Le préfet Dermouche et moi
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10/03/04 |
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10.43 t.u. |
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Christian Bouchet |
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On se souviendra que Aïssa Dermouche, directeur d’une école de commerce à Nantes a été fort médiatiquement nommé, à l’automne 2003, préfet du Jura. Il devait être un symbole d’intégration puisqu’il était présenté, au choix, comme le premier préfet issu de l’immigration ou de la communauté musulmane...
La fête avait été un peu gâtée par une série de bombinettes, visant sa voiture, son école, le lycée de ses fils, etc.
La justice explora successivement la piste familiale (on découvrit alors que les rapports dans la famille Dermouche étaient pour le moins compliqués et conflictuels) et la piste étudiante. Hier mardi, ce fut le tour de la « piste d’extrême-droite ».
Cela m’a valu une perquisition aux aurores et six heures de garde à vue.
Je n’étais pas le seul à connaître ce désagrément puisque deux cadres de l’Action française, un catholique intégriste père de six enfants et une demi douzaine de skinheads et hooligans bretons avaient connu le même réveil brutal.
L’ensemble fut à la limite du surréaliste.
Fouiller ma demeure pour y trouver des explosifs - ou des recettes pour en réaliser - trois mois après un attentat, revient à me considérer comme un débile profond (quet « terroriste » même débutant pourrait être assez stupide pour conserver des preuves de ses attentats chez lui ?) . Mais, vu les questions auxquelles j’ai du répondre durant l’interrogatoire, j’ai eu à mon tour un très fort doute sur le niveau d’intelligence, et de culture, de la police française.
J’ai du en effet dire si je connaissais la Restauration nationale, ce que je pensais des rapports entre l’Action française et les autonomistes bretons d’extrême-droite, ce que moi-même je pensais de ces courants, si j’assistais parfois à des match de foot (véridique !), etc. Aucune question n’a réellement concerné les faits et pour la plupart mes réponses furent pour le moins brèves et laconiques puisqu’elles traitaient de courants politiques dont je suis aux antipodes et dont je ne connais rien ou presque,.
Or le policier qui m’interrogeait suivait un cadre d’interrogatoire qui lui avait été remis par ses supérieurs. Soit ce document avait été rédigé préalablement par les RG et c’est alors particulièrement inquiétant pour leur niveau d’analyse, soit ils ne l’avaient pas fait et l’on se demande alors à quoi ils servent...
J’ai donc, tout comme huit autre citoyens, perdu une demie journée pour rien Comme il a eu trois policiers pour s’occuper de chacun de nous, cela fait vingt-sept fonctionnaires qui ont été mobilisés pour rien pendant la même période.
Tout cela pour rien ? Cela n’est pas si sûr.
En effet, la presse avait été prévenue (elle ne l’avait pas été lors des arrestations dans les pistes familiales et étudiantes) et nous n’avions pas été menottés. De ce fait rien m’empêchait les journaleux (il y en avait une quinzaine) de nous filmer et de nous photographier (ce que la loi leur aurait interdit de faire si nous avions eu les menottes aux poignets). Cela a donc permis que tous les grands médias en parlent d’abondance et qu’il y ait des reportages aux JT de la mi-journée, du soir et de la nuit. Il y a deux avantages à cela. Faire croire que notre gouvernement s’occupe encore de cette affaire et surtout y attacher un parfum d’extrême-droite ce qui est bien utile en cette période électorale.
Ceci explique sans doute tout ce qui précède. Il n’était pas utile de faire une enquête préalable pour savoir qui perquisitionner, ils suffisait de visiter quelques têtes connues indépendamment de leur idéologie. Il n’était pas utile de leur poser des questions pertinentes puisqu’on savait très bien qu’ils n’y étaient pour rien.
La seule chose importante était ce qui passerait dans les médias. Voilà comment on nous manipule ou on tente de le faire.
Christian Bouchet
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