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Jeudi, 20 Novembre 2008
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Les années de carton
Thomas Tribout
Éditorial
Les années de carton
Le cas Frédéric Rabiller, nous l’avions ici (1) visé : Fred l’artificier était devenu Frédé l’amputé. Le flacon maison de son ivresse anti-radar avait emporté une main, trois doigts et son anonymat. Sur la civière des pompiers, le petit postier avait tout avoué. Après avoir réclamer le départ des immigrés, il déclarait, depuis son lit d’hôpital, sa flamme (2) à Olivier Besancenot, autant dire un amour de collègues. On était passé en quelques semaines du fil brun au fil rouge, c’est que le premier, bien usé déjà par l’affaire Brunerie (un nom pré-destiné), ne pouvait plus soutenir grand-chose… C’est que l’époque a changé : le mirage « Le Pen » de 2002 est bien dissipé, c’est aujourd’hui le Nouveau Parti Anticapitaliste du jeune Olivier qui commence à inquiéter…

Diversion réussie ou coup manqué ?

Il faut donc s’assurer que personne ne chevauche la crise et ne tire les marrons du feu financier. On cherche, on débusque et si besoin on crée la casserole puis on la martèle pour en tirer un bruit utile… La première, de marque Rouillan, a donné un joli son clair, mais court. Aussitôt embastillé, sa conditionnelle aux oubliettes, le vénérable d’Action Directe a cher payé le fait de ne pas cracher sur son passé, ce que le JDD appelle : «laiss[er] entendre (sic) ne pas regretter ses crimes » . Parallèlement, Christophe Focari de « Libé » avait débusqué, dans le sillage de Marine Le Pen, un ancien crieur de « nazi rock », cogneur au crâne rasé. Mais il s’agit là de petite vaisselle, l’état du FN ne nécessitant plus la grosse batterie.

Avec le « comité invisible » et l’attaque des caténaires de la SNCF, on passe de l’ancien activiste non repenti aux « terroristes » en devenir. Renseignement du FBI*3, coup de filet mobilisant des dizaines d’agents de différents services, Michelle Alliot Marie tape dur sur la casserole fabriquée à Tarnac, elle teinte fort, bien trop fort, en moins d’une semaine elle se brise et ne donne plus qu’un son aigrelet… Le Figaro est en effet passé en quatre jours du « retour de l’ultra-gauche activiste » à « l’exagération de l’affaire », à quelques notes près, le reste du paysage médiatique est à l’unisson… Pire, le fil d’une complicité chez les cheminots a cassé avant même d’être noué. A travers SUD-Rail, il aurait pu conduire MAM jusqu’à la LCR nouvelle mouture.

Force et faiblesse du gauchisme contemporain

C’est vrai, c’était difficile de diaboliser un tel CV : une bande de post-étudiants ayant repris le seul commerce d’une bourgade du plateau de Millevaches. Epicerie, restauration mais aussi services gratuits : animation, soutien scolaire et j’en passe… Dans ces campagnes françaises où même les bistrots périclitent, ces nouveaux ruraux sont bien acceptés, en tous cas mieux que leurs devanciers « post-68 » qui vivaient isolés et singeaient le métier de paysan. Pari de l’intégration et pari réussi à la vue du comité de soutien vite monté par leurs voisins… La communauté est « paritaire », les (jeunes) femmes y sont même majoritaires, voilà qui colle à l’époque et ne devait pas déplaire dans le village…

C’est agaçant aussi, même dans le sabotage ils sont sympathiques : seuls les lignes à grande vitesse ont été visées, ces TGV rapides mais chers, inaccessibles au quotidien à la majorité des Français. Un fer à béton est placé avec adresse (on connaît l’accointance de la gauche dure avec les métiers du cirque) sur le caténaire. Court-circuit, la motrice n’est plus alimentée, le train meurt gentiment sur la voie et à l’intérieur tout le monde vit… Rien à voir donc avec les blocs de béton sur les rails qui menace d’envoyer les passagers crever le décor…

Un détail, presque rien, pouvait cependant alerter ; le panneau de leur épicerie annonçait : « repas ouvrier, 12€ ». Avec 12€, un bistrot vous fournit un repas copieux, même à Paris. Dans une sandwicherie ou un kebab, vous pouvez même inviter un ami… Malgré de conséquentes qualités, la petite troupe n’évite pas les habituels travers « libertaires » : Enfants de la bonne bourgeoisie, n’ayant la plupart du temps jamais connu le salariat, nos libertaires sont aussi propriétaires. Julien Coupat, 34 ans, personnalité marquante du groupe, vit et fait vivre ses amis avec l’argent de papa et maman, médecins et partie prenant de l’industrie pharmaceutique (4)… L’autonomie a un prix, elle est surtout toute relative… Quant aux différentes chapelles de la gauche ultra, elles évoquent surtout l’affaire dans une pure tradition de surenchère taxinomique : « la cellule de Tarnac est elle anarcho-autonome, décroissante, néo-luddiste ? ». Ses jeunes adultes « bien sous tous rapports » (5) ont aussi la sympathie de la bonne presse. Les journalistes se reconnaissent quelques années en arrière. Leurs patrons et les directeurs de rédaction, eux se rappellent de leur jeune temps et/ou de leurs enfants.

Les extrêmes inversent les rôles

Les prévenus auraient cité Antonio Gramsci comme référence. Ce communiste italien plaidait pour « l’hégémonie culturelle » : les socialistes devaient coloniser toutes les avant-gardes et faire la Culture, tenir les idées, pour prendre le Politique. Ce qui explique l’intérêt que lui a porté la « Nouvelle » Droite. Nous savons aujourd’hui que c’est là une réussite des gauches extrêmes: leur présence dans les bacs, les galeries et les universités restant bien supérieure à leur impact auprès des masses. L’allemand Willy Mützenberg avait développé une théorie similaire autour de la morale et de ceux qui l’exercent. Dans ce domaine, l’influence de la gauche de la gauche est encore plus nette. Cette influence, ou plutôt cette prise d’influence*6, permet de placer des militants là où la neutralité universitaire devrait être la règle.

Pour percer le « comité invisible », France Info s’est tourné vers un spécialiste reconnu (et acteur à ses heures) des périphéries politiques. Christophe Bourseiller n’est toutefois pas qu’un chercheur et un auteur, c’est aussi un disciple avoué de Guy Debord, ce qui ne l’empêche pas d’être partie prenante de cette « société du spectacle » qu’il dénonce par ailleurs. Bourseiller précise donc dans son entrevue radio que « l’ultra-gauche » est une critique virulente de « l’extrême gauche » plus « officielle », type Laguiller ou Besancenot. Ce sont même ses premiers mots, il coupe le pont avant même que quelqu’un ne l’ébauche. Il ne s’agit pas ici d’un mensonge mais d’une vérité biaisée : gauche dure ou droite dure, les franges activistes critiquent toujours les pôles politiciens mais elles entretiennent également des rapports continus avec eux. Interrogé sur l’attentat de Maxime Brunerie, Bourseiller avait insisté sur l’impact de la présence (et de la défaite) de Jean Marie Le Pen au second tour des présidentielles. Majoritairement coupée des milieux qui font et défont les idées, l’extrême droite s’est donc orientée vers une pratique « basiste », populaire, jouant le Peuple contre les élites. Paradoxe et confusion d’une droite au corpus inégalitaire mais qui en appelle aux classes laborieuses, paradoxe et confusion d’une gauche qui a installée ses bastions loin du prolétariat qu’elle était sensée émanciper.

Volonté ou voie de garage ?

Paradoxe enfin de ce groupe de Tarnac qui mène de front une action légale, solidaire et des opérations clandestines, qui réclameraient une mobilité et un anonymat complet. De l’ETA et (feu) Batasuna au Hezbollah, nombreux sont à travers le monde les mouvements qui possèdent une représentation politique, un pendant social et une branche militaire. Coordonnés, ces organes doivent demeurer distinct pour s’articuler, c’est la survie de toute l’organisation qui en dépend. (Si les faits qui leur sont reprochés sont confirmés) plus qu’une montée en puissance ou une escalade définie, ce serait donc par dépit que cette petite communauté a sacrifié son actif militant. Loin de la période « d’apprentissage » qui a précédée les « années de plomb », nous revenons dans les parages de l’« activisme-sacrifice », voir « activisme-suicide » qui qualifie les cas Brunerie ou Rabiller. Julien Coupat serait l’auteur de « l’insurrection qui vient »(7), déjà fameux parmi les radicaux. On peut aussi remarquer que les attaques contre le matériel de la SNCF suivent la sortie de la biographie augmentée d’Unabomber, le plus célèbre et le plus inspiré (8) des terroristes anti-technologique. A voir avant de choisir entre les années de carton, de petit plomb ou un village Potemkine peuplé de succédanés de Ravachol…

notes

1 https://voxnr.com/cc/a_la_une/EkEkukVFFpSjiQCWVR.shtml
2 http://www.lejdd.fr/cmc/societe/200840/je-ne-suis-pas-un-terroriste_152379.html
« (…) cet admirateur de Lénine, Che Guevara et... Olivier Besancenot, un jeune postier comme lui pour qui Rabiller a voté au premier tour de l'élection présidentielle de 2007 »
3 C’est déjà l’action conjuguée du FBI avec la police suisse qui avait provoqué la censure du réseau Indymédia.
4 A une toute autre échelle, c’est le cas du Lutte Ouvrière (qui n’a évidemment rien de libertaire). Son dirigeant, Robert Barcia dit Hardy, tirait sa fortune de la formation des commerciaux des entreprises pharmaceutiques.
5 Rien de neuf sous l’Astre rouge noir, alors rappelons au passage qu’un Proudhon battant le pavé pour vendre sa force de travail est une exception du socialisme au sens très large. Kropotkine et Bakounine étaient respectivement grand et petit princes russes. Engels boursicotait pour faire vivre Marx, dont le grand contact avec le Peuple a été d’épouser sa bonne. Pour des origines modestes, il faut faire appels aux maudits : Staline ou Mussolini sont nés à la lisière du prolétariat et de la toute petite bourgeoisie.
6 Par une approche similaire, la nébuleuse sioniste réussit à faire reconnaître ses chauds partisans comme « spécialistes de la géopolitique », des « relations internationales » ou de la « pensée stratégique ». Ils colonisent ensuite les plateaux de télévision, y compris ceux du service public.
7 Le comité Invisible, « L’insurrection qui vient ». La Fabrique, 2007
8 KACZYNSKI Theodore, « l’effondrement du système technologique », Xénia, 2008
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