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L'Amblimore antifasciste ou l’extrême-gauche pro-américaine
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22/12/03 |
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15.38 t.u. |
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Claudio Mutti |
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La dépendance économique des partis antifascistes du CLNAI vis à vis du haut commandement anglo-américains fut formalisée par un document de cinq pages rédigé en anglais, les Protocoles de Rome, qui fut signé le 7 décembre 1944 par le général britannique Henry Maitland Wilson, commandant général allié en Méditerranée et par les chefs antifascistes : Alfredo Pizzoni (Pietro Longhi), Ferrucio Parri (Maurizio), Giancarlo Pajetta (Mare), Edgardo Sogno (Mauri).
Les partisans s'engageaient à exécuter, au cours du conflit, tous les ordres des Alliés; ils s'engageaient à nommer comme chef militaire du Corps des volontaires de la liberté un officier agréé par les Anglo-américains ; ils s'engageaient à exécuter n'importe quel ordre que leur donneraient les Anglo-américains après la libération du territoire italien. Et le CLNAI, en contre partie, fut reconnu par les Anglo-américains comme le seul gouvernement, de fait et de droit ,de l'Italie du Nord.
Au point 5 du document fut établi en ces termes le financement destiné aux activités antifascistes : « Pendant la période d'occupation ennemie dans le nord de l'Italie toute assistance sera donnée au CLNAI, en commun avec toutes les organisations antifascistes, pour satisfaire les besoins de leurs membres qui sont engagés dans l'opposition à l'ennemi dans les territoires occupés. Une contribution mensuelle n'excédant pas cent soixante millions de lire sera faite par le Commandant suprême allié pour couvrir les dépenses du CLNAI et de toutes les autres organisations anti-fascistes ».
Traduit en bon français cela signifie que les impérialistes atlantiques allouaient un financement mensuel de cent soixante millions de lire (valeur d'alors) à leurs collaborateurs antifascistes !...
Les Protocoles de Rome stipulaient donc que le Comitato di Liberazione Nazionale Alta Italia subordonnait formellement le mouvement des partisans à la stratégie militaire anglo-américaine et le mettait, comme l'écrivit un auteur communiste « sous la dépendance directe des alliés », tandis que le Commandement des volontaires de la liberté était reconnu comme l’exécuteur des ordres du commandement en chef allié.
Déjà avant les Protocoles, les « patriotes » s'étaient mis au service du « libérateur », la preuve en est que le général Alexander leur avait ordonné : « Tuez les Allemands, mais de manière à pouvoir fuir rapidement et à recommencer à en tuer. (…) Les groupes de patriotes de l'Italie du Nord doivent détruirent les lignes ferroviaires et si possible téléphoniques, et faire dérailler les trains. Détruisez les installations télégraphiques et téléphoniques ».
Mais laissons la parole à Renzo de Felice : « Les accords de Rome apportèrent à la Résistance cent soixante millions. Ce fut le salut. Et Harold Mac Millan, responsable en titre de la politique anglaise en Méditerranée, put écrire dans ses mémoires le commentaire féroce et satisfait : "Qui paie l’orchestre décide de la danse" ». « Pour la Résistance, il était impossible de rompre avec les Alliés, cela aurait été une catastrophe économique (le même Parri dans son Memoriale sull’unita della Resistenza, écrit en 1972, précise que cette rupture aurait abouti à " fermer boutique") ». « Les Alliés savaient qu'ils avaient en main les meilleures cartes : la force militaire et les aides économiques. Si pour entretenir un partisan, à la fin de 1943, il fallait mille lires, aux débuts de 1945 il en coûtait trois mille, voire huit mille dans les zones où la vie était plus chère. Pour tout dire la question économique était devenue politique. Une armée aussi grande ne pouvait plus s'autofinancer : les réquisitions, les taxations forcées, les coups de main pour le ravitaillement, en d’autre termes la rapine, le grand banditisme, les vols, compromettaient, dans ce long hiver de 1944, l'image même du mouvement résistant. Continuer aurait été catastrophique en terme de résultats. Il fallait rationaliser le système de financement au delà des subventions des industriels et des aides des services secrets anglais et américains. Ceci fut le chef d'œuvre de Pizzoni. L'argent des Alliés arrivait à Milan par le Sud passant par la Suisse ».
En 1944, devant le spectacle d'une extrême gauche stipendié par les Anglo-américains, le fasciste républicain Stanis Ruinas s’adressa ainsi à un de ses vieux amis, qui du fascisme antibourgeois avait abouti au communisme : « Au risque de passer pour un ingénu, il confessa de ne pas comprendre comment des hommes qui se proclamaient révolutionnaires, socialistes, communistes, anarchistes - et qui pour leurs idéaux avaient souffert l'exil, pouvaient applaudir l'Angleterre ploutocratique et l'Amérique des trusts qui au nom de la démocratie et de la liberté démocratique dévastaient l'Europe. "J'entrevois à l'avance ta réponse. Comme révolutionnaire tu n'aime pas Hitler et tu n'as pas confiance en Mussolini. Et ça va. Mais comment fais-tu pour avoir confiance dans l'Angleterre impérialiste qui a trahi la Perse, écrasé la République boër, opprimée pendant tant de temps l'Inde et l'Egypte et s'arroge le droit de protéger et de diriger tant de peuple digne de la liberté ? (…) Comment fais-tu pour concilier tes idéaux révolutionnaires avec ceux de Churchill et de Roosevelt?" ».
Grâce à Dieu, bien vite le Maréchal Staline contraignit ces « hommes qui se proclamaient révolutionnaires » à renier leur confiance dans « l'Angleterre ploutocratique » et dans « l'Amérique des trusts ». Mais ceux-ci ont des enfants et des petits-enfants, qui aujourd'hui montent en chaire pour donner des leçons d'anti-impérialiste, pour exiger des témoignages et pour imposer des préjugés, pour repousser, indignés, toutes hypothèses de front commun avec les néo-fascistes vrais ou présumés. Ces enfants et petits-enfants feraient bien d'étudier l'histoire de leur famille et d’y réfléchir, s’ils ne veulent pas décréter la damnatio memoriae pour leurs aïeux qui durant une certaine période ont exécuté la musique choisie par ceux qui les payaient en dollars et en livres sterling.
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