A Gaza Israël a goûté à un 100eme de ce qui l'attend en cas d'agression contre l'Iran et Hezbollah
Youssef Boussoumah
Étranger
« Bibi looser » écrits avec leur corps, telle est la photo postée sur twitter par un groupe de soldats israéliens qui rêvaient d’en découdre avec Hamas.
La phase militaire de l’opération « colonne de nuées » rebaptis...ée « pilier de défense » pour les besoins de la propagande s’achève, commence la phase diplomatique. A t- elle été un succès pour Israël ? Rien n’est moins sûr. L’opinion israélienne surtout celle du sud de l’entité sioniste qui a le sentiment d’avoir une fois de plus été lâchée par les dirigeants de Tel Aviv est très amère.
Certes Israël est loin d’avoir été vaincu mais Israël n’a pas gagné la guerre. Or dans les conflits coloniaux ; nous le savons, c’est l’incapacité des puissances dominantes à écraser la lutte des colonisés et a leur imposer leur volonté qui sonne le glas de leur domination et qui fait dire qu'elles ont perdu.
Au dernier moment Netanyahou s’est défilé, il a reculé devant la perspective des pertes israéliennes envisagées , c’est indiscutable mais aussi devant les pressions internationales pour qui cette invasion allait bouleverser la donne régionale en affaiblissant le pouvoir égyptien et en renforçant l’Iran.
Netanyahou avait déclaré s’engager dans une campagne de 7 semaines, elle n’a duré que 8 jours. Ses buts de guerre étaient d’une part de faire cesser les tirs sur le sud et d’autre part de rétablir la capacité de dissuasion d’Israël. Si le 1er objectif a été momentanément obtenu mais seulement par la négociation, le second a failli complètement. 2 millions d'Israéliens terrés dans les abris de façon intermittente ou constante. Une vie économique au ralenti pendant 8 jours.
1500 missiles reçus, 200 environ ayant touché le sol. Toutes les principales villes du centre et du sud d'Israël , y compris Tel Aviv, Jérusalem, Ashkelon, Beersheba, sous le feu des batteries de missiles palestiniennes pendant 8 jours. Le Jihad a tiré 600 des 1500 missiles. 12 missiles longue portée ont été tiré, 6 d’entre eux sont de fabrication palestinienne. Certes Dôme d'acier a fonctionné à plein régime mais soyons certains que les artilleurs palestiniens vont tirer de nombreux enseignements de cet échange.
Notamment l'évident manque de réactivité de dôme d'acier face à des tirs de missiles "en grappe" a été noté. Sans compter le fait que ces batteries anti missiles ne sont pas suffisamment nombreuses pour protéger les nombreux kibboutzim, mochavim et colonies isolées. 400 millions d’euros de manque à gagner seulement pour les industries du sud pour une facture globale d’au moins 2 milliards d’euros.
De toute évidence les Palestiniens sont sortis renforcés. Ils ont pu frapper la capitale d’Israël Tel Aviv mais aussi Jérusalem sans subir de rétorsion majeure Des négociations consacrent internationalement Hamas au lieu de l'isoler comme le souhaitait Israël.
Certes les pertes palestiniennes sont très importantes, 150 tués dont au moins 60 civils mais pas autant que d'accoutumée pour ce genre d'affrontement puisque pour la 1ere fois, l'agression ne se termine pas comme Israël en a l'habitude par un massacre chargé de tétaniser les Palestiniens et de leur rappeler qui a le dernier mot, qui est le maître de la région. Certes les destructions d’immeubles et d’administrations sont considérables mais il y a seulement 5 ans, pour 10 fois moins que ça, Israël aurait mené une campagne de plusieurs semaines se soldant par plus de 1500 morts.
Un Occident malgré tout pas aussi soudé que ça autour d'Israël en dépit des apparences a donné de la voix dans un sens de modération. Même le Royaume Uni s’est senti obligé de prévenir Israël qu'il ne soutiendrait pas une offensive terrestre. Jusqu'aux États Unis qui en dépit de l’AIPAC comme d’habitude à la remorque des chefs militaires israéliens, ont exercé des pressions énormes sur Netanyahou pour l’empêcher de lancer son opération terrestre. De crainte que cela ne bouleverse toute la donne régionale puisque les forces iraniennes avaient rehaussé leur état d'alerte pour parer à toute attaque surprise israélienne.
Au plan israélien, le dépit est grand. Il se pourrait bien que cela coûte sa réélection à Netanyahou. En effet de très nombreux Israéliens lui reprochent cette "victoire mutilée" comme en 2006 face au Hezbollah qui, on s'en souvient, avait coûté à Ehoud Olmert sa réélection. En effet les habitants du sud, parmi eux les maires et même des élus du Likoud reprochent à Netanyahou son indécision militaire et de ne pas avoir poussé l'avantage. En dépit des menaces de "ramener Gaza à l'âge préhistorique" proféré par l'un des chefs militaires, Israël a failli.
Son pouvoir dissuasion en a pris un sacré coup puisque l'objectif de faire cesser les tirs palestiniens n'a pas été atteint. Les tirs non seulement n'ont pas cessé une seule heure mais se sont poursuivis même après l'annonce du cessez le feu. De plus il est prévu qu'une négociation devra avoir lieu pour alléger de façon permanente le blocus, pour que cesse les éliminations "ciblées" de responsables palestiniens dans le cadre d’une trêve supervisée par l'Egypte. Ce qui évidemment est une première puisqu'Israël n'a pas obtenu la présence d'une force internationale sur le couloir de Philadelphie, c'est à dire sur la frontière. Il est clair que les bouleversements politiques survenus en Egypte se font ici à l'avantage de la partie palestinienne.
Certains diront qu'en consacrant l'Egypte cet accord marginalise l'Iran et son relais le Jihad islamique. Pas sûr car les missiles tirés qui en dépit des faibles pertes israéliennes ont jeté la consternation dans des villes réputées invulnérables comme la capitale Tel Aviv, ou Jérusalem sont bel et bien iraniens ou fabriqués "sous licence" iranienne et syriens. Cela veut dire que le renforcement stratégique est avant tout dû à l’Iran et on voit mal l’Egypte remplacer l’Iran dans ce rôle. Or le Hamas peut difficilement se passer de cette aide qui lui assure un petit pouvoir de dissuasion.
De plus la force de frappe du Jihad beaucoup plus clandestine que les brigades al Qassam de Hamas a subi relativement moins de pertes. Enfin la fraternité d'armes entre les brigades al Qassam et le Jihad ne s'est pas démentie voire s’est renforcée et il est peu probable que le remplaçant du martyr Jabari à la tête des forces armée de Hamas ne modifie cette relation en dépit du tropisme pro-qatari de Khaled Mechaal.
Il est vrai que les foules égyptiennes ne se sont pas ruées pour obtenir un soutien accru en faveur de Gaza de la part du gouvernement égyptien. Toute la question est de savoir comment dans l’avenir l’Egypte va gérer ses relations avec Gaza et avec Israël puisqu’elle a été intronisée parrain de Gaza et garante de la trêve, c’est à dire de la sécurité d’Israël. L’Egypte va-t-elle enfin réussir à se dégager de la main mise étasunienne ? Là est la vraie question. Car dans l’ensemble Morsi s’est comporté à peu de choses près comme se serait comporté Moubarak.
De toute évidence la guerre de 8 jours constitue un revers pour Israël de plus c'est la seconde véritable guerre palestino-sioniste depuis 1948 avec plomb durci en 2009 car les Palestiniens combattaient seuls. Le prochain round nous le savons n’est qu’une question de temps. Désormais toute l’attention en termes techniques pour les ingénieurs de Hamas mais surtout iraniens sera portée sur la manière de contourner Dôme de fer.
Mais surtout à Gaza Israël a goûté à un 1000eme de ce qui l'attend en cas d'agression contre l'Iran et Hezbollah.