Juin 2004, les bombardements médiatiques
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17/06/04 |
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4.06 t.u. |
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Roland Gaucher |
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ce fut l’avalanche, le déluge. Vous vouliez du Claire Chazal, vous en avez eu tous les jours. Vous n’en vouliez pas... Tournez le bouton : vous avez eu jour après jour, pendant une bonne semaine, les images sélectionnées du débarquement en Normandie. Et puis les bécots des vedettes politiques : le bouche (de Chirac) à Busch ; une autre étreinte entre le premier et Schroeder.
Mais curieusement, pas de copulation entre notre président de la république et Tony Blair, qui n’a pas jugé utile de se déplacer pour cet anniversaire solennel.
Pourquoi ? A ma connaissance, la question n’a été posée nulle part. Pourtant, le débarquement n’a pas été un phénomène purement américain, mais aussi britannique. Autre question : la célébration délirant de ce débarquement a été attendue soixante ans avant d’être évoquée avec ce luxe de moyens.
A mon avis, il y a deux types d’explications :
Beaucoup de gens sont morts. Autant de témoins qui ne vont pas se dresser pour dire aux bons apôtres : « Arrêtez de débloquer. Les choses ne se sont pas tout à fait passées ainsi. » Marianne est un hebdomadaire pour lequel je n’ai aucune sympathie, mais qui est bien fait. Je renvoie le lecteur à son numéro du 7 juin. On y trouvera deux articles : « Le débarquement anglo-américain vu d’en face », par Paul Carell, historien allemand, et « De Gaulle et le D-Day, l’histoire d’un désaccord radical ».
A ce propos, quand de Gaulle met le pied en Normandie, il n’est pas chaleureusement accueilli par la population. Cela s’explique : cette population vient d’être victime de bombardements entraînant des dizaines de milliers de morts. Elle ne baigne pas dans la joie.
Le bécoteur Schroeder, en donnant l’accolade à Chi-Chi, aurait pu lui dire : « Oublions nos dizaines de milliers de morts. Nous, cela fait soixante ans que nous oublions les 130.000 à 150.000 victimes de la population civile de Dresde (on n’a jamais pu établir le chiffre exact) provoqués par les bombardements anglo-saxons ».
A retenir comme conséquence de ce soixantième anniversaire : Bush est réhabilité. Il est blanchi du massacre des populations civiles en Irak et des tortures immondes infligées aux prisonniers de l’armée impérialiste américaine.
Désormais, tout le monde s’en fout.
Nous venons de voir, très rapidement, l’effet des bombardements médiatiques. Ces puissances ont un effet de diabolisation. Mais elles disposent d’un autre atout, exactement inverse : l’occultation.
Je me limiterai ici à deux cas. Le régime communiste en Russie s’est disloqué au début des années 1990. Donc, depuis une quinzaine d’années, les services de renseignement occidentaux (et principalement les services américains) ont eu accès à une foule d’archives.
1 - Qu’en est-il sorti sur les camps de concentration soviétique : le nombre des internés, celui des victimes, le fonctionnement de ces camps ? Exactement rien. Qu’on fait nos chers intellos pour enquêter sur le sujet ? Rien non plus.
2 - Il est évident que les archives soviétiques regorgent de documents sur le fonctionnement de ce régime, et en particulier sur les conflits qui ont pu intervenir dans l’entourage de Staline.
Et là, c’est le même silence.
En particulier, nombre de conflits ont du surgir entre les éléments juifs du parti bolchevik et les éléments russes, ukrainiens, géorgiens, baltes, etc.
A ma connaissance, un homme qui n’est pas tout à fait un inconnu, a été le seul à aborder ce sujet, dans le tome II de son histoire de la révolution russe, un certain Soljenitsyne. Vous connaissez ?
Le Figaro le connaissait très bien puisqu’il a rendu compte de son tome I. Mais le second ? Silence. A la trappe. Tabou.
Roland Gaucher.
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