Prolétaires et criminels
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16/01/03 |
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14.22 t.u. |
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Thomas Demada |
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Bien loin de la traque de prétendues ramifications du "réseau Al-qaïda" et de la lutte contre le "fascisme vert", les peuples plient sous le joug d'un totalitarisme bien réel celui-là : le capitalisme.
Le retour en force d'une droite ultra-libérale, décomplexée et ambitieuse est pour la France et l'Europe un danger tangible et terrible, bien plus néfaste que les rêves de liberté des néo-salafistes orientaux... Car le libéralisme sauvage et cynique a lui déjà gagné.
85% des travailleurs français touchent aujourd'hui moins de 1500 euros par mois. Hors le coût moyen de la location d'un studio à Paris tourne désormais autour de 500 euros, comptons le même prix pour un F2 en province. Mais les conglomérats immobiliers qui possèdent ses appartements exigent un salaire 3 voir 4 fois supérieur au montant du loyer et ce en toute légalité. Ils exigent de plus pour tout contrat de travail hors CDI qu'un garant se porte caution...
Comment en toute probité un travailleur ne possédant aucun patrimoine et comme seuls revenus les fruits de son honnête labeur peut -il offrir à lui et aux siens un train de vie descend...
Nous sommes en train de revenir à une situation comparable à celle du XIXe, précarité et insécurité dans l'emploi, précarité et insécurité dans la famille, dans la société, dans la rue... Le comble de tout est que l'assiette fiscale qui permet la gestion de l'Etat pèse quasi-exclusivement sur ces 85%. Le déclin du monde industriel et l’ascension d'une société de services a brisé les clivages entre monde ouvrier et classe moyenne. De cette fusion est née une classe nouvelle recouvrant l'intégralité du peuple face à une minorité de plus en plus congrue d'ultra-possédants.
Un peuple homogène dont les emplois et les retraites sont soumis aux chaos de la bourse et aux sursauts des actionnaires, et qui la plupart du temps sombre avec ses entreprises. Un fossé d'incompréhension, de mépris et de haine se creuse donc entre nos gouvernants, ces oligarques, et nous. Fossé se traduisant de temps à autre par des poussées de fièvre : carnage de Richard Durn à Nanterre, affaire Brunerie... symptômes trahissant un mal plus profond et annonciateur de crises à venir.
C'est résoudre la quadrature du cercle que d'être modeste et honnête. Mieux vaut ne rien posséder que d'avoir un petit quant à soi. La petite propriété c'est la vache à lait de l'Etat libéral. Un petit propriétaire ne peut expulser un squatter, un trust immobilier lui saura brandir des hordes d'avocats voir user de moyens illégaux pour s'en débarrasser.
C'est une lapalissade de dire que le capitalisme plus qu'aucune autre doctrine économique est capable de produire des biens formidables. Mais cette aberration pressurant les corps et les esprits est incapable de répartir ses richesses. "La juste répartition des fruits de la croissance" est une invention des salons parisiens, des Fabius et des Bayrou, un grigri bourgeois et rien d'autre. Cette masse d'argent, le capitalisme ne peut la répartir car justement il a besoin des bulles spéculatives, d'hyper-concentrations de capitaux pour investir et relancer la machine. Finalement le capitalisme n'accouche que du malheur des hommes, c'est "10% de culot et 90% de vide" comme disait Céline d'un sujet autre.
La nouvelle insécurité, qui nous l'avons vu s'étend à tous les domaines de la société, de l'emploi à l'affectif, en plus d'augmenter s'est modifiée. C'est maintenant une violence des pauvres contre les pauvres, les "riches" ayant quitté depuis longtemps ses lieux de misère. Donc à côté des négriers qui les exploitent, le Peuple a aussi affaire à un autre danger : une classe criminelle vivant d'une économie parallèle, d'un capitalisme de caniveau. C'est le lumpenproletariat de Marx, une classe mercenaire et foncièrement réactionnaire prêt à se vendre au premier venu. Ce sont des squatters, des clandestins ne payant aucune charge mais occupant tout de même des emplois, des immigrés qui pratiquent des commerces illicites : petit recel, ventes de stupéfiants et bénéficiaires des prestations sociales...
Ce n'est pas une caricature xénophobe, mais comment reprocher à des migrants ne connaissant pas le principe d'Etat providence (le fameux Welfare-state) dans leurs pays de bénéficier de ses largesses. Comment reprocher à des fils de migrants, français par le ius soli, de vouloir vivre mieux et plus facilement que leurs parents, qui eux ont travaillé contre une misère et sans aucune considération.
C'est le capitalisme qui a déporté des peuples entiers, brisé des nations et crée cette mosaïque hétéroclite de communautés déboussolées et déculturées. Ce ne sont pas des islamistes qui ont mis des galères à l'eau pour conquérir l'Europe... le Capital c'est l'immigration. A l'heure de la criminalisation de la pauvreté par la loi Sarkozy et d'une prochaine disparition discrète de l'ISF, les mouvements populaires feraient mieux de s'inquiéter de ces évolutions plutôt que des "menaces terroristes".
Thomas Demada
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