Elections européennes : la voix des peuples face au diktat des marchés
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26/08/04 |
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3.59 t.u. |
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Rodolphe Lussac |
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Le record d’absentéisme et la déroute des partis politiques institutionnels européens aux dernières élections européennes confirment bien la désaffection et le rejet des peuples d'une "non-Europe", dont on ne connaît ni la forme ni l'architecture ni le périmètre. En effet, l'élection a eu lieu avant l'éventuelle adoption d'une pseudo constitution concoctée en catimini dans les sinécures technocratiques, sans que ce projet soit soumis à l'approbation du parlement et à la consultation de l'opinion publique européenne.
Dans ce contexte et face à la duperie bruxelloise, l'abstention fait figure de sanction puisque le corps électoral n'a pas su pourquoi l'on votait. La dépolitisation croissante de l'opinion publique face à la question européenne révèlerait le règne d'une fatalité, d'une politique technocratique sans espace ni projet, dont les citoyens ne sont plus partie prenante. Le clivage droite/gauche, parti socialiste européen et parti populaire européen, relève, comme dirait Régis Debray, de la même hémiplégie mentale, puisque les mêmes élites ploutocratiques et apatrides nous gouvernent et se compénètrent au niveau national comme au niveau européen. Ces mêmes élites s'acharnent à broyer l'identité séculaire des peuples européens et à imposer une seule politique possible, celle du diktat des marchés, qui l'emporte toujours sur le message des urnes, au-delà du verbiage mercantile et fédéraliste européiste et les gesticulations des positions souverainistes, ringardes et étriquées, car l'une et l'autre position se rejoignent sur la vision économiciste néolibérale (pardon socialodémocrate) d'une Europe atlantiste, démocratique, égalitaire et soi-disant sociale. Une chose est sûre , même s'il s'avère que la coalition anglo-saxonne a peut être échoué en Irak, il n'en demeure pas moins qu'elle réussit à saborder l’idée européenne, via ses sbires dociles, philo-atlantistes de droite comme de gauche, stationnés dans les capitales européennes.
Pendant que Georges Bush parade en vainqueur sans vergogne sur les plages du débarquement, où, il y a une soixantaine d'années, l'Europe a été bel et bien occupée et honteusement partagée à Yalta, les européistes de tous bords trahissent en amont l'idée grande européenne en tentant de faire entrer la Turquie dans l'Union. En effet, même si les européistes de droite comme de gauche n'ont pas de vision géopolitique européenne, commune et cohérente, une chose et sûre, c'est que l'Europe qu'ils construisent à l'antipode des grands rêves des Etats-Unis d'Europe, constitue en fait l'anti-Europe, simple déclinaison du grand marché néolibéral, placé sous hégémonie américano-atlantiste, semblable à l'ALENA. Pour que l'Europe ne se fasse pas, il faut d'abord qu'elle ne soit plus, et c'est pourquoi la centrale synarchique bruxelloise s'attache à affaiblir, par une action subversive concertée et de l'intérieur , le sol et les peuples européens, en distillant une "soft ideology" cosmopolite, permissive, pernicieuse (dont l'exemple type est la légalisation progressive de l'homo-parentalité, le mariage gay, qui est une attaque directe et ciblée au signifiant de la tradition de la famille européenne). D'autre part, la même centrale cherche à imposer l'entrée de la Turquie et l'élargissement des frontières de l'Europe qui, peut-être demain, aura une frontière commune avec l’Irak, bordée par la Mer Caspienne et ouverte sur le Sahara. La gauche caviar européenne a même proposé ouvertement, dans une émission télévisée, que l'Europe s'étende de l'Arctique au Maghreb saharien!
Au de la du débat stérile et de la bipolarisation artificielle entre fédéralisme et souverainisme, la véritable Europe, l'Europe des peuples, des nations, l'Europe puissance et impériale, ne se fera pas sans la voix et la mobilisation générale des peuples européens autour d'un vision politique, historique, culturelle et géopolitique commune, et c'est pourquoi l'on peut se féliciter de la percée aux dernières élections des partis européens populistes qui font entendre la voix des peuples. Face à la démission des élites ploutocratiques et corrompues, nationales et bruxelloises, l'Europe se fera au prix d'un forceps révolutionnaire et novateur, d'un recentrage autoritaire préalable des régimes politiques des Etats européens qui devront faire le grand coup de balai nécessaire au salut des nations européennes et au prix de la construction, autour de nations "piémontaises", d'un vaste bloc géopolitique grand continental eurasiatique, autocentré et déconnecté du grand marché mondial libre-échangiste et atlantiste.
Pour ce faire, ce n'est pas l'adoption, dans l'apathie généralisée, d'une pseudo-constitution, avec peut-être de timides références chrétiennes, qui sauvera l'Europe, mais une vaste mobilisation nationale et révolutionnaire à l'échelon national et européen, dont les mots d'ordre seront boulangistes: dissolution, constituante, révision.
Dissolution: dissolution des parlements corrompus , des lobbies subversifs, des institutions relevant de la ploutocratie politico-financière, dissolution des secteurs économico-financiers parasitaires et non productifs, rétribution du travail sous la forme de travail direct /salaire direct;
Constituante: (l'histoire a démontré que de grands bouleversements historiques révolutionnaires ont précédé et donné naissance aux constitutions, 1792, 1848, 1851, etc…), restauration de la primauté du politique, retour à la tradition démocratique référendaire et plébiscitaire, dissolution du système représentatif, réhabilitation constitutionnelle du principe hobbesien du légitime recours à la force, recours à la pratique politique décisionniste schmitienne, révocation des élites politico-affairistes dominantes, bourgeoieses et apatrides, restitution du pouvoir au peuple et par le peuple, circulation des élites par le critère méritocratique, abrogation des successifs traités de Maastricht, de Nice et de tous les textes "communautaires", contraires à l'intérêt des peuples européens;
Revision: révision de tous les traités internationaux non conforme aux intérêts géopolitiques et culturels européens, révision des contrats et franchises commerciales internationales et expropriation des sociétés multinationales, redistribution égalitaire des richesses et du produit national, retrait de toutes les troupes militaires atlantistes du sol européen, passation d'un pacte révolutionnaire politique et militaire de salut public entre nations européennes souveraines, retrait de toutes les instances militaro-politiques atlantistes.
Si l'histoire a montré que l'idée grande européenne a culminé dans des périodes troubles, en réaction à un péril extérieur (Sainte-Alliance), l'Europe de demain se doit non seulement d'être simplement réactive face à l'hégémonisme anglo-saxon mais aussi matricielle, c'est-à-dire porteuse d'un message, d’une vision du monde impériale et d'un destin historique et géopolitique commun et original, aux antipodes des colporteurs actuels d'une Europe des boutiquiers, des multinationales et des consortiums bancaires.
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