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Mardi, 29 Septembre 2009
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Entretien avec Jean-Marie Le Pen
Propos recueillis par Nicolas Gauthier, Kamel, Abdelaali et Jonathan
Tribune libre
Entretien avec Jean-Marie Le Pen
C’est le plus ancien en grade et en fonction. Total respect, donc. Surtout au vu de ce qu’il a à dire à nos lecteurs. À ceux qui s’étonneront qu’aucune question ne lui ait été posée quant à la tambouille politicienne, cette seule réponse : c’était aussi le but de l’opération ! L’homme ayant vécu, de près et de visu, tant de bouleversements relevant désormais plus de l’histoire avec un grand “H” que de la politique avec un petit “p”, on ne le dérange pas, juste façon de savoir ce qui fait la différence entre le Modem et le Nouveau centre, et autres scissions toutes plus groupusculaires les unes que les autres, qu’elles grenouillent ou non à droite ou à gauche de l’échiquier électoraliste… Bref, on lui parle d’autre chose. On tente d’élever le débat vers d’autres sphères qui, comment dire, relèvent davantage de la géopolitique et de la civilisation que de l’actuel brouet que les médias nous servent, matin, midi et soir jusqu’à indigestion.D’où ce long entretien, à l’occasion duquel l’homme livre ce qu’il a sur le cœur.

Dès la chute du mur de Berlin, vous avez été l’un des premiers hommes politiques à avoir pris acte du fait que le monde avait changé en profondeur et que les cartes allaient être redistribuées…

Les choses ont changé c’est certain, et la fin de la Guerre froide n’a pas toujours été intégrée, ni dans les esprits, ni dans les déterminations politiques. L’émergence des puissances nouvelles, les phénomènes de migration massive, transforment la donne géopolitique mondiale. Ces derniers ont défini des solidarités nouvelles. En ce sens, il y a un certain temps que ce mouvement d’union, par ailleurs adultéré par l’Union Européenne, s’étend jusqu’aux pays slaves, participant ainsi à la multipolarité du monde avec des pays qui nous sont proches. Évidemment, cela n’induit pas d’agressivité à l’égard d’autres pays, en particulier ceux du Sud, mouvement qui nous a longtemps permis de nous tenir relativement à distance de la politique américaine. Le choix par les Français d’élire Nicolas Sarkozy s’est traduit par une option tout à fait différente en ce domaine ; c’est la raison pour laquelle nous sommes dans l’opposition, et en passe, d’ailleurs, d’être les derniers opposants.

À l’époque, Mikhaïl Gorbatchev aurait dit aux Américains, juste après la chute du mur : “Nous venons de jouer le tour le plus pendable qui soit, nous vous avons privés de votre principal ennemi…” D’où la stigmatisation de l’islamisme, sorte de diable de substitution ?

C’est tout à fait ça. D’ailleurs, dans quelle mesure ce diable n’est-il pas instrumentalisé par la politique américaine ? Son émergence évidente participe plus, à mon avis, d’une poussée démographique que religieuse. Je crois que les aspirations de puissance de certaines nations, naturelles, pas forcément politiques et calculées, prennent le canal religieux parce qu’il est le moins vulnérable. Moi, j’ai milité pour que nous ne rompions pas les liens traditionnels de la politique française avec les pays de l’islam, qui restent d’ailleurs très différents, très divisés, derrière une Oumma qui est en fait beaucoup plus de façade que de réalité. Même le monde arabe est profondément divisé. D’ailleurs, les maîtres de la manipulation diplomatique que sont les Britanniques ont toujours affirmé que c’est un monde qui ne serait jamais unifié. C’est ce qui m’a amené personnellement, alors que je ne connaissais aucun Irakien, à prendre des distances de plus en plus grandes avec les États-Unis et la politique qu’ils menaient dans le Moyen-Orient. J’ai appliqué le même raisonnement aux relations avec l’Iran. Ce pays n’a pas à être diabolisé, même s’il ne faut pas se montrer naïf pour autant, sachant que les nations ont leurs propres égoïsmes, leurs propres intérêts. Il ne s’agit pas de donner dans les sentiments, mais pas non plus de les écarter systématiquement des relations internationales. Je n’ai pas été suivi, c’est le moins que l’on puisse dire.

En 1990, quand vous prenez position contre la Guerre du Golfe, vous êtes minoritaire même au sein de votre propre mouvement, ou en tout cas au bureau politique…

En tout cas ça ne s’est pas manifesté. [Rires]. La première expression de ma position a été une tribune publiée par Le Figaro, intitulée “Qu’allons-nous faire dans cette felouque ?” À partir de cette démarche, et profitant de la sympathie qu’elle entraînait chez les Irakiens, je me suis rendu à Bagdad rencontrer le président Saddam Hussein, ce qui m’a permis d’obtenir la libération de nombreux otages. Pas des otages français, mais européens, parce que le gouvernement français a tout mis en œuvre pour empêcher que j’en sois le bénéficiaire politique. De même, quand j’ai ramené ces otages, mon avion a été détourné, sur ordre du gouvernement français, de Strasbourg à l’aéroport de Bâle. Nous avons été accueillis par des policiers avec chiens, casques et pistolets-mitrailleurs. Ensuite, les événements ont pris la tournure que j’avais prévue, et l’Irak s’est avéré être un guêpier sans issue.

Puis, le martyre du peuple irakien : deux guerres, l’embargo…

Cataclysme auquel nous n’avons pas été indifférents puisque nous avons créé l’association SOS Enfants d’Irak, il y a plus de dix ans, présidée par ma femme Jany, qui, d’une antenne de Bagdad, s’occupe aussi du sort des enfants irakiens réfugiés en Jordanie.

La chose est peu connue, mais on dit qu’aux pires moments de la guerre entre l’Iran et l’Irak, vous avez aussi joué les intermédiaires, les messieurs “bons offices” entre ces deux pays…

C’est tout à fait exact. Je pense qu’ils ont été tous les deux victimes de manipulations américaines et que cette guerre a été suscitée, entretenue et aggravée par les États-Unis et Israël. Mais, dans ces histoires de Moyen-Orient, il n’est pas forcément nécessaire de les diviser, de les séparer l’un de l’autre…

Revenons-en à l’islamisme. À la faveur de la guerre en Afghanistan, les États-Unis n’ont-ils pas été le principal financier de l’islamisme ?

Pire, après avoir financé l’islamisme, ce sont les Américains qui ont en quelque sorte “créé” les Talibans tout en offrant, sur un plateau, l’arme nucléaire au Pakistan. Maintenant ils sont aux prises avec leur propre créature…

Un peu comme en 1945, quand les USA ont armé l’URSS contre l’Allemagne, pour ensuite se retourner contre Joseph Staline…

Absolument ! Comme à Cuba, où ils ont laisser faire Fidel Castro contre Fulgencio Batista pour le retrouver ensuite comme ennemi.

C’est une manie, chez eux ! Déjà, au Vietnam, ils avaient financé le général Giap contre les Français…

Il y a des gens dont c’est le métier de vendre des armes. S’il n’y a pas de guerre, comment veut-on faire du commerce ? Cette relance alternative leur permet de faire des affaires !

Quand les Américains nous vendent, clefs en main, un choc de civilisations entre Occident et Orient, le véritable choc ne serait-il pas plutôt entre les sociétés marchandes et mercantile ?

Tout à fait, ce clivage est essentiellement incarné par les Anglo-Saxons. On peut ainsi considérer qu’il y a des divergences fondamentales de conception de la vie et du monde. Ce qui fait la différence entre nous et eux, c’est peut-être que nous travaillons pour vivre alors que d’autres préfèrent vivre pour travailler. La politique étrangère, en tout cas celle qui peut avoir un avenir, s’articule autour d’un certain nombre de réalités. Il faut des intérêts communs, des risques communs et des sentiments communs. Je crois que les espaces de relations et d’influences que je définis paraissent plus proches et réalistes que ceux qui nous sont proposés. Le rôle qui nous a été assigné par le président Sarkozy, c’est celui du petit toutou en laisse qui est chargé d’aboyer face aux adversaires, alors que j’ai sans doute une plus grande ouverture d’esprit aussi, une plus grande pratique des autres peuples.

Vous avez également beaucoup voyagé…

Oui. Mais il y a un autre fait à prendre en compte : la France a toujours eu un autre niveau de relations avec les autres nations. Mais, paradoxalement, le fait d’avoir été plus affectifs, plus humanistes, plus proches des peuples, ne nous a pas forcément rendus plus sympathiques. Je me souviens qu’en Égypte, au moment de l’opération de Suez, en 1956, les Britanniques, qui avaient toujours agi avec brutalité dans la répression, avaient plus de prestige que nous n’en avions. Et à la limite, ils étaient moins détestés que nous. Dans l’amour il y a toujours un reproche : on n’en fait jamais assez. Tandis que la posture anglo-saxonne, dans sa froideur et sa distance, fait qu’on n’en attend rien ; donc, on n’est pas déçu.

Un peu comme la France et l’Algérie, sorte d’histoire d’amour contrariée.

Avec aussi beaucoup d’aveuglement. En 1957, quand j’ai présenté la candidature d’Ahmed Djebbour à Paris, aux élections législatives, Jacques Soustelle, me dit : “Mais vous n’y pensez pas ? Vous rendez vous compte ? Vous présentez un Arabe à la députation à Paris”, un tel discours, alors qu’il est le symbole de l’Algérie française ! Je lui assure que ça me paraissait être dans la logique de la politique que nous définissions alors, mais il ne m’écoute pas !

L’Algérie française sans les Algériens, donc…

C’est ça ! Et je choisis un candidat qui me semble représenter le rêve de cette Algérie commune : il est marié selon la loi française, selon le code civil, ce qui est relativement rare à l’époque dans des milieux de classe moyenne. Seuls les grands bourgeois, quelquefois, ont cette pratique. Je pousse ma logique assimilationniste. Elle est de jouer le jeu, que je crois possible, mais ça ne correspond pas à ce que souhaitent beaucoup de puissants. On l’a bien vu avec la politique du général De Gaulle, qui dit oui à l’Algérie française, et le “Je vous ai compris”. Moi, je pense que, pour la France, c’est un atout fantastique que d’avoir le pied sur deux continents différents. Nous avons les possibilités d’un développement exceptionnel et corrélatif. Ça aurait été une autre aventure. Malheureusement, je n’ai guère été suivi…

Quel jugement portez-vous sur Hugo Chavez, le président vénézuélien ?

Le poids de l’Histoire est très fort, ainsi que le poids des cultures. Je pense que le continent hispanique a plus d’affinités naturelles avec l’Espagne, même si les relations ont parfois été douloureuses. Mais la France peut être appréciée en Amérique du Sud, malgré la barrière de la langue. Bien sûr que nous devons utiliser ce qui nous reste de prestige auprès de ces pays, ce qui est lié à des choses mystérieuses d’ailleurs, à l’Histoire et au catholicisme. Il y a une attitude générale du monde latino-américain qui a quand même été la grande déception du XXe siècle. Ces pays présentaient un potentiel exceptionnel et, malgré des réussites incontestables, telle l’émergence du Brésil, c’est tout de même assez décevant par rapport à ce que l’on pouvait attendre d’eux. L’Argentine et le Chili sont restés, dans le fond, des puissances régionales.

Il faut dire que la doctrine Monroe leur interdit d’être des puissances politiques, et quand elles essaient d’y arriver, il y a toujours un putsch…

Il est vrai que les Américains leur tiennent sévèrement la bride. Mais il est étonnant de voir l’hispanité reconquérir aux États-Unis les territoires qui leur ont été volés. C’est la Reconquista !

Vous avez été très lié avec l’ancien Premier ministre turc islamiste Necmettin Erbakan. Peut-on en savoir plus ?

Il n’était pas pour l’entrée de la Turquie en Europe. Il avait une autre conception de la grandeur, plus ottomane qu’européenne. C’est assez compréhensible, même si cela heurte de plein fouet les intérêts anglo-saxons qui, en 1918, ont dépecé la Turquie, lui confisquant au passage tout son pétrole… J’ai toujours eu des relations assez amicales avec la Turquie, j’ai dû être un des premiers marins à naviguer sur leurs côtes. C’est un peuple courageux et travailleur. Mais ils ont plus d’affinités avec les Allemands qu’avec nous, comme on disait à la Légion étrangère. Ce sont des maîtres dans le travail du fer, du bois, du cuir. Ils maîtrisent la création d’objets, plus que nous. Pour résumer la personnalité de Necmettin Erbakan, il faut savoir qu’il s’agit d’un religieux, très profondément croyant, persuadé comme moi que l’islam risque de se corrompre dans la fréquentation ou dans l’intimité d’un Occident décadent.

Aujourd’hui, Israël paraît se croire absolument tout permis. Même en Afrique du Sud, aux pires heures de l’Apartheid, les Afrikaners ne faisaient pourtant pas endurer aux Noirs le centième de ce qui se passe à Gaza…

Ce serait insulter les Afrikaners que de faire cette comparaison. La doctrine afrikaner, aussi contestable qu’elle ait pu être, et contestée historiquement, était quand même une proposition de développement séparé et non pas d’hostilités poussées aux extrêmes. C’est sûr que le traitement réservé aux Palestiniens est absolument scandaleux.

Entre les murs, les blocus, les eaux usées qu’Israël déverse sur Gaza, plus grosse concentration démographique, prison à ciel ouvert, ça fait beaucoup. Et quand ils se révoltent un petit peu avec leurs roquettes en carton, ils se font ratonner…

Dès que l’on dit cela, on est immédiatement pris pour cible. En France, on ne peut plus rien dire ! Rappelez-vous quand j’ai dit que Bienvenue chez les Ch’tis de Dany Boon était un film médiocre et sans importance, j’ai cru qu’on allait me refaire le procès du “détail” !

Pourtant, un “raciste” présumé qui est ami avec Dieudonné, ça devrait faire réfléchir…

Cette réputation de racisme a été fabriquée. La première fois que j’ai été élu député, mon deuxième de liste était Noir. Je ne suis pas raciste. Sur le plan personnel, je reconnais la dignité et la capacité individuelles de gens différents issus de races différentes. Cela étant, je demeure un adversaire de l’immigration de masse et, plus encore, adversaire de ces grands mouvements migratoires qui, je crois, contribuent à déstabiliser l’équilibre des sociétés.

C’est mauvais pour les pays d’accueil, mais aussi pour ceux d’origine. Ainsi comptons-nous plus de médecins béninois en Île-de-France qu’au Bénin…

C’est vrai. Ce phénomène crée un monde cosmopolite, de gens souvent coupés de leurs racines, n’ayant plus les qualités de leurs origines, et beaucoup des défauts de l’endroit où ils se trouvent.

L’immigration de masse, on peut la voir comme une forme raffinée de l’esclavagisme. Parce que finalement, avant, acheter des esclaves ça coûtait beaucoup d’argent. L’esclave, il fallait le nourrir, le loger, le soigner et il travaillait le moins possible, faute de “plan de carrière”. Désormais, ce sont les esclaves qui viennent tout seuls pour se faire exploiter ! C’est finalement la forme la plus raffinée de l’esclavagisme ?

D’une certaine manière, c’est vrai. Mais de la part du pouvoir, c’est plus une politique de lâcheté, d’incapacité d’affronter les problèmes. Il est certain que l’antiracisme est devenu une religion à laquelle on fait dire n’importe quoi et à partir de laquelle on déclenche toutes sortes de comportements qui me paraissent asociaux. On dit que les Américains ont trouvé en ce domaine des méthodes de sélection inédites : le mur du Rio Grande serait ainsi fait pour être franchissable par des jeunes hommes de 20 à 40 ans, mais pas par les autres, trop jeunes ou trop vieux…

Ce qui est paradoxal justement, quand on voit les mouvements antiracistes en France, c’est qu’ils servent de caution morale à des actions assez ignobles. Quand on voit qu’au lieu de payer normalement des Français, on sous-paye des clandestins, donc qui ne peuvent pas être syndiqués, sans se poser la question de savoir si ces gens-là sont heureux chez nous – parce que le déracinement n’est jamais un bonheur –, il y a quelque chose d’assez malsain dans tout ça, non ?

Cette action en faveur des “sans-papiers” est une revendication sûrement sincère chez un certain nombre de gens, même fondée sur cette sorte d’injustice que vous dénoncez ; mais la vie elle-même est injuste. À partir de cela, on a théorisé une opposition entre races, parfois aggravée par la différence des religions. Et puis, il y a eu aussi toutes ces indépendances mal négociées ayant débouché sur tant d’espoirs déçus. Alors, oui, je suis respectueux du droit des hommes, mais j’aimerais bien aussi qu’on soit respectueux des droits des Français de souche. Je suis un Français de souche, je ne vais pas m’en excuser. Ça ne me rend pas pour autant agressif à l’égard des autres Français de branche qui, à mes yeux, méritent de l’être par les efforts qu’ils ont faits pour le devenir ou le rester. Ce n’est pas évident… On sait ce que cela peut représenter de souffrance, l’insertion dans un autre pays.

Vous avez été le premier homme politique d’envergure à avoir demandé, en 1987, l’annulation définitive de la dette des pays sous-développés…

C’était en effet lors d’une conférence de presse. À croire qu’en cette matière, j’ai également été un précurseur. Mais à mon sens, il s’agissait d’une mesure de justice élémentaire.

Dieudonné affirme que, tout bien réfléchi, cette décolonisation hâtive a été pire que la colonisation et que c’est à cette époque que le véritable pillage de l’Afrique a commencé…

Sur le pillage des ressources, je crois qu’il faut essayer d’être objectif. Il y a des ressources qui ont été exploitées par les Occidentaux, mais qui n’auraient pas pu l’être par ces peuples qui n’avaient pas le niveau technique, ni les moyens d’investissement suffisants pour mettre leurs richesses en valeur. Alors bien sûr, la sagesse aurait voulu que tout cela fût géré avec plus de compréhension.

Et avec un meilleur sens du partage, aussi ?

Sans aucun doute. Même si la violence et la guerre sont les accoucheuses de l’Histoire, le résultat est décevant. C’est moins vrai au Maroc et en Tunisie, mais quand on regarde l’Algérie par exemple, où pourtant il a été donné un patrimoine considérable, y compris le Sahara qui n’était pas algérien et ses ressources en gaz et en pétrole, eh bien, il faut dire que là la poussée démographique a tout bousculé. La population est de plus en plus nombreuse et la gestion du pays ne correspond pas à un développement harmonieux.

Vous développiez tout à l’heure une vision continentale de l’Europe, quasiment boréale, allant jusqu’aux peuples slaves. Mais pour le Celte que vous êtes, on sent aussi qu’il y a un amour de la Mare Nostrum, parce que, si on résume un peu les choses, toutes les civilisations sont nées autour de la Méditerranée : l’écriture, Homère, les philosophes, les religions révélées…

On a tenté cette synthèse. C’est son échec qui me conduit à essayer de développer une autre forme d’association. Je crois que les conflits laissent des cicatrices qui ne sont pas toujours faciles à effacer, et des blessures pas toujours faciles à guérir compte tenu du fait que c’est l’intérêt politique d’un certain nombre de gens que de les rouvrir en permanence.

D’autant plus que si l’on regarde plus loin dans l’histoire, la France a bien plus fait la guerre aux Prussiens, aux Hongrois, aux Anglais, aux Allemands qu’au Maghreb et au Proche-Orient.

À la limite, les guerres peuvent aussi rapprocher. Prenez le cas de l’Allemagne et de la France, j’affirme que le sentiment anti-allemand était moins fort après la Seconde guerre mondiale qu’il ne l’était avant. Pourquoi ? Avant ce conflit, les peuples allemand et français n’avaient l’un de l’autre qu’une appréhension chimérique, artificielle, médiatique. Alors que là, il y a eu cohabitation en quelque sorte. C’est-à-dire que nous avions battu les Allemands, ils nous avaient battus, on s’était rebattu ensemble bien souvent. Mais on a vu notre débâcle en 1940, et la leur en 1944. Il y a eu un million et demi de prisonniers français en Allemagne pendant quatre ans, ils travaillaient dans des fermes… Et il y a eu l’équivalent de prisonniers allemands en France après la guerre. Ce jour-là, ils se sont aperçus qu’il y avait effectivement peu de choses qui les séparaient ; qu’ils avaient à peu près les mêmes conceptions familiales, sociales. Et donc il a fallu soixante ans d’efforts, de matraquage politique, pour maintenir les Allemands, d’abord dans leur humiliation – ils s’y prêtent d’ailleurs assez bien –, et puis qu’on recrée un stock de sentiments hostiles. Il faut savoir que ce ne sont pas les faits qui forgent les relations, c’est la relation de ces faits. Or, un Français, quelle appréhension a-t-il de la Seconde guerre mondiale ? Eh bien le cinéma, les films ! Il ne sait pas ce qui s’est réellement passé. Mais il croit savoir ce qu’il a vu au cinéma. Il y a même un certain nombre de gens qui, comme ça, sont convaincus qu’ils ont été résistants. Ils se voient avoir fait dérailler les trains, etc, alors qu’ils étaient dans leur lit ou sous leur lit !

Et puis à l’époque, tout le monde courait après les tickets de rationnement, comme l’écrivait le défunt Michel Audiard…

J’ai été jugé pour avoir tenu des propos aussi peu orthodoxes sur ces questions. J’ai dit au juge : “Madame, écoutez, soyons raisonnables ! Mettez-moi donc de la prison ferme, j’ai besoin de trois mois pour lire, écrire un peu, cessons cette hypocrisie des mois de prison avec sursis !”

Je vous ramène à l’immigration, à la France, à l’islam, phénomène d’après vous davantage lié à la poussée migratoire démographique qu’à un simple problème religieux ?

Quand il y avait 400 000 ou 500 000 musulmans en France, il y avait une mosquée, personne n’en réclamait d’autre. Maintenant il y a des réclamations constantes, souvent suscitées par les maires afin d’augmenter leur clientèle électorale. Un peu comme Sarkozy, qui professe l’opinion dominante du problème venant d’être soulevé. Il est très vert en ce moment, parce qu’il a vu le succès d’Europe-Écologie aux dernières élections européennes. Il était aussi très tricolore en 2007… Cet homme est toujours à disposition !

Ce que certaines personnes peuvent reprocher aux mosquées, c’est d’abord de ne pas s’inscrire dans l’architecture traditionnelle…

Je dirais qu’il y a là une volonté provocatrice, en particulier des musulmans sous influence wahhabite. Ces espèces de grands blocs à la manière du Sacré-Cœur de Montmartre. Ces grandes mosquées financées par l’Arabie Saoudite, que l’on voit à Singapour, à Hong Kong, partout dans le monde. C’est sûr que cela peut apparaître incongru dans le paysage où s’inscrivent ces fantaisies architecturales. C’est très curieux, mais près de Grenoble, sur un terrain industriel, il y a un endroit où voisinent trois mosquées. L’une est marocaine, l’autre algérienne, la dernière kurde ou iranienne. L’architecture n’est pas provocatrice, relativement modeste avec petits minarets. Mais nous sommes déjà en plein communautarisme…

Parlons franchement : y a-t-il incompatibilité entre les cinq piliers de la foi musulmane – profession de foi, cinq prières quotidiennes, ramadan, charité du vendredi, pèlerinage une fois dans sa vie à La Mecque – et le mode de vie français ?

À mon sens, aucune. En principe, les religions chrétiennes étaient religions de paix, de fraternité et d’amour. Ça n’a pas empêché les catholiques et les protestants de s’égorger des siècles durant, tel qu’en Irlande aujourd’hui encore. Ainsi, le fait qu’il y existe un islam pacifique ne signifie pas pour autant qu’il le restera toujours. Et dans ces affaires, il ne faut pas non plus surestimer l’ingrédient religieux. La guerre d’Algérie n’a jamais eu de caractère religieux. C’était un mouvement laïc, nationaliste, socialiste.

Pour les populations issues de l’immigration, le retour à la culture religieuse d’origine, ça aide aussi au maintien de l’ordre public ?

Sûrement. Mais pour aller plus loin, sachant que les médias jouent à nous faire peur avec l’islamisme, je me demande, moi qui suis iconoclaste, dans quelle mesure le terrorisme islamiste n’a pas été imaginé pour freiner l’expansion islamique.

En tout cas, si le 11 septembre est l’affaire des islamistes, c’est qu’ils sont plus nigauds que la moyenne…

C’est encore l’une des choses auxquelles je ne crois pas. Il y a un certain nombre de choses auxquelles je ne crois pas…

C’est votre côté Bigard, on va dire…

Oui, mais je suis plus que Bigard ! C’est mon côté voltairien : en matière d’Histoire, le doute doit être constant. Donc, si on me dit ceci, monsieur, c’est une chaise [dit-il en désignant la table basse de son bureau], je ne le crois évidemment pas. C’est pourquoi j’ai peine à imaginer que cet attentat si sophistiqué ait pu être conçu dans une grotte d’Afghanistan.

Par des Talibans en mobylette ?

Non que je ne croie les Orientaux capables de monter des coups, mais celui-là était quand même très peaufiné…

Et on ne peut pas dire qu’il ait servi la cause de l’Islam dans le monde…

C’est pour ça qu’à titre d’hypothèse, je pense qu’après tout, peut-être que des gens ont pu imaginer…

Claude Imbert écrit dans Le Point “Je dois avouer qu’effectivement je suis assez islamophobe…” À croire qu’il s’agit d’une nouvelle mode médiatique…

Je crois à ce que je vois. Et ce que je vois autour de moi, ce sont des musulmans intégrés à la vie sociale, très souvent par l’artisanat plus encore que par le commerce. Parce que le commerce les met quelquefois en relation avec leurs propres coreligionnaires. Alors que l’artisanat les place au contraire dans un milieu différent. La vérité m’oblige ainsi à remarquer que leurs réactions sont souvent celles de Français de souche.

Lesquelles consistent souvent à râler contre le fisc et ’administration…

Et à en avoir assez d’être persécutés par les impôts, de se poser le problème de savoir combien c’est difficile de laisser les filles sortir le soir, etc. Alors, qu’ils aient une religion, la nôtre ou la leur… Moi, les descendants de l’immigration, je les considère avec respect. Le dernier jour de la campagne européenne, nous avons conduit les journalistes au Parc Astérix, mais sans qu’ils le sachent. Alors on leur donne rendez-vous au siège du Front, on va vers l’autocar qui va nous amener, mais ils ne savent pas où. À ce moment-là, paf ! Un camion d’éboueurs de la mairie communiste de Nanterre, avec deux superbes Noirs derrière, habillés en jaune, qui en passant font “ho ! ho !” Et les journalistes me disent : “Mais vous les connaissez ?” Je leur dis que non, mais qu’eux, ils me connaissent ! Ils étaient soufflés. Mais j’en ai cinquante exemples du même acabit…

On reproche souvent aux gens de droite d’être pessimistes. Dans ce registre, pensez-vous que c’était toujours mieux avant et que ce sera pire demain ?

L’autre jour, je lisais un livre, Un fil dans le tapis, de François Suarez d’Aulan, officier de réserve au 8e RPIMA, consacré à l’histoire de sa famille, laquelle remonte à l’an 800, en Espagne. Les Suarez, c’était une grande famille aristocratique française. Il raconte qu’à la prise de Cordoue ou de Séville, on trouva le drapeau musulman, abandonné, mais sur lequel était brodée la formule “Dieu est toujours le vainqueur”. C’est à ce moment que sa mère dit au dernier roi musulman d’Espagne, Boadil : “Pleure comme une femme ce que tu n’as pas su défendre comme un homme…” Alors, moi je suis comme le bœuf qui traîne sa charrue dans son sillon. Le bœuf ne sait pas le rôle qu’il joue dans la galaxie, mais il traîne sa charrue.

Rien n’est donc jamais inutile dans la vie ?

Rien n’est inutile, rien n’est jamais perdu. Les choses peuvent changer. Le pire, c’est de n’être pas. Et, surtout, d’être infidèle à soi-même. La vie est courte : on ne peut pas toujours rencontrer les gens qu’on souhaiterait. Il y a en place des forces colossales qui tiennent le monde, qui imposent leur vision et qui ont organisé la haine des Arabes et des musulmans contre moi, ce qui est tout de même assez pittoresque pour qui connaît mon passé !

Où veut-on aller ?

C’est une question que tous les êtres humains se posent, quelle que soit leur religion…

En Occident, maintenant, les gens ont peur de mourir. Les musulmans, eux, ont plutôt peur d’aller en Enfer. Mais comme c’était le cas chez nous autrefois…

Oui, mais on ne peut pas généraliser. Je crois qu’il y a là une gamme de réactions très variées, mais que, par discrétion, par prudence, les musulmans n’expriment pas. Et puis il y a aussi les réactions d’en face de l’adversaire. Un ami athée m’a dit : “Si on voulait virer les types de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, [les catholiques traditionalistes, NDLR] moi j’irais faire le coup de poing pour les défendre…” En fait, c’est exactement ça. Lui ne va pas à la messe, il ne croit pas en Dieu, et il veut les défendre. C’est cette solidarité naturelle entre les êtres humains qui présente une certaine valeur morale. Ils respectent un certain nombre de critères communs. Pour nous, un homme loyal, c’est un homme loyal dans n’importe quel monde. Un voleur, c’est un voleur. Un salaud, c’est un salaud. Et ça, ça nous rapproche terriblement les uns des autres.

À ce compte, pensez-vous que le nationaliste de demain puisse être aussi issu de l’immigration ?

J’ai affirmé un jour, alors qu’on disait “mais qu’est-ce qui arriverait si il y avait un soulèvement des banlieues ?”, que c’est peut-être le général Ben Barek qui réduirait les insurgés. La formation civique des jeunes de banlieue, mais aussi des autres, a été abandonnée ; à l’école, d’abord, puis par l’abandon de la conscription à l’armée. Or, à l’armée, on apprend plus sûrement à ne pas être raciste qu’à l’école, parce que nous étions tous camarades de combat. Et ça, c’est irremplaçable. Je dois avouer qu’en ce sens, la France n’a pas été à la hauteur. Il suffit de voir Hervé Morin, l’actuel ministre de la Défense… Encore un dont les seules balles qu’il ait entendu siffler à ses oreilles étaient des balles de tennis ! Ces mecs, réformés ou objecteurs de conscience, n’ont jamais vu un fusil de leur vie.

Êtes-vous conscient que nombre de Français issus de l’immigration aient pu théoriser et intégrer l’idée d’un nouveau nationalisme ?

J’en suis convaincu. Je dirais, sans enlever le mérite de ceux qui le font consciemment, que c’est sociologique et naturel, quand vous n’avez plus ou si peu de liens avec le pays d’origine. Ma théorie, c’est de dire que vous ne devez pas avoir honte ou peur parce qu’il y a déjà beaucoup de vos frères en religion en terre de France. Ils sont les combattants des guerres passées. Un jour, je rencontre un garçon nommé Toscano, violoniste. Je lui demande : “Vous êtes d’où ?” Il me répond qu’il est de Vannes. De Vannes, avec un prénom pareil ? Et là, il me répond : “Je suis de Vannes parce que mes parents sont enterrés à Vannes…” Voilà une bonne réponse ! Je suis très critique à l’égard du pouvoir français. Parce que l’attitude de compromis avec les jeunes, en particulier les marginaux, est condamnable. Les jeunes, il ne faut pas les laisser aller. Moi je suis un partisan de la fessée pour les enfants. D’ailleurs, un jour j’ai vu à la télé un père musulman à qui l’on disait “Oui, mais comprenez, on va retenir les allocations familiales, parce que vous ne tenez pas vos enfants”. Et le malheureux d’expliquer : “Mais comment voulez-vous que j’éduque mes enfants ? Quant on donne une claque à l’un de nos enfants, l’assistante sociale, le psychiatre, le psychologue nous menacent de procès. Comment voulez-vous faire ?”

C’est une volonté de destruction de la famille, aussi ?

Là, on peut trouver une grande communauté avec ceux qui respectent ces valeurs ; qu’ils aillent à l’office le dimanche ou le vendredi. D’ailleurs, qui pourrait mieux rapprocher chrétiens et musulmans que la notion de Dieu ? Celle de la vie éternelle. Voilà qui constitue quand même l’essentiel de la vie. Mais, pour les raisons que vous savez, tout est fait au contraire pour nous séparer ou nous opposer au maximum.

Lors de la grande psychose de l’entre-deux tours, en 2002, les autorités musulmanes sont les seules à n’avoir pas pris parti. Ils ne vous ont pas attaqué, ils n’ont pas appelé à voter Chirac.

Le fait est indubitable… Les autorités musulmanes se sont bien tenues, au contraire de tant d’autres…

Cela signifierait-il que certains musulmans manifestent plus d’intérêt pour l’identité nationale ?

Eh oui ! Et moi, j’apparais comme un vieux schnock dans cette histoire. Pour les médias, c’est “Oh, il est encore là celui-là ! il n’est pas encore mort ?” C’est ça, il n’y a plus d’idéal. C’est le monde que certains veulent, un univers de moutons consommateurs.


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