13/07/03 11.39 t.u. Christian Bouchet

Le 9 juillet, à la prime aurore, la police catalane a interpellé Juan-Antonio Llopart, directeur des Editions de la Nouvelle Europe ainsi que le propriétaire de la librairie barcelonaise qui leur servait de comptoir de vente.

Si l’un et l’autre ont été relâchés, plus de 10.000 livres ont été saisis... La police, considérant qu’il s’agissait de pièce a conviction, a également saisi les ordinateurs, les faxs et les téléphones portables de ces deux dangereux maffieux... accusés de légitimer l’« holocauste » !

La même police a diffusé à la presse la liste des livres saisis et des photos de leur « prise »...

Cela est particulièrement confondant car tout ce que l’on peut lire ou voir est parfaitement légal.

Sur une des deux photos, on remarque même, trônant au premier plan, des autocollants anti-Mac Do, en langue française, que j’ai publié il y a 6 ou 7 ans ! J’ignorais qu’en luttant contre la malbouffe, je légitimais l’« holocauste » ...

Quant aux livres, la liste des titres confisqués est vaste et laisse rêveur sur la notion de légitimation de l’« holocauste » . Qu’on en juge : ont été saisis les oeuvres d’Ernst Jünger (dont le Travailleur) publiées par Tusquet, une maison d’édition positionnée très à gauche, une thèse de l’IEP de Paris sur La Pensée sociale de Georges Sorel, divers livres d’Alberto Buela, homme politique de la gauche nationale argentine, docteur en philosophie de la Sorbonne, le n° 2 de la revue Nihil Obstat consacrée à George Orwell, un ouvrage de Norbert Ceresole sur le Venezuela de Chavez, plusieurs titres consacrés à Ramiro Ledema Ramos (dont un roman de lui), une critique du nationalisme et du racisme par Carlos Caballero Jurado, des traductions de Thiriart, de Mosley et de Yockey, etc.

Les seuls livres un peu « craignos » qui ont été présentés à la presse par la police de la pensée catalane sont La Campagne de Russie de Léon Degrelle et une biographie de Rudolf Hess. Mais nulle part dans ceux-ci on ne parle de l’épineux problème de l’ «holocauste ».

Il est vrai que dans un pays où exerce le juge Garzon on peut s’attendre à tout. On a, en effet, constaté que, tant pour poursuivre le général Pinochet que pour dissoudre Herri Batasuna, pour interdire le quotidien Egin et pour emprisonner des élus du peuple, tous les arrangements avec la légalité étaient bons.

Mais où il y a problème, c’est que les Editions de la Nouvelle Europe n’ont qu’une importance très modeste. Il se peut donc bien que la raison de tout cela soit ailleurs.

En effet, Juan-Antonio Llopart est aussi un des principaux dirigeants d’un petit parti politique d’orientation nationaliste-révolutionnaire, le Mouvement social républicain.

Malgré sa référence à la République, celui-ci ne représente pas un bien grand danger pour la monarchie puisque les listes qu’il a présenté aux dernières municipales ont fait des scores inférieurs à 1 %.

Mais, et c’est là que, à mon sens, tout s’éclaire, les militants du MSR n’avaient présenté que fort peu de listes, ils avaient en effet conseillé à tous leurs membres de s’investir dans les listes d’un autre parti : la Plate-forme pour la Catalogne.

Ce nouveau mouvement a, lui, obtenu de fort beaux succès pour son premier scrutin (entre 5 et 10 % dans les communes où il était présent et un certain nombre d’élus), d’où une inquiétude sensible du monde politique espagnol qui voit naître sous ses yeux, un Haïder, un Bossi, voire un Le Pen, et qui craint tant pour les prochaines élections que pour ses prébendes.

Or, comment mieux essayer de briser l’ascension d’un nouvelle force, sinon en lui attachant un « fil brun » à la patte. Juan-Antonio Llopart est un éditeur nazi, il dirige une organisation qui ne peut être que nazie, or celle-ci soutien la Plate-forme pour la Catalogne qui si elle n’est pas nazie elle-même a de bien mauvaises fréquentations, etc., etc.

Dans l’immédiat, j’ignore où en est la campagne de presse sur cette affaire et comment elle va se dérouler. Il est possible qu’on en reste là dans l’immédiat et que l’affaire rebondisse à l’approche des prochaines élections. Il est possible aussi que le but soit plus trivial : inquiéter la direction de la Plate-forme et lui faire épurer ses rangs, donc se priver volontairement de cadres et de militants pourtant indispensable à son développement et ainsi l’affaiblir en prévision des prochaines échéances.

Quoiqu’il en soit, dans l’immédiat une librairie et une maison d’édition sont privées de leurs fonds. Si nous ne les aidons pas tout de suite, elles ne pourront pas rebondir et elles fermeront, étranglées économiquement. Je ne saurais donc trop vous conseiller de faire un geste financier et d’adresser un don à ENR, Deutsche Bank, numéro de compte 0019-0308-18-40100202725.

Dans l’Italie des années soixante-dix, nos camarades affirmaient « La répression ne nous fait pas plier, elle nous multiplie », je souhaite qu’il en soit de même aujourd’hui.

Christian Bouchet