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:::::::: histoire :: allemagne ::

Éléments pour une biographie politique d’Ernst Jünger

15/07/02 18.04 t.u.
Frédéric Kisters



Dans plusieurs oeuvres de JÜNGER, nous trouvons l’opposition entre deux forces contradictoires et le recours à une tierce puissance qui transcendent les deux premières. Les deux frères de « Falaises de marbre » affrontent le Grand Forestier, puis se réfugient chez leurs anciens adversaires d’Alta-Plana. Dans « Der Friede », l’Etat totalitaire et l’Etat libéral engendrent l’Empire. A Héliopolis, la lutte entre le Proconsul et le Bailli est dépassée par le recours au Régent. Avec « Eumeswil », le conflit semble neutralisé. Il existe bien une opposition au Condor, incarnée par les libéraux, mais ils ne sont que de vains bavards réfugiés dans les caves de la ville. Quant à l’Anarque, il ne ressent pas le besoin de lutter contre la souveraineté, puisqu’il y participe à sa manière.

LES HARCELEURS

JÜNGER nommait « Verfolger » (= traqueur, persécuteur), les professionnels de la presse à scandale. Ces individus le poursuivirent jusqu’à la fin de sa vie, mais il ne leur accordait guère d’importance.

En 1983, les autorités allemandes organisèrent une réception pour lui remettre le prix Goethe. Les Verts vinrent alors vitupérer dans la rue contre l’écrivain, parce qu’il l’assimilait à une relique d’un passé honni. Alors que, JÜNGER s’était intéressé dès le début des Années ‘60 aux problèmes de l’écologie et que nombre d’anciens nationaux-révolutionnaires dont A. Paul WEBER, militaient dans les rangs des « Grünen ».

Le 6 juin 1994, le « DER SPIEGEL » publiait une lettre censée « prouver » que le « Merline » des « Journaux de guerre » n’était autre que CELINE. En réalité, il s’agissait d’un secret de polichinelle, éventé depuis fort longtemps. En effet, le nom de CELINE apparaissait déjà en toutes lettres dans la traduction française du « Journal de Guerre ». Son biographe, BANINE avait en effet traduit le surnom à l’insu de l’auteur. Furieux, CELINE intenta un procès en diffamation à JÜNGER. Notons que JÜNGER supprima les passages qui concernaient CELINE dans les éditions ultérieures. Nous ne savons s’il voulait effacer de son oeuvre le personnage, éviter un nouveau procès ou rendre son journal moins touffu comme lui demandait son éditeur.

Dans l’édition du 18 novembre 1993 de « DIE WOCHE », le journaliste Victor FARIAS, fort connu en Allemagne pour ses diatribes contre HEIDEGGER, accusait Ernst JÜNGER d’avoir écrit un article antisémite, dans les Années ‘30. Le folliculaire affirmait que JÜNGER ne s’était jamais départi de ses sympathies nazies et avait même souhaité le génocide des Juifs ! En réalité, il s’agissait d’un article que Ernst JÜNGER avait publié dans les « Suddeutschen Monats Heften » en 1930, dans le cadre d’un dossier qui traitait du problème de la judaïté. La plupart des autres rédacteurs étaient d’ailleurs juifs. De façon insidieuse, FARIAS n’avait pas précisé dans quelle revue ni dans quelles circonstances l’article de JÜNGER avait été publié, ce qui laissait le lecteur supposer qu’il s’agissait d’un périodique nazi ou antisémite. Dans sa contribution, JÜNGER se prononçait pour l’assimilation des Juifs d’Allemagne et concluait qu’ils devaient « être juifs en Allemagne ou ne pas être », formule qui, même interprétée avec beaucoup de mauvaise foi, ne signifiait aucunement qu’il désirait l’extermination des Juifs !

CONSTANCE

Entre les deux guerres, JÜNGER s'était lancé à corps perdu dans la politique. A cent ans, lors d’un entretien en 1994, JÜNGER déclara, à propos d’HEIDEGGER, que l’écrivain devait prendre ses distances par rapport à la politique, afin de ne pas se laisser contaminer. Dégoût, lassitude ou prise de distance ?

Nombre de critiques distinguent deux JÜNGER, celui de l’engagement politique et celui de l’« émigration intérieure », comme si une brusque rupture avait scindé sa vie en deux morceaux. Nous voulons au contraire souligner la continuité de sa pensée. Certes, elle a connu une longue évolution qui le mène de l’engagement total du soldat et du politique, jusqu’au détachement presque absolu. Pourtant, nous discernons plusieurs caractéristiques constantes du personnage.

D’abord, le recours au rêve et au voyage. Un lien étroit unit le Wandervögel qui parcourait les champs au vieux sage qui se livrait aux chasses subtiles. Durant toute son existence, il s’évada dans le domaine des songes. Sa quête le conduit même aux paradis artificiels des drogues. Son oeuvre est emplie de notations oniriques et certains textes sont inspirés par des rêves. A plus de cent ans, son émerveillement devant le monde était intact, ainsi que l’atteste le doux sourire qu’il arbore en se penchant sur ses chers insectes.

Son éthique aristocratique a traversé le siècle. Malgré les épreuves et les blessures, dont la plus cruelle fut la perte de son fils Ernstel, il conserva sa rigueur morale et sa liberté d’esprit. Il resta toujours l’« anarchiste prussien » Malheureusement, l’aspiration à la pureté et l’esprit d’indépendance, poussés si loin, interdisent souvent l’action pratique et politique.

Ami fidèle, il n’abandonna pas NIEKISCH, ni HEIDEGGER, bien qu’il n’approuvât pas les choix politiques de ce dernier. Ayant horreur de la démocratie parlementaire, il énonça sa pensée en refusant la polémique verbale. Esprit libre, il refusa toute sujétion ou allégeance à un parti ou à un régime. Anti-bourgeois, il développa sa personnalité au détriment de l’individualisme.

La rencontre avec la technique, force ambivalente, à la fois créatrice et destructrice, marqua toute son oeuvre, d’« Orages d’acier » à « Eumeswil ». Le soldat l’affronta sur les champs de bataille, le Travailleur voulut la dompter, le Rebelle la méprisait, finalement l’Anarque l’utilise, au moyen du Luminar, pour boucler l’Eternel Retour.
Depuis sa jeunesse, il conserva l’attitude détachée qui fait de lui un figure hiératique. L’observateur impassible qui contemple les orages d’acier est le même qui observe le Condor. Pourtant, il participait aux événements, mais son retrait lui permettait peut être de se préserver de leur violence. Sa propre douleur devient sujet d’étude, lorsque, au soir de la mort d’Ernstel, il écrit « Je me demande ce qui pourrait encore m’atteindre ».

Que dire de plus, sinon que, sans de tels hommes, l’Humanité n’éprouverait plus aucun respect pour elle-même.

Frédéric KISTERS

TRAVAUX CONSULTES

BANINE (Umm El), Ernst JÜNGER aux faces multiples, Lausanne, 1989, 213 p.
BRUDER (Lou), Une entrée en matière, dans Magazine littéraire, n° 324, 1994, p. 48-50
DE BENOIST (Alain), Ernst JÜNGER : la figure du travailleur entre les dieux et les titans, dans Nouvelle Ecole, 40, 1983, p.11-61
DE BENOIST (Alain), Ernst JÜNGER. Une bio-bibliographie, Paris, 1997, 186 p.
DUPEUX (LOUIS), National-bolchevisme dans l’Allemagne de Weimar (1919-1933), Paris, 1979, VII-743 p. en 2 tomes
HERVIER (Julien), Ernst JÜNGER et la question de la modernité, dans La Révolution conservatrice dans l’Allemagne de Weimar, dir Louis DUPEUX, Paris, 1992, p. 61-73
HERVIER (Julien), Nazisme et littérature : les figures du mal dans l’oeuvre romanesque de Ernst JÜNGER, dans La révolution conservatrice dans l’Allemagne de Weimar, dir Louis DUPEUX, Paris, 1992, p. 353-359
HERVIER (Julien), Deux individus contre l’Histoire. DRIEU LA ROCHELLE. Ernst JÜNGER, s.l., 1978, 485 p.
HERVIER (Julien), Le grand tournant, dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 37-40
JÜNGER (Ernst), Leipzig, dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 52-58
KALTENBRUNNER (Gerd Claus), Ernst JÜNGER : une existence mythique, dans Nouvelle Ecole, 48, 1996, p. 20-25
MÖHLER (Armin), La révolution conservatrice en Allemagne (1918-1932), Puiseaux, 1993
MÖHLER (Armin), Le cas Ernst JÜNGER (1961), dans Nouvelle Ecole, 48, 1996, p. 43-47
PALMIER (Jean-Michel), Weimar en exil. Le destin de l’émigration intellectuelle allemande antinazie en Europe et aux Etats-Unis, Paris, 1988, 2 tomes
PALMIER (Jean-Michel), Le chasseur de cicindèles, dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 40-45
PLARD (Henri), Une oeuvre retrouvée d’Ernst JÜNGER : Sturm, dans Etudes germaniques, 23e a., 1968, n° 4, p. 600-615
PONCET (François), L’archipel jüngérien, dans Nouvelle Ecole, 48, 1996, p. 26-30
RIHOIT (Xavier), Un réquisitoire contre l’esprit bourgeois, dans Eléments, 70, 1991, p. 39-41
ROZET (Isabelle), Un destin allemand dans Enquêtes sur l’histoire, 20, 1997, p. 16-18
SAATDJAN (Dominique), Heidegger : une lecture du Travailleur, dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 45-47
SAGNES (Nora) et TOWARNICKI (Frédéric), Chronologie (de Ernst JÜNGER), dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 28-33
SAN CHEZ PASCUAL (Andrés), Entretien avec Ernst JÜNGER (1995), dans Nouvelle Ecole, 48, 1996, p. 14-19
SCHWARZ (Theodor), Irrationalisme et humanisme. Critique d’une idéologie impérialiste, Lausanne, 1993, 131 p. (traduction de Irrationalismus und Humanismus. Kritik einer imperialischen Ideologie, Zurich-New York, 1944)
TOWARNICKI (Frédéric), « J’ai l’habitude d’être suspect », dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 22-27
VENNER (Dominique), La figure même de l’Européen, dans Eléments, 83, p. 38-41
WALTER (Georges), Visite à Wilflingen (1976), dans Magazine littéraire, 324, 1994, p. 34-37
WANGHEN (Pierre), JÜNGER et la France, dans Nouvelle Ecole, 48, 1996, p. 31-42

Notes :

1 - Remarquons que, tout au long de sa vie, Ernst JÜNGER remit ses textes sur le métier.
2 - « Sur les falaises de marbre », XXVII.
3 - Idem, XI
4 - Selon le syllogisme tronqué : les nazis ont puisé dans les textes de NIETZSCHE et JÜNGER, donc NIETZSCHE et JÜNGER sont des nazis...
5 - Discours de réception à l’Escurial, 3 juillet 1995.
6 - « Le traité du Rebelle », XII
7 -« Eumeswil » est un jeu de mot subtil, signifiant à la fois la ville et la volonté, l’aspiration ou le souhait (= wil) d’Eumène, général d’origine grecque, qui, après la mort d’Alexandre, défendit les droits de son fils et héritier légitime contre les Diadoques.
8 -Traduction de Henri PLARD : « Eumeswil », p. 56-58 (Collection Folio, 1332)

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