de Gandhi pour eux était grand. Lord Wavell dut abandonner puisqu’il ne pouvait pas apporter de solution et Lord Mountbatten lui succéda. Le Roi de bois fut remplacé par le Roi Cigogne.
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Le Congrès qui s’était vanté de son nationalisme et de son socialisme accepta secrètement le Pakistan, littéralement à la pointe des baïonnettes, et capitula d’une manière abjecte devant Jinnah. L’Inde subit une vivisection et un tiers du territoire indien devint un pays étranger pour nous le 15 août 1947. Lord Mountbatten en vint à être décrit dans les milieux du Congrès comme le plus grand Vice-Roi et le plus grand Gouverneur Général que le pays avait jamais eu. La date officielle pour le transfert de pouvoir fut fixée au 30 juin 1948, mais Mountbatten avec sa chirurgie impitoyable nous fit le cadeau d’une Inde mutilée avec dix mois d’avance. Voilà ce que Gandhi a accompli après 30 ans de dictature incontestée et voilà ce que le Parti du Congrès appelle « liberté » et « transfert pacifique de pouvoir ». La bulle de l’unité hindou-musulmane fut finalement crevée et un Etat théocratique fut établi avec le consentement de Nehru et de sa bande et ils appelèrent cela la « liberté gagnée par leur sacrifice » – le sacrifice de qui ? Quand les principaux leaders du Congrès, avec le consentement de Gandhi, divisèrent et déchirèrent le pays – que nous considérons comme une déité digne d’un culte – mon âme fut remplie d’une affreuse colère.
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L’une des conditions imposées par Gandhi pour cesser son jeûne jusqu’à la mort était relative aux mosquées de Delhi occupées par les réfugiés hindous. Mais quand les hindous du Pakistan furent soumis à des violences, il ne prononça pas un seul mot pour protester et blâmer le gouvernement du Pakistan ou les musulmans concernés. Gandhi était suffisamment sagace pour savoir qu’en entamant un jeûne jusqu’à la mort, si pour l’interrompre il avait imposé quelque condition aux musulmans du Pakistan, il se serait difficilement trouvé des musulmans pour montrer du chagrin si le jeûne s’était terminé par sa mort. C’est pour cette raison qu’il évita volontairement d’imposer des conditions aux musulmans. Il était pleinement conscient par son expérience que Jinnah n’était pas du tout troublé ou influencé par son jeûne et que la Ligue Musulmane n’attachait aucune valeur à la voix intérieure de Gandhi.
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On se réfère à Gandhi comme au Père de la Nation. Mais s’il en est ainsi, il a manqué à son devoir paternel dans le sens où il a agi traîtreusement envers la nation en consentant à sa partition. Je maintiens fermement que Gandhi a manqué à son devoir. Il s’est révélé être le Père du Pakistan. Sa voix intérieure, son pouvoir spirituel et sa doctrine de la non-violence dont on fait tant état, s’effondrèrent totalement devant la volonté de fer de Jinnah et se révélèrent impuissants.
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Pour parler brièvement, j’ai pensé à moi-même et j’ai prévu que je serai totalement ruiné, et que la seule chose que je pouvais attendre du peuple ne serait que de la haine, et que je perdrai tout mon honneur, encore plus précieux que ma vie, si je devais tuer Gandhiji. Mais en même temps je sentis qu’en l’absence de Gandhiji la politique indienne se révélerait sûrement sensée, capable de riposter, et serait puissante avec des forces armées. Aucun doute, mon propre avenir serait totalement ruiné, mais la nation serait sauvée des incursions du Pakistan. Le peuple pourrait même dire que j’étais privé de tout bon sens et me traiter d’idiot, mais la nation serait libre de suivre le cours fondé sur la raison que je considère comme nécessaire pour la saine construction de la nation. Après avoir pleinement considéré la question, je pris la décision finale en la matière, mais je n’en parlai jamais à personne. Je pris mon courage à deux mains et je tirai les coups de feu sur Gandhiji le 30 janvier 1948, sur le terrain de prière de Birla House.
Si le dévouement envers son pays est un péché, je reconnais que j’ai commis ce péché. Si cela est méritoire, j’en revendique humblement le mérite. Je crois fermement et avec confiance que s’il y a un autre tribunal au-delà de celui des mortels, mon acte ne sera pas considéré comme injuste. Si après la mort un tel lieu n’existe pas, il n’y a rien à dire. J’ai eu recours à l’action que j’ai faite uniquement pour le bénéfice de l’humanité. Je déclare que mes coups de feu furent tirés sur la personne dont la politique et l’action avaient apporté la perte et la ruine et la destruction à des millions d’hindous. Il n’y avait aucune procédure légale par laquelle un tel coupable pouvait être obligé de rendre des comptes, et pour cette raison je tirai les coups fatals.
Je n’ai aucune mauvaise volonté envers quelqu’un individuellement, mais je dis que je n’avais pas de respect pour le présent gouvernement à cause de sa politique qui était injustement favorable aux musulmans. Mais en même temps je pouvais clairement voir que cette politique était entièrement due à la présence de Gandhi. Je dois dire avec grand regret que le Premier Ministre Nehru oublie complètement que ses prédications et ses actions sont en contradiction lorsqu’il parle à tout propos de l’Inde comme d’un Etat séculier, parce qu’il est significatif de noter que Nehru a joué un rôle de premier plan dans l’établissement de l’Etat théocratique du Pakistan, et son travail fut facilité par la continuelle politique d’apaisement de Gandhi envers les musulmans.
Je me tiens maintenant devant le tribunal pour assumer la pleine responsabilité de ce que j’ai fait, et bien sûr le juge rendra contre moi les ordres de condamnation qui seront considérés comme appropriés. Mais je voudrais ajouter que je ne désire aucune pitié, et je ne souhaite pas non plus que quelqu’un d’autre demande pitié en mon nom. Ma confiance en l’aspect moral de mon action n’a pas été ébranlée même par les critiques soulevées contre elle de toutes parts. Je n’ai aucun doute que les écrivains honnêtes de l’histoire soupèseront mon acte et en découvriront un jour la valeur dans le futur.
Vande Mataram !
Vive l’Inde indivisible !
Delhi, 11 août 1948.
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