Alain Madelin, de l'extrême droite française aux think thanks états-uniens
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12/05/03 |
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Réseau Voltaire |
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Après une jeunesse mouvementée à l'extrême droite, Alain Madelin est recruté par l'Institut d'histoire sociale, une officine anticommuniste mise en place par les services états-uniens autour d'anciens dirigeants collaborationnistes. Il y participe à la diffusion en France des idées libérales de l'École de Chicago, puis essaie d'appliquer dans la vie politique française les méthode états-unienne, en s'entourant notamment d'un think tan de grands patrons. En 1996, il participe à la création de la New Atlantic Initiative, qui rassemble le gratin du Pentagone et du Département d'État. Il préside l'International Center for Research on Environnemental Issue.
Alain Madelin est né le 26 mars 1946 à Paris. Il est cousin du père Henri Madelin, ancien provincial des jésuites et actuel aumônier national du Mouvement des cadres et dirigeants chrétiens.
À dix-huit ans, en 1964, Alain Madelin fonde le mouvement Occident avec ses camarades Alain Robert, Gérard Longuet, François Duprat, Xavier Raufer et Nicolas Tandler.
Après l'échec de la candidature Tixier-Vignancourt et le départ de Pierre Sidos, fin 1966, Alain Madelin, qui a été remarqué par Georges Albertini, est engagé à l'Institut d'histoire sociale (IHS), une officine anticommuniste mise en place par les services américains autour d'anciens dirigeants collaborationnistes. Tout en y travaillant, il finit ses études de droit et devient avocat au barreau de Paris. À l'IHS, Georges Albertini s'efforce de " blanchir " le jeune militant d'extrême droite, de lui donner une solide formation anticommuniste, et de lui ouvrir les portes des organisations politiques respectables. Bientôt, ce brillant élève devient l'un des six professeurs permanents de l'IST, l'appendice de l'IHS agréé organisme de formation continue par le ministère de l'Éducation nationale. Dans le cadre du 1 % patronal, Alain Madelin y forme les cadres de grandes entreprises à mener bataille contre les syndicats. Il dirige aussi l'un des nombreux bulletins édités en marge de l'IHS, Informations politiques et sociales. Simultanément, il rejoint les Républicains indépendants (FNRI) et se présente aux élections législatives de 1973 dans les Hauts-de-Seine. En 1974, avec Hubert Bassot, il met en place le service d'ordre de la campagne présidentielle de Valéry Giscard d'Estaing, en recrutant leurs anciens camarades d'Occident, passés entre-temps à Ordre nouveau. Toujours pendant cette campagne, Alain Madelin et les permanents de l'IHS produisent un bulletin anti-Mitterrand, Spécial Banlieue, au titre d'une société, SA Média-Production, dont les principaux actionnaires sont Catherine Barnay et Patricia Sallustri, épouse d'Alain Madelin. En 1977, il devient membre du secrétariat national des Républicains indépendants et chargé de mission au cabinet de Claude Coulais, secrétaire d'État à l'Industrie. En 1978, il est élu député (UDF-PR) d'Ille-et-Vilaine et devient délégué national du Parti républicain (ex-FNRI) chargé de la formation, fonction qu'il remplit dans le cadre de ses activités à l'IHS. Pendant la législature, il préside à l'Assemblée les groupes d'études sur l'informatique et sur les problèmes de la faim dans le monde. En 1981, il participe à l'équipe de campagne présidentielle de Valéry Giscard d'Estaing. Réélu député, il devient délégué national du PR, chargé de la communication.
Il semble qu'il cesse ses fonctions à l'IHS, mais pas ses contacts, lorsque celui-ci est réorganisé, en 1983, à la mort de Georges Albertini. Il se consacre alors essentiellement au PR, dont il devient délégué général, en 1985. En 1986, il est élu conseiller régional de Bretagne et nommé ministre de l'Industrie des P&T et du Tourisme dans le gouvernement Chirac. Il s'entoure alors d'un think tank de grands patrons, le Grenelle Consulting Group. Ce noyau donne naissance à l'Institut Euro 92 d'Henri Lepage, dont il est président. C'est à cette époque que, fidèle à ses contacts américains, il devient membre de la très fermée Société du Mont Pèlerin, le club international des économistes libertariens.
En 1988, il est réélu député d'Ille-et-Vilaine et devient secrétaire général du PR. En 1989, il dirige la campagne de la liste UDF aux élections au Parlement européen, dont la tête de liste est Valéry Giscard d'Estaing. Élu lui-même au Parlement européen, il abandonne ce mandat, préférant siéger à l'Assemblée nationale. Simultanément, il devient, en 1992 membre du bureau politique de l'UDF et vice-président du Conseil régional de Bretagne.
En 1993, il est nommé ministre des Entreprises et du Développement économique dans le gouvernement Balladur. C'est à cette époque qu'il crée le mouvement Idées-Action, s'assurant ainsi une autonomie au sein du PR dont il devient le premier vice-président.
En 1995, il s'engage dans la campagne présidentielle de Jacques Chirac pour qui il rédige un programme stigmatisant la fracture sociale et assurant qu'elle peut être résolue par une politique ultra-libérale. Après la victoire de Jacques Chirac, il est nommé ministre de l'Économie et des Finances du 1er gouvernement Juppé. Il en est débarqué, trois mois plus tard, après qu'Alain Juppé eut pris connaissance de la littérature interne de son cabinet. Celui-ci, composé de quarante-neuf membres (quatorze officiels et trente-cinq officieux), préparait en secret une série de décrets en vue de la " révolution libérale " qui devait intervenir dans une situation de crise majeure qu'Alain Madelin appelait de ses vœux.
En 1996, il se rapproche des lobbies religieux et introduit des références aux valeurs chrétiennes dans ses discours publics. À la même époque, il participe à la création de la New Atlantic Initiative, une émanation de l'American Entreprise Institute chargée de promouvoir l'extension de l'Otan et l'établissement d'une zone de libre-échange américano-européenne. En 1997, il participe à diverses tentatives de constitution d'un pôle " national, libéral et moral " avec le CNI d'Olivier d'Ormesson, le MPF de Philippe de Villiers, Demain la France de Charles Pasqua, et même le MDC de Jean-Pierre Chevènement. En définitive, aux élections législatives seuls le CNI et le MPF firent accord. Au lendemain de la consultation, Alain Madelin aida François Léotard à arracher la présidence de l'UDF à Valéry Giscard d'Estaing à la condition de lui laisser la présidence du PR qu'il rebaptisa en Démocratie libérale. Ce jeu de chaises musicales rencontra la vaine opposition de Gilles de Robien.
Par ailleurs, Alain Madelin est toujours avocat à la Cour de Paris, associé au cabinet Peisse-Dupichot-Zirah. Il s'y est spécialisé dans le droit de la concurrence, le droit de l'environnement et les arbitrages internationaux, notamment concernant les pays de l'Est. C'est dans ce cadre professionnel qu'il préside l'International Center for Research on Environnemental Issue.
© http://www.reseauvoltaire.net/article9514.html (19 avr. 2003 ).
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