À vot'bon coeur, M'sieur-dame !
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16/12/02 |
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19.11 t.u. |
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Philippe Randa |
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Savez-vous quel est le terme le plus désuet de notre société ? Assurément celui de responsabilité. Tout nous engage à fuir la nôtre dans quelques domaines que ce soit. Et l'exemple vient de haut, de très haut même, puisque c'est l'État qui bien souvent, trop souvent, donne le tempo.
Par exemple, la santé publique est de son ressort, n'est-ce pas ? Dans ce cas, demandez donc à ceux qui font des recherches sur les grandes maladies l'aide que ce dernier leur apporte.
Ah, s'il n'y avait pas les grandes manifestations populaires, type celle du "Téléthon", les recherches n'iraient pas très loin. C'est vrai, mais est-ce normal ?
Je ne reviendrais pas sur le spectacle trop souvent indigne que nous inflige telle vedette du show-biz ou telle autre personnalité du Gotha, Béatrice Péreire l'a très bien rappelé cette semaine : "On se demande ce qu'elles viennent soigner, ces stars et ces vedettes : un enfant malade ou une carrière en panne ? On se dit aussi que du temps de Lino Ventura, la charité se faisait plus discrète. Son association Perce-neige, il ne la criait pas sur les toits, lui au moins. Depuis, trop de faux altruisme a lentement tué l'altruisme véritable. Celui qui se pratique de la main droite sans que la gauche n'en sache rien. Trop de fêtes des potes, trop de Live aid, trop de machins pour l'Éthiopie ou contre la faim dans le monde. À moins que ce ne soit le contraire ; avec le temps, on finit par oublier. Bref, trop de fêtes pour ceci ou pour cela. Trop de musique plus ou moins bonne pour des causes plus ou moins mauvaises.
Certes, les dons faits aux grandes causes de la santé - pour lutter contre le cancer, le sida ou la myopathie - sont déductibles de nos impôts. C'est toujours ça. Mais c'est aussi alors un impôt supplémentaire sur une déclaration annuelle où la liste est déjà longue.
L'idéal ne serait-il pas de nous laisser libre de choisir à qui devraient échoir nos impôts ? La liste des possibilités ne pourrait être complètement livrées au bon vouloir de tout à chacun, mais nous pourrions tout de même être libre de choisir telle orientation ou telle destination plutôt que telle autre pour l'argent qu'on exige des bénéfices de notre labeur.
Bien plus sûr que n'importe quel sondage d'opinion plus ou moins manipulé, on s'apercevrait alors des véritables tendances humanitaires de nos compatriotes.
Pour ma part, si j'étais certain que tant de % de mes impôts, parce que je le déciderai, servent directement par exemple à la recherche contre la maladie, à l'amélioration des conditions de fin de vie des personnes âgées ou bien encore, pourquoi pas, à construire ou à organiser des usines dans tel ou tel pays du tiers-monde afin de permettre aux autochtones de vivre chez eux et non de fuir leur pays ingrat pour coloniser le mien, je me dis que "la douloureuse" serait moins pénible.
Étrangement, voilà une proposition de loi qu'aucun parlementaire n'a jamais songé à présenter.
Certes, donner un droit de regard au citoyen sur l'utilisation de l'argent que l'État lui rackette, est une parfaite utopie, j'en ai conscience. On préfère qu'il crache deux fois plutôt qu'une au bassinet et on organise pour cela des shows télévisés avec pom-pom girls et vedettes au QI souvent proche de celui de l'huître.
Dans l'Antiquité romaine, on distribuait du pain et on organisait des jeux pour occuper le peuple et le faire se tenir tranquille. Aujourd'hui, on octroie le RMI et on organise des Téléthons pour faire pleurer Margot.
La différence est qu'on ne fait plus s'entretuer de gladiateurs, on exhibe des petits malheureux en fauteuils roulants. Autres temps, autres moeurs. Mais le peuple du XXIe siècle, la larme à l'oeil devant son téléviseur, gavé de bonne conscience et de mauvais sodas, se tient tout aussi tranquille.
Note
(1) "Les questions que pose le Téléthon", National Hebdo n°960, 12-18 décembre 2002.
Philippe Randa
Directeur du site www.Dualpha.com
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