12/03/03 15.36 t.u. Philippe Randa

Jupiter rend fous ceux qu¹il veut perdre ! À n¹en point douter, c¹est l¹arrogance qui va perdre, au moins dans la conscience populaire, les dirigeants du quotidien Le Monde. Bien davantage que le récent livre de leurs détracteurs.


Une statue de la moralité en presse sérieusement ébranlée

On ne parle pas que de ça ­ nouvelle guerre imminente d¹Irak oblige - mais quand on parle dans le petit monde suffisant de la presse franco-française, c¹est souvent de ça. La Face cachée du Monde, le livre de Pierre Péan et de Philippe Cohen(1) va en effet atteindre, en quelques semaines d¹exploitation, les 300 000 ventes : ce n¹est pas rien !
Il fallait un courage certain pour s¹attaquer ainsi à ce qui est devenu en une trentaine d¹années la plus exécrable des institutions politico-morales de notre pays. Et tirer dessus à boulets rouges.
La direction-cerbère du quotidien vespéral(2) s¹indigne des procédés utilisés - la calomnie et le mensonge - et Jean-Marie Colombani les qualifie de ³procédés utilisés durant les heures les plus sombres de notre histoire².(3) Cette formule est brandie chaque fois que l¹on manque d¹arguments, bien que son efficacité soit désormais de
moins en moins probante, tellement elle est usée.
Il en faut plus pour démonter Péan et Cohen qui attendent avec sérénité, semble-t-il, les procès en cascade que leurs annoncent les trois dirigeants mis en cause. De toute façon, quel que soit l¹issue des éventuels procès ­ s¹ils ont réellement lieu ! ­ la moralitée du Monde est sérieusement ébranlée. Il n¹était que temps.
Ceux qu¹intéressent les détails savoureux des ³lièvres² soulevés par Péan et Cohen dans la gestion financière et le traitement de l¹information de ce quotidien se procureront aisément leur livre dans toutes les bonnes librairies. Intéressons-nous seulement à la défense des dirigeants du Monde. Elle est pitoyable ! Tout d¹abord, aucun d¹eux n¹accepte de débattre avec leurs détracteurs. Beau courage ! Il est certes plus facile de parler de ³calomnies et de mensonges² sans avoir à en apporter la preuve.
Mais le plus effarant est l¹accusation de Jean-Marie Colombani à l¹encontre du livre : son véritable objectif serait de ³donner un coup d¹arrêt au pouvoir des journalistes² car ³investiguer sur l¹investigateur, c¹est arrêter l¹investigation² !
Si l¹objectif de monsieur Colombani était, lui, de stupéfier son auditoire, il a réussi ! Mais à la manière de celui qui avoue ses crimes parce qu¹il en est fier et craint subitement qu¹on ne mesure pas suffisamment toute l¹ampleur de son talent en la matière.
En l¹occurrence, plus que de talent, c¹est de morgue qu¹il s¹agit. Ainsi, il existe des ³pouvoirs², dont celui de la Presse, qui seraient au-dessus de toute critique et dont les représentants autoproclamés exigent une impunité de droit quasi-divin. Comme le premier voleur élu Président de la République venu. Dont acte.
La publication de La face cachée du Monde donne un avant-goût de ce que certains journalistes professionnels auront à affronter au jour du jugement dernier. Nul doute, grâce aux aveux d¹un Jean-Marie Colombani, que la plupart ne finisse en enfer. S¹il y a une justice ici-bas, gageons qu¹il y en ait une bien meilleure encore plus bas !


Notes

(1) La Face cachée du Monde, du contre-pouvoir aux abus de pouvoir, Pierre Péan et Philippe Cohen, Fayard.
(2) Jean-Marie Colombani, président du directoire, Edwy Plenel, directeur des rédactions et Alain Minc, président du conseil de surveillance.
(3) ³L¹époque, sinistre, où Blum était un homme à fusiller dans le dos², d¹après le président du directoire du Monde.

Philippe Randa
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