Allemagne : la parole se libère
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29/12/03 |
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8.50 t.u. |
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Albert Jacquemin |
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Le 3 octobre dernier, le député de la CDU/CSU Martin Hohmann déclarait à propos du qualificatif de « peuple coupable » donné depuis 1945 à l'ensemble des allemands : « Je pose la question provocante suivante : ce pourrait-il que le peuple juif, que nous considérons exclusivement dans le rôle de la victime, ait aussi eu un côté sombre dans l'histoire moderne ou bien les Juifs étaient-ils exclusivement des victimes, des boucs émissaires ? (...) Un chapitre particulier des plus tragiques fut l'écrasement total de la résistance au collectivisme forcé en Ukraine. Du fait de tchékistes en immense majorité juifs, plus de dix millions de personnes trouvèrent la mort. (...) Les juifs étaient actifs en grand nombre non seulement au sein de la direction de la Tcheka, mais également de ses pelotons d'exécution. On pourrait alors à juste titre qualifier les juifs de « peuple coupable ». (...) Cela suivrait la même logique qui fait que l'on qualifie les Allemands de « peuple coupable ». (...) Nous devons vraiment considérer cela de plus près. Les Juifs qui ont joué un rôle décisif dans le bolchevisme et la révolution avaient auparavant rejeté leurs attaches religieuses. Ils étaient d'origine et d'éducation juive, mais de par leur vision du monde avaient avant tout une haine brûlante de toute religion. Il en va de même des nationaux-socialistes. (...) L'élément qui reliait le bolchevisme et le national-socialisme était également leur orientation antireligieuse et leur athéisme. C'est pourquoi ni « les Allemands », ni « les juifs » ne sont un « peuple coupable ». »
Le scandale qui suivit ces déclarations de bon sens fut immense et les médias allemands - et européens - crièrent immédiatement à l’antisémitisme, au néo-nazisme et au péril brun !
C'est alors qu'un général allemand - et pas n'importe lequel puisqu'il s'agissait de Reinhard Guenzel, chef des Kommandos Spezialkräfte, unité d'élite de la Bundeswehr - mit un peu plus d'huile sur le feu. Il déclara publiquement que la conférence de Martin Hohmann constituait « une excellente allocution comme on en a rarement encore lu ou entendu dans notre pays pour ce qui est du courage de dire la vérité avec clarté. » La sanction ne se fit pas attendre : mise à la retraite d'office par le ministre de la Défense Peter Struck, qui le qualifia de « général isolé en plein délire ».
Quand à Martin Hohmann, il fut exclu de son groupe parlementaire par ses pairs lors d’un vote au cour duquel 20 % de l'ensemble des députés de la CDU-CSU refusèrent de le sanctionner. 20 % cela fait beaucoup sur un sujet aussi « sensible », surtout en Allemagne !
Qu’on ne s’illusionne pas cependant, ni la CDU-CSU, ni la Bundeswehr ne sont en train de tomber aux mains de nostalgiques du Troisième Reich, loin s'en faut. Pas plus que Hohmann et Guenzel ne sont des antisémites. Mais de plus en plus d’Allemands refusent la haine d’eux même qu’on leur impose depuis soixante ans. Et ils ont raison !
Albert Jacquemin
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