Douteux bénéfice de complicité différenciée
Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits… sauf les journalistes dont les droits sont à l’évidence supérieures aux autres. La loi fait obligation à tout citoyen de dénoncer un délit dont il a connaissance, voir d’intervenir pour l’empêcher au risque de voir sa propre responsabilité engagée et d’être accusé à son tour de non-assistance à personne en danger, voire de « complicité passive ».
Mais le journaliste, lui, doit « bénéficier d’un traitement différencié », ainsi que l’a rappelé Pascal Manoukian, rédacteur en chef à l’agence Capa, dont l’un des reporters, Marc Garmirian, était arrêté au Tchad.
Nicolas Sarkozy s’est donc précipité en Afrique, toutes affaires présidentielles cessantes, pour « sensibiliser » son homologue tchadien « au respect de la présomption d’innocence », insistant sur le cas des journalistes français et de l’équipage espagnol.
Message bien reçu par Idriss Deby Itno dont l’image médiatique a quelque peu besoin d’être redorée. Il l’a ainsi bien volontiers autorisé à rapatrier aussitôt journalistes et hôtesses de l’air espagnoles. Le speedy Gonzales des libérations internationales a déposé lui-même ces dames à Madrid. C’était certes sur son chemin, mais la galanterie ne se discute pas, encore moins sous les caméras.
Jusqu’à quand laissera-t-on les journalistes s’auto-proclamer, à la différence des autres citoyens, au-dessus des lois ?
Les verra-t-on un jour prochain accompagner des braqueurs lors d’un hold-up ou un violeur durant son passe à l’acte, puis se retrancher derrière ce bien pratique « droit à l’information » pour ne pas être inquiétés ?
Au Tchad, ils ont tout de même été les témoins privilégiés d’une tentative avérée – et reconnue avec fierté par les auteurs – d’« enlèvement de mineurs », si ce n’est peut-être d’« escroquerie ». Des jours durant, avant le coup de filet des autorités tchadiennes, ils ont complaisamment filmés tout ce qu’ils ont voulu, interviewant les uns et les autres, faisant même part à leurs interlocuteurs de leurs très naïfs étonnements quant à la légalité de l’opération, la nationalité réelle des enfants, la réalité de leur statut d’orphelins, etc.
Ils ne tenaient qu’à eux de prévenir alors qu’il en était encore temps autorités tchadiennes ou françaises et faire avorter le criminel projet de cet Arche de tarés humanitaires.
Ce fameux « droit à l’information » qu’ils brandissent à tout bout de champ, s’avère bien souvent, comme à Abéché, au Tchad, un simple « droit à la complicité ».