On se souvient sans doute de la loi électorale du 7 mai 1951, dite loi des apparentements, qui, par une de ces torsions jésuitiques propres à la Ive République, et d’ailleurs à tout système parlementaire faisandé, permettait aux assis de rester en place en monopolisant les sièges avant même l’élection législative. Cette loi était clairement dirigée contre les gaullistes et les communistes. On sait ce qu’il advint par la suite, ce qui suffit à relativiser toutes les magouilles entreprises par l’établissement pour garder ses privilèges et sa capacité à nuire.
Dernièrement, un « think tank » (laboratoire d’idées) proche du candidat de l’hyper classe financière Strauss Kahn, Terra nova (one world, one God : money !), a produit une petite merveille de crapulerie antidémocratique afin d’empêcher toute expression populaire. Nous avions déjà eu l’occasion, dans un article économique : (« Mondialisme et civilisation ») de montrer qu’en guise de socialisme, les propositions de ce club de serviteurs zélés du mondialisme ne s’écartaient pas franchement du libéralisme dogmatique de tout ce que les instances nationales et internationales, politiques et économiques, affirment en matière de dérégulation, de destruction du corps social et des défenses populaires. Il est donc naturel qu’une montée des résistances fût considérée comme un danger pour cette caste nomade qui s’érige en donneuse de leçon.
Qu’est-ce que la démocratie pour elle ? Qu’est-ce que la capacité pour chaque citoyen de dire franchement, directement, sans entortillements et byzantinisme, s’il opte pour tout candidat ou non. Ce serait trop clair, trop simple, à leur goût. Il vaudrait mieux un système assez labyrinthique, pour gruger le chaland. On connaît, on a déjà donné avec le référendum de 2005 sur la Constitution européenne, qui a eu le destin que l’on sait.
Selon Michel Balinski et Rida Laraki, chercheurs au CNRS à l’Ecole Polytechnique,(et on nous dit que leur projet a été salué par « la communauté scientifique, en particulier les Prix Nobel Kenneth Arrow, Robert Aumann et Eric Maskin » !), il y a de « bons candidats » et de « mauvais ». Le pire, pour eux, serait un nouveau 21 avril. On remarquera la neutralité, l’objectivité. De quel droit, somme toute… mais ces gens-là sont intelligents… donc…
Donc après avoir constaté que le mode de scrutin vieillit mal (pensez donc, choisir un représentant, c’est très, très vieux, et cela date des Grecs !), ils font huit propositions.
D’abord, « au lieu de nommer un seul candidat, le « jugement majoritaire » demande d’évaluer les mérites de chacun des candidats dans une échelle de mentions : Très bien, Bien, Assez bien, Passable, Insuffisant, à Rejeter. » Pourquoi pas une dissertation ?
Passons sur la prolongation de l’inscription, au plus près du jour du scrutin (ce qui, au demeurant, peut donner l’occasion de manipuler et d’enrégimenter des « jeunes » face au « danger fasciste »).
Supprimer les cinq cents signatures pour légitimer les candidats. Ce mode de désignation serait remplacer par le choix des partis présents au parlement (mais voyons ! on n’est jamais si bien servi que par soi-même !) et/ou par un soutien d’au moins un million de citoyens (pour éviter sans doute l’éparpillement des voix : les petits partis apprécieront). Quand on sait la réticence des électeurs à avouer leur sympathie pour le FN, on comprend le but de la manœuvre.
Ensuite allonger la durée de la campagne entre les deux tours.
Puis relativiser le temps de parole : « les candidats doivent être traités de manière équitable, en fonction de leur poids estimé dans l’opinion ». Qui jugera le « poids » et en fonction de quels critères ? On croit rêver ! On voit en tout cas qui est visé, si ce « poids » dépend du nombre d’élus à l’assemblée.
Moderniser les « spots » télévisés : tout simplement transformer les interventions en clips publicitaires, à l’américaine. On n’est pas plus moderne ! On suppose que la nature « divertissante » sera à l’aune des publicistes embauchés (chèrement). Nul doute que le débat y gagnera !
« Autoriser un financement populaire déplafonné » : il ne faut pas être grand clerc pour voir la manœuvre. Evidemment, les partis qui défendent les pauvres seront les moins bien lotis. Quant aux autres, on connaît la générosité de certains lobbys.
Enfin « refonder le cadre législatif national de l’élection présidentielle le plus en amont possible de 2017. »
Ce qui transparaît dans cette furie hystérique, de la part de notre « élite » intellectuelle, qui se comporte en ramassis de poissons pilotes pour les gros requins, outre que toutes ses références sont américaines, c’est qu’elle sue la peur. Peut-être a-t-elle ses raisons. En tout cas, nous sommes avertis : tout sera utilisé pour empêcher l’expression populaire.