Le déficit sera encore très élevé et le redressement structurel minime en dépit des 21 milliards d’économies. Le taux de prélèvements obligatoires ne baissera que de 0,1 point de PIB, les dépenses publiques de 0,4 point.

La compétitivité avant la réduction du déficit. Pour François Hollande, le projet de loi de finances pour 2015, présenté ce matin en Conseil des ministres, assume un choix sans équivoque. « Ce serait une faute de réduire à marche forcée nos déficits dans ce contexte de faible croissance et de faible inflation », a argué le chef de l’Etat lors de sa récente conférence de presse . Oublié, l’objectif d’un déficit à 3 %. Celui-ci est repoussé en... 2017. Pour la troisième fois, la France va demander un nouveau délai à Bruxelles pour revenir dans les clous.
Les discussions promettent d’être ardues. L’opération-vérité déjà menée par Bercy a surpris par son ampleur : loin de se réduire, le déficit public va grimper cette année (de 4,1 % à 4,4 % de PIB). Il refluerait très légèrement en 2015 (4,3 %), grâce à une reprise de la croissance qui tarde à se matérialiser . Comment cela va-t-il se traduire ? Le déficit de la Sécurité sociale ne baissera pas cette année, et peu en 2015, a déjà annoncé l’exécutif. Et du côté de l’Etat, le déficit budgétaire devrait, selon nos informations, se situer à 75,7 milliards l’an prochain , après un bond à 87 milliards attendu cette année, lié en partie au programme d’investissements d’avenir.
Autre problème, la France ne va pas tenir non plus ses objectifs de déficit structurel (hors effets de la conjoncture), un indicateur très regardé par la Commission. Après 2,5 % de PIB en 2013, le déficit structurel sera encore de 2,4 % cette année et de 2,2 % l’an prochain, tandis que l’équilibre n’est plus visé avant 2019. Le Haut Conseil des finances publiques, qui rend un avis très attendu aujourd’hui sur le budget, risque de ne pas apprécier... Dans ce contexte, Paris va devoir faire de gros efforts pour obtenir la mansuétude de ses partenaires européens. Depuis cet été, il met en avant les « circonstances exceptionnelles » liées à l’atonie de la croissance dans la zone euro et à la très faible inflation. « Le danger, c’est l’enlisement des économies européennes dans la stagnation. C’est-à-dire un scénario de fin de croissance », n’a pas hésité à dramatiser François Hollande.
La crédibilité en jeu
Face à cela, il faut du sérieux budgétaire mais pas d’austérité, plaide-t-on à Paris. « Nous avons fait un choix clair : ni hausse d’impôts ni économies budgétaires supplémentaires. C’est un choix politique », a expliqué le Premier ministre, Manuel Valls, dans son discours de politique générale. Son cap : mettre en œuvre l’intégralité du pacte de responsabilité. Après les baisses de charges pour les entreprises votées, non sans mal, cet été par la majorité, le projet de budget comporte plusieurs mesures fiscales pour les ménages, dont la suppression de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. Une mesure à 3,3 milliards d’euros censée répondre au ras-le-bol fiscal des Français, à la sanction des urnes et à la fronde d’une partie de la majorité. Mais pas sûr que le gouvernement réussisse à convaincre : le taux de prélèvements obligatoires va rester stable cette année, à 44,7 % de PIB, et à peine baisser l’an prochain (44,6 %), car d’autres hausses étaient programmées : cotisations retraite, taxe carbone, contribution au service public de l’électricité, etc.