Joyeux anniversaire !
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08/09/02 |
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9.21 t.u. |
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Christian Bouchet |
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Je n’ai jamais beaucoup apprécié la télévision.
Je l’apprécie d’autant moins ces derniers jours, que je ne peux guère l’allumer sans me trouver face à face avec un speaker à la mine d’enterrement qui voudrait me faire pleurer sur la mort, il y a un an, de quelques centaines de yankees dans l’effondrement des tours du World Trade Center.
Il y a un an, je n’ai pas pleuré. J’ai comme tout le monde été ému, le 11 septembre, par le spectacle des New-Yorkais, victimes collatérales de l’attentat qui venait de toucher le World Trade Center.
Mais ému par le sort des populations civiles, ce n’était pas la première fois - contrairement à beaucoup - que je l’étais.
Je l’avais déjà été à la lecture des récits des bombardements effectués de manière aveugle par les forteresses volantes sur les villes européennes dans les années quarante ; à la lecture aussi du martyre d’Hiroshima et de Nagasaki.
Enfant, je l’avais été en voyant les reportages télévisés où des B52 napalmisaient en toute impunité les villages vietnamiens.
J’avais encore été ému, plus récemment, quand avaient été prises pour cibles les populations civiles de Libye, d’Irak et de Serbie.
Ému encore, je l’avais été par les souffrances des enfants et des civils d’Irak, du Soudan, de Libye ou de Cuba du fait de l’embargo ou des sanctions économiques imposées à leur pays.
A chaque fois, le coupable de ces actes inhumains, de ces crimes de guerre, portait un nom : les USA.
Comme beaucoup, j’ai donc pensé dans le même temps qu’il y avait en définitive une justice immanente.
Puis, à l’émotion et à la pitié, a succédé le dégoût.
Le dégoût de voir les hommes politiques de tout l’Occident se précipiter pour renouveler leur allégeance à Washington, d’entendre l’immédiate offensive américanolâtre des médias, de lire sous la plume des journalistes les plus plats serments de fidélité indéfectible à leur maître véritable, de nous voir porter un deuil national que nous n’avions jamais accordé précédemment à nos propres nationaux.
Le dégoût de voir soudain ceux qui ont créé le Golem islamiste – en faisant former Bin Laden par la CIA, en favorisant les fondamentalistes musulmans pour contrer l’OLP ou les régimes progressistes arabes, en permettant la victoire des moudjahidins en Afghanistan, en armant l’UCK au Kossovo, etc. – vouloir tout d’un coup nous utiliser comme supplétifs dans une guerre contre leur « créature ».
Ensuite, il y a eu le sentiment de révolte face à l’intervention en Afghanistan. Non pas que je me sois senti solidaire le moins du monde avec l’obscurantisme talibanesque. Mais la ficelle était si grosse ! L’émotion mondialement médiatisée couvrait une manoeuvre géopolitique si évidente qu’il était inimaginable que le gouvernement français puisse s’y associer.
Si le 11 septembre a bien été un événement d’une ampleur et d’une nature sans précédent, c’est parce qu’il a été un coup d’Etat mondial. Les USA qui ignorent désormais toute loi internationale et ne respectent plus aucun traité, se sont arrogés le droit de bombarder et de débarquer militairement là ou ça leur chante (là où il y a du pétrole). Ils se sont, grâce à des « attentats » qui sont une somme incroyable de bizarreries (relevées par Emmanuel Ratier, Thierry Meyssan et bien d’autres journalistes réellement indépendants), emparés de positions stratégiques capitales en Asie centrale.
Maintenant, on commémore l’anniversaire du 11 septembre. On met le monde occidental en condition. Dans le même temps du matériel est prépositionné dans le Golfe persique et au Moyen-Orient, des cargos sont réquisitionnés pour faire du transport militaire entre les USA et la péninsule arabique, des troupes s’entraînent aux USA à la guerre urbaine, des pressions inhabituelles ont lieu sur les dirigeants de l’Arabie saoudite, etc.
Les larmes du souvenir pourraient bien avoir une fonction : nous obscurcir la vue... et permettre aux USA d’intervenir en toute impunité contre l’Irak et d’y occuper d’autres positions stratégiques capitales.
Tel est le visage de la mondialisation : la planète entière est devenue le territoire de racket d’une association de malfaiteurs liant les intérêts du capitalisme anglo-saxon à ceux du lobby militariste de Washington.
Pour la liberté du monde et pour sauvegarder la paix, nous ne répéterons jamais assez : « Delenda Carthago »...
Nous savons tous qui est la nouvelle Carthage...
Christian Bouchet
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