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politique
suite

Affaire Gaymard : le vrai scandale

07/03/05 7.28 t.u.
polemia.com

Le 25 février 2005, Hervé Gaymard, ministre de l’économie et des finances du gouvernement Raffarin a démissionné à la suite d’une intense campagne médiatique. L’événement mérite un décryptage.

Laissons nous aller un instant à hurler avec les loups : Hervé Gaymard a eu tort de prendre un logement de fonction de 600 m2 ; il a eu tort de se laisser placer en position d’accusé à l’émission de télévision « 100 minutes pour convaincre » ; il a eu tort de s’y laisser donner des leçons de morale (!) et d’économie ( ) par Dominique Strauss-Kahn ; il a eu tort de finasser avec la vérité.

Mais la complainte du « tous pourris » n’a pas d’intérêt car le vrai scandale n’est pas là.

Le vrai scandale est dans l’impossibilité de mener une carrière politique avec une famille très nombreuse, il est dans la familialophobie et la catholicophobie du système français qui interdit toute déviation par rapport au modèle politiquement et médiatiquement correct. Il est dans l’abaissement de la classe politique et sa soumission de plus en plus absolue à la classe médiatique. Il est dans la mise en place de relations asymétriques entre les pouvoirs politiques, d’un côté, médiatiques et syndicaux de l’autre. Il est aussi dans la destruction de toute fonction financière et budgétaire en France.

Explications.

1. Le triomphe de la familialophobie

Si Hervé Gaymard avait eu la sagesse d’avoir une famille de taille modeste ou mieux était resté célibataire sans enfants, il aurait eu comme ses collègues de l’intérieur, de la défense ou de la culture, un logement de fonction de 300 m2 sans que cela pose le moindre problème à personne. Car ce qui a créé son besoin excessif de surface, c’est l’ajout aux espaces de réception des espaces personnels nécessaires à huit enfants dont 5 de 12 à 19 ans ! Comme l’a dit avec son humour (ou son cynisme ?) habituel André Santini : “Pour être ministre, il vaut mieux ne pas avoir d’enfants !”. Et d’ailleurs les trois autres ministres concernés par les mesures de moralisation ( ? ) de Jean-Pierre Raffarin en matière de logement de fonction sont tous pères de famille nombreuse : Frédéric de Saint Sernin (4 enfants), Laurent Hénart (4 enfants), Jean-François Copé (bientôt 3 enfants).

Cette stigmatisation de ministres pères de famille est à rapprocher de l’affaire Nina Ricci : contrainte d’alléger ses effectifs, cette entreprise avait proposé de tenir compte de critères familiaux et de garder préférentiellement ses salariés ayant des charges de famille. Cette mesure de justice familiale a provoqué un tollé des syndicats.

Cette haine de la vie, cette familialophobie ne manque pas de laisser pantois dans un pays qui s’apprête à devenir un vaste hospice à partir de 2025.

2. Le refus de toute ‘déviance’ par rapport au modèle dominant

L’acharnement mis à abattre Hervé Gaymard est étonnant : à partir du moment où il avait renoncé à son logement, l’affaire aurait dû s’arrêter ; or la machine médiatique est repartie et s’est emballée : « Le Canard », « Le Monde », « Paris-Match » - tous organes qui avaient su taire pendant 14 ans l’hébergement aux frais de l’État du deuxième ménage de François Mitterrand - se sont acharnés. Parce que les Gaymard étaient une cible : apparemment chiraquiens de stricte obédience, ils étaient aussi marqués du « pêché originel » de mal pensance comme fille et gendre du Professeur Jérôme Lejeune, brillant généticien, mais aussi héros de la lutte des catholiques contre l’avortement dans les années 70/80.

Avec leurs huit enfants et les livres qu’ils écrivent - sous le nom de Clara Lejeune pour elle – les Gaymard montraient qu’ils avaient gardé une certaine fidélité à cet engagement « réactionnaire » - dixit « Le Monde ». Or en France si le moindre soupçon d’islamophobie ou de judéophobie est poursuivi devant les tribunaux, la catholicophobie, elle, se porte plutôt bien !

Hervé Gaymard avait un autre défaut. Il se méfiait des médias (d’où peut-être son relatif manque d’expérience face au feu médiatique) et, pensant à certains de ses collègues, se moquait « de ces phalènes attirées par la lumière » : là aussi, il se mettait en marge du système dominant, notamment dans son sympathique ouvrage sur « La route des Chapieux ».

A cet égard, son successeur, le flamboyant Thierry Breton, écrivain et industriel à succès, parait davantage « dans la ligne ». « Le Monde » du 27/28 février en fait ainsi l’éloge : « Devenu grand patron, l’homme qui nie être franc-maçon, tisse ses réseaux. Il fait partie de la « bande à Bébéar » (actionnaire du Monde…) (…) (il) « a surtout une conviction : la France doit ouvrir ses frontières à l’immigration. Pour lui, cela devrait être « le » grand projet du pays auquel tout le reste (éducation, logement…) doit être conditionné ».

3. Médias/Politiques : la relation asymétrique

Alors qu’il pensait encore pouvoir triompher de la campagne de diabolisation médiatique dont il était l’objet, Hervé Gaymard avait joliment déclaré : « Je ne me laisserai pas épingler comme un papillon ».

Malheur à lui, il a fini épinglé comme un papillon ! Et c’était bien là l’objectif de ses attaquants, non pas seulement par rapport à lui-même mais par rapport à la consolidation d’un rapport de force entre les médias et les politiques, rapport qui est profondément asymétrique car un homme de gouvernement peut difficilement abattre un homme de média, mais un homme de média peut facilement abattre un homme de gouvernement.

Sous la IVème République, on défaisait un ministre dans les couloirs de la Chambre des députés ; sous la Vème République, on le défait dans les couloirs du « Monde ».

La subordination des politiques aux médias est donc constamment réaffirmée.

Ainsi ce qui prime, ce n’est plus l’opinion des électeurs, c’est l’opinion dominante dans les médias. Ce qui prime ce n’est plus l’action, c’est la communication. Ce qu’a d’ailleurs bien théorisé Nicolas Sarkozy affirmant sans fard : « Avant d’agir, il faut communiquer ». Ainsi la communication n’accompagne plus l’action : elle la précède et même elle la conditionne.

La relation asymétrique médias/politiques concerne aussi la « transparence » exigée des uns mais non des autres…

Toujours dans le numéro du « Monde » du 27/28 février, on peut lire à la même page (p. 12) les phrases suivantes :

A - au bas de l’éditorial intitulé, « Une démission ! » : « Il reste à rédiger un statut des ministres précis et contraignants qui fixe à ces agents de la République les limites à ne pas dépasser. Il y a urgence. ». Ainsi « Le Monde » a fixé l’agenda du Premier ministre : Celui?ci n’a plus eu qu’à s’exécuter ! Ce qu’il fait, dès le 2 mars, en s’engageant à agir dans la direction indiquée par le « Monde ».

B - c’est un autre son de cloche que donne la chronique du médiateur intitulé « au cœur du monde » et qui cherche à répondre aux interrogations que les lecteurs se posent sur leur journal de référence ; à ceux-ci Robert Solé répond : « Tout ne peut pas être dit. Dans une entreprise, certaines informations sont confidentielles, d’autres peuvent porter préjudice à des personnes ou au journal lui-même ». Bref, la transparence est bonne pour ceux qu’on veut abaisser, pas pour soi même…

4. Transparence asymétrique, abaissement des politiques et abaissement de la démocratie

Cette transparence asymétrique est la cause de l’abaissement des politiques. Eux seuls sont harcelés. Eux seuls font l’objet d’affaires publiques.

Entendons-nous bien, le pouvoir engendre l’excès de pouvoir ; et l’excès de pouvoir doit être combattu. Mais les abus en matière de logements de fonctions, d’aménagement de bureaux, de notes de frais ou de voitures ne sont pas seulement le fait des politiques, ils sont aussi le fait des hommes de médias ou des chefs syndicaux ou des patrons des grandes entreprises. On peut vouloir une société transparente (ce n’est pas forcément une bonne idée d’ailleurs) mais alors qu’elle le soit complètement. Tel n’est pas le cas aujourd’hui.

Ainsi l’opinion ignore les modes de financement des grands syndicats. Elle ignore les avantages de leurs dirigeants et leurs systèmes de retraite (par capitalisation !)

De même, l’opinion ignore les modes de financement des grands médias qui perdent de l’argent (« Le Monde », « Libération ») mais trouvent toujours des capitalistes prêts à y investir : dans quels buts ? L’opinion ignore aussi les vrais revenus des journalistes, bien souvent notes de frais fictives et « ménages » rétribués plusieurs milliers d’euros par journée. Est-ce légitime ?

Résultat, il n’est de « brebis galeuses » connues que chez les élus ! Eux seuls sont ainsi frappés par un manque de considération, eux seuls risquent d’être harcelés dans leur vie familiale, eux seuls sont exposés à une pression médiatique permanente.

Cela contribue à la fois à dissuader des hommes de talents de s’engager dans la vie politique et à pousser ceux qui s’y engagent à faire profil bas pour limiter les risques personnels. C’est la sélection par la médiocrité.

Tout cela vide les fonctions électives de prestige et d’intérêt, mais il faut bien savoir que l’abaissement des élus, c’est aussi l’abaissement de la démocratie. La question qui se pose est d’ailleurs la suivante : à l’heure de la tyrannie médiatique, la démocratie a-t-elle encore un sens ?

5. L’effacement des fonctions financières et budgétaires de l’État

Un autre élément de l’affaire Gaymard mérite d’être souligné : l’extrême fragilité des ministres des finances dans la Vème République finissante Le poste de Bercy paraît aujourd’hui plus dangereux encore que celui de ministre de l’intérieur et même que celui de ministre de l’éducation nationale.

Depuis 10 ans, neuf ministres se sont ainsi succédés : Alain Madelin, mystérieusement démissionnaire (vraisemblablement sous la menace d’une campagne médiatico-syndicale), Jean Arthuis (auteur d’un livre de mémoires empreint de scepticisme), Dominique Strauss-Kahn (démissionnaire à la suite d’une affaire judiciaire qui n’a finalement jamais débouché), Christian Sautter (abattu par une coalition médiatico-syndicale après avoir tenté de moderniser le ministère), Laurent Fabius (dont l’immobilité a servi l’insubmersibilité), Francis Mer (rejeté après avoir entrepris une modernisation du ministère), Nicolas Sarkozy (médiatico-météoritique) et Hervé Gaymard (abattu dans les circonstances que l’on connaît). Et maintenant voilà Thierry Breton qui entre en scène.

Bien sûr on se rassure – ou on s’inquiète encore davantage – en se disant que la technostructure reste en place et que, de ministre à ministre, l’Inspection des finances garde la maison et les commandes.

Mais c’est là aussi une illusion, car s’il y a encore des commandes à Bercy, elles n’agissent plus sur le réel : à l’heure de l’Europe et de la mondialisation, la direction du Trésor ne pèse plus sur grand-chose ; quant à la direction du Budget, une bonne partie des dépenses publiques lui échappe.

Sans même parler des puissants syndicats qui bloquent bien des réformes – et pas seulement à l’éducation nationale – la notion de « crédits évaluatifs » qui permet d’encadrer à priori la dépense publique a perdu son sens. Avec l’Etat providence d’un côté, la judiciarisation croissante de l’autre, chacun est désormais ordonnateur de la dépense publique : c’est le cas du chômeur qui choisit de renoncer à un emploi qu’il pourrait prendre pour conserver plus longtemps l’assurance chômage ; c’est le cas du malade qui multiplie les prestations médicales pas toujours justifiées ; c’est le cas de l’immigré clandestin dont l’entrée en France génère des droits sociaux et familiaux pour lui et ses enfants ; c’est le cas de l’étranger ou du Français d’origine étrangère qui regroupe en France des membres de sa famille ; mais c’est aussi le cas du juge qui multiplie les moyens d’investigations coûteux, les expertises nombreuses ou qui développe des jurisprudences mettant à la charge de l’État des dépenses nouvelles ; ajoutons que les lois nouvelles - voire les révisions constitutionnelles – posant des grands principes ne prévoient aucun financement alors qu’elles engendrent des dépenses importantes : c’est ainsi que l’inscription du « principe de précaution » dans la Constitution a été votée… sans être chiffrée ni financée.

Dans les faits, le ministère de l’économie et des finances n’est plus seulement un ministère sans bras, c’est aussi un ministère sans tête qui n’est plus en mesure d’assurer les grands équilibres économiques et budgétaires.

Ainsi, sur la route des Chapieux, au cœur des montagnes de Savoie, là où est son enracinement, Hervé Gaymard pourra méditer non seulement sur sa chute mais aussi sur la chute de l’État et de la démocratie qu’il avait choisi de servir.

Quant à ses amis politiques, s’ils veulent retrouver un jour un minimum de pouvoir, ils pourraient utilement réfléchir à la création d’un observatoire des dérives médiatiques.

© POLEMIA
3/03/2005

 
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