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Israël peut se targuer d'être l'Etat le plus raciste du monde développé
Extrait d'un article d'Hélène Sallon (Le Monde) |
Mondialisme
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"Il est 22 h 30, jeudi 16 août. Une cinquantaine de jeunes Israéliens squattent la place Hahatulot, une zone animée du centre-ville de Jérusalem-Ouest, la partie israélienne de la Ville sainte. Les commerçants alentours sont habitués à voir ceux qu'ils appellent les "chebab" prendre possession des lieux le week-end, raconte le quotidien israélien Maariv (en hébreu). "Chaque week-end, il y a ici une bagarre entre juifs et Arabes, dit un commerçant du quartier. C'est devenu une routine : ils viennent, crient 'mort aux Arabes' et cherchent des Arabes pour les frapper."
Le scénario est bien rodé. Ce soir-là, une jeune fille disant avoir été violée par des Arabes crie des plaisanteries racistes et appelle à traquer et à attaquer des Palestiniens. Les jeunes gens émêchés s'engagent alors dans les rues du centre-ville, scandant "un juif a une âme, un Arabe lui est un fils de p...", "Si t'es un homme viens cogner les Arabes" et "Mort aux Arabes".
A une centaine de mètres de là, place Sion, la horde en furie tombe sur quatre Palestiniens de Jérusalem-Est, le secteur annexé de la ville, à majorité palestinienne. Djamal Joulani, 17 ans, n'a pas le temps de fuir. Il est roué de coups de poing et de pied et laissé pour mort, victime d'un arrêt cardiaque. Des centaines de passants ont observé la scène sans intervenir, selon la police.
Batya Houri-Yafin, volontaire d'une association pour les jeunes à problèmes, y était. "Deux de nos volontaires se sont immiscés au milieu du groupe d'adolescents et ont essayé de faire [à la victime] un massage cardiaque. Le groupe d'adolescents nous a reproché de tenter de ressusciter un Arabe", déplore-t-elle sur sa page Facebook (en hébreu). Hospitalisé dans un état critique, Djamal Joulani n'est sorti de l'établissement qu'une semaine plus tard.
Neuf de ses assaillants présumés ont été arrêtés et mis en examen le 21 août pour agression et incitation au racisme et à la violence. Huit d'entre eux sont mineurs, le plus jeune est âgé de 13 ans, et deux sont des filles. Le principal accusé, un adolescent de 15 ans, qui a admis avoir frappé Djamal Joulani, n'a exprimé aucun remords. "Il peut mourir, qu'est ce que j'en ai à faire. Il a insulté ma mère", s'est-il défendu devant le juge, indique le Yedihot Aharonot. "Si je l'attrape, je le frapperai. Il doit mourir. C'est un Arabe", poursuit-il."
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"Quelques heures avant le lynchage de Djamal Joulani, un taxi collectif palestinien avait été la cible d'une bombe incendiaire près de la ville palestinienne de Bethléem, dans le sud de la Cisjordanie. Trois suspects de la colonie juive voisine de Bat Ayin, âgés de 12 et 13 ans, ont été arrêtés."
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"L'affaire met en lumière la radicalisation de la jeunesse. Quelques voix se sont élevées pour mettre ces incidents sur le compte de "mauvaises graines", à l'instar de l'éditorialiste de droite du quotidien Ma'ariv, Ben Dror Yemini. Les jeunes auteurs du lynchage ont en effet le profil idéal : ils sont issus de familles religieuses, de droite voire d'extrême droite. (...) Mais, assure le Pr. Salomon, il y a bien une radicalisation de la jeunesse dans son ensemble et une généralisation de la violence. "Un pourcentage croissant de jeunes pensent que les Arabes ne devraient pas avoir le droit de vote ou d'être élus à la Knesset", s'alarme-t-il."
"Pour de nombreux observateurs, le "lynchage de Jérusalem" est l'expression d'un mal qui ronge non seulement la jeunesse mais toute la société israélienne. "Israël peut se targuer d'être l'Etat le plus raciste du monde développé", a ainsi lancé avec sarcasme l'écrivain israélien Sami Michael. "Ne nous leurrons pas, la culture en Israël est déjà souillée depuis autant de temps que les courants extrêmes dans l'islam. Depuis le jardin d'enfants, nous transmettons à nos enfants un bagage de haine, de suspicion et de dégoût pour l'étranger, en particulier l'Arabe", a-t-il déclaré lors d'une conférence à l'université de Haïfa, relatée dans le journal Haaretz (en hébreu). Ainsi, renchérit le journaliste israélien Gal Uchovsky, ces jeunes gens ne sont finalement que "le rejeton du monstre : de la culture des colonies, de la haine des Palestiniens et de la haine juive en général".
"Le racisme a toujours existé, mais avant il n'était pas couplé à la violence ni considéré comme légitime. Aujourd'hui, racisme, violence et légitimité vont de pair et cela est un processus graduel qui n'est pas près de s'arrêter", alerte le Pr Gavriel Salomon. "Le fait d'avoir légitimé le recours à la violence en Cisjordanie induit que cette violence s'étende graduellement de l'autre côté de la ligne verte, explique-t-il. C'est désormais devenu légitime d'attaquer des migrants africains, de faire de la discrimination à l'encontre des étudiants éthiopiens, d'attaquer des Arabes dans la rue", dit-il."
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