voxnr
trident
site_nr_s
ttl ttr

sommaire
..::à la une
..::politique
..::étranger
..::tribune libre
..::documents

..::envoi d'articles
..::résistance::le mél
..::présentation
..::soutien
..::contactez-nous
..::les forums
..::répertoire
..::diffusion libraire
..::nos engagements
..::archives
..::recherche
..::accueil site
tbl tbr
ligne
ttl ttr

réseau
..::communiqués
..::crb : contact
..::tracts
..::affiches
..::adhérer
..::
point presse
..::site abonnés

tbl tbr
 
cbl
cbr
ligne_b    
 
ligne
 
politique
suite

Questions à Fawzia Zouari (Extraits)

10/03/03 14.42 t.u.
Association des Musulmans des Alpes Maritimes

France / Islam – Propos recueillis par Jean-François Duval

De plus en plus de jeunes femmes musulmanes choisissent de porter le voile. Le point sur cette question avec Fawzia Zouari, auteur de Le voile islamique - Histoire et actualité, du Coran à l'affaire du foulard,

Ici comme à Tunis ou au Caire, de plus en plus de jeunes femmes choisissent de remettre le voile. Pourquoi ? Essayiste et romancière née à Tunis, émigrée à Paris, Fawzia Zouari examine la question dans Le voile islamique. Histoire et actualité, du Coran à l'affaire du foulard.


Fawzia Zouari, contrairement à ce qu'on croit, depuis le début, le voile a été source de controverses dans le monde musulman lui-même ?

Oui, en terre d'Islam elle-même, le voile a toujours fait l'objet de débats infinis... D'abord, ce n'est pas l'Islam qui l'a inventé. Il existait chez les Perses, les Grecs, les Romains, les Chrétiens. Il désignait la femme de haut-rang, l'épouse légitime, la mère, c'était un signe de distinction sociale.

L'Islam n'a fait que perpétuer cette tradition, mais on ne trouve dans le Coran aucune obligation de porter le voile, juste une recommandation. Le Prophète a simplement dit à ses femmes : rabattez l'étoffe sur vous, couvrez-vous, de façon à ce que chacun puisse reconnaître que vous êtes mes épouses et que vous êtes converties. C'est devenu un signe distinctif pour toute bonne musulmane.

Qu'entend-on au juste par voile : aussi bien la burqa afghane, la voilette, le tcharchaf, le simple fichu sur la tête ?…

Dans le Coran, on ne sait pas exactement ce que les termes recouvrent quand on parle de voile : parle-t-on d'un simple tissu jeté sur l'épaule ? de quelque chose de plus important ? De plus, pendant des siècles, on a encore connu des sociétés arabo-musulmanes où les femmes ne se voilaient pas du tout.

Mais pendant la première moitié du XXe siècle, la tendance est au dévoilement…

Oui. Dès le XIXe siècle, au contact de l'Occident, était né en Égypte un mouvement de renaissance et de contestation intellectuelle, la Nahdha, qui a revendiqué une relecture des sources coraniques, et réclamé qu'on ôte le voile.

Quelques années plus tard, en 1923, la leader féministe égyptienne Hoda Charaoui jette son voile à la mer à son retour d'Italie. En 1924, Atatürk interdit le voile en Turquie. En 1935, le shah fait de même en Iran. Bon, c'était sauter à l'extrême opposé, et il aurait mieux valu, à mon avis, laisser les femmes libres de porter le voile ou pas...

Tout cela a duré jusqu'à la fin des années septante, moment où les mouvements intégristes – à commencer par celui des Frères musulmans né en Égypte dans les années cinquante, soixante – vont faire reculer ces développements. A la décolonisation avait succédé le désenchantement : on voyait des régimes corrompus accaparer les richesses, et quantité de phénomènes liés à ce qu'on appelle aujourd'hui la mondialisation. Le point culminant de ce phénomème a, bien entendu, été en 1979 la Révolution iranienne.

Si bien qu'aujourd'hui, le terme “hidjab” désigne essentiellement le voile militant islamique ?

Mais c'est un sens tout récent et complètement réducteur. Hidjab à l'origine ne désignait même pas le voile en tant que tenue vestimentaire mais signifiait " obstacle, rideau entre une chose et une autre " : entre Dieu et sa créature, entre l'homme et la femme...

Le mot s'est politisé à partir de la naissance des courants fondamentalistes, renvoyant tout à coup à la tenue des femmes militantes islamistes. Selon les mouvances, il devait dissimuler tout le visage à l'exception des yeux, ou simplement les cheveux. Bref, le terme hidjab est devenu un mot générique pour désigner le voile islamique... La même chose s'est passée avec le tchador – mot persan et non pas arabe – qui a été exporté dans tout le monde arabe à partir de l'arrivée au pouvoir de l'ayatollah Khomeiny(1).

Auparavant, au Yémen par exemple, les voiles étaient très colorés.

Le tchador a fait des ravages. Avec l'exportation de la Révolution iranienne, les mouvements intégristes ont essayé d'imposer un modèle vestimentaire qui ne fait pas du tout partie des traditions et des usages de tous les pays arabes. Au Mahgreb, où le voile traditionnel est blanc, le voile noir a été perçu dans les universités comme une aberration, une trahison identitaire !

Donc, il y a un appauvrissement de la polysémie du voile ?

Ah, tout à fait ! Une accentuation des sens politiques et sociaux, mais une perte énorme en sens profond, en histoire, en symbolique… Un adage dit que Dieu aime la beauté. Et dans son âge d'or, l'Islam était une civilisation de beauté ! Mais l'Islam des militants islamistes est devenu moche : barbes obligatoires, hideuses djellabas, voiles disgracieux…

Voyez pourtant en Andalousie – et ailleurs – les merveilles, les prouesses esthétiques réalisées par l'Islam ! C'était une civilisation dans laquelle, au XIVe siècle, on enseignait l'érotologie, la sexualité dans les mosquées !… Toute cette richesse, toute cette polysémie du voile et de l'être au monde a été réduite à quelque chose d'ascétique, de triste et de sec.

Il y avait, dans le voile, du mystère, du secret, de la séduction ?

Oui, il existe une logique de séduction interne au monde musulman, une façon d'être au monde, une scénographie du désir qui diffèrent de celle des Occidentaux. On l'observe jusque dans l'architecture : les alcôves – mot qui vient de l'arabe –, les architectures fermées, les patios, les moucharabiehs, tout ça, c'est une architecture qui fait voir et qui dissimule en même temps. Car on ne donne pas tout à voir tout de suite : il y a des surprises, un suspense, c'est-à-dire, au-delà des apparences morales, une extrême liberté de faire autre chose, en secret, derrière les murs. Le voile est aussi une manière de jouer avec les tabous et de les transgresser.

Donc vous condamnez ou vous ne condamnez pas la burqa afghane ?

Mon intention n'est ni de défendre ni de condamner, mais de comprendre. Si la couleur, le tissu de la burqa sont superbes, c'est quand même une prison ambulante ; rien dans le Coran, je le répète, ne pousse à ces grillages qu'on met devant les yeux des femmes, déformant leur vision du monde. C'est une aberration masculine, une hérésie !…

D'un autre côté, on ne peut ignorer qu'il y a là, en même temps, des siècles de traditions impossibles à balayer d'un coup ! Dans les campagnes des pays arabo-musulmans, la majorité des femmes continue à porter le voile traditionnel sans que cela ait la moindre connotation politique.

Avec les événements du 11 septembre, le voile tend à devenir un symbole d'intégrisme…

Pour les Occidentaux, derrière toute femme voilée, il y a désormais la menace d'une bombe prête à exploser... Or, il faudrait absolument ne pas confondre Islam avec islamisme. On a oublié que le voile d'une Benazir Bhutto, par exemple, ne posait aucune problème à l'Occident...

Aujourd'hui, vous dites que le voile peut paradoxalement être celui de la femme-individu...

C'est ce que j'appelle le voile volontaire. Son port peut certes être politique – pour des étudiantes des universités du Caire ou de Tunis, il marque alors un signe d'affiliation aux mouvements des étudiants fondamentalistes.

Mais ce peut être aussi un signe identitaire : vous avez alors affaire à des jeunes filles pour lesquelles mettre le voile équivaut à arborer un autre voile, moderne, assumé, un voile anti-tradition, dont même la découpe est différente, et qu'il faut soigneusement distinguer du voile traditionnel de leurs grand-mères.

En somme, un signe de libération comme la minijupe pour les Occidentales dans les sixties ?…

Tout à fait. Mais comme la minijupe, cela ne reste qu'un signe extérieur auquel il ne faudrait pas s'arrêter, qui ne dit rien sur le degré de libération intérieure…

Les jeunes beurettes portent le voile en même temps que jeans et baskets…

Ces filles vous disent : ce n'est pas parce que mes cheveux sont couverts que je ne suis pas moderne. C'est pour elles un choix assumé. Cela dit, il peut arriver que dans les banlieues françaises, un frère exerce sur sa sœur une pression pour qu'elle porte le voile – parce que lui adhère à une idéologie fondamentaliste...

Le voile aurait aujourd'hui une fonction de visibilité ? Paradoxal !

Une fonction de visibilité dans l'espace publique, oui. Ces femmes disent : voilà, nous existons, nous sommes des femmes-invididus, nous jouons un rôle dans la cité, ce n'est pas parce que nous sommes voilées que nous n'avons pas de revendications comparables à celles des féministes occidentales des années soixante.

Finalement, on le porte pour des motivations très diverses...

Certainement. Vous avez le voile qui est une pure commodité urbaine, une façon de se déplacer en ville sans trop d'apprêts : pour aller au hammam, faire une course… Vous avez le voile aguicheur, pour se rendre à un rendez-vous galant… Ou, en Égypte, le voile dont se couvrent de plus en plus d'étudiantes pour trouver plus facilement un mari parce que les hommes sont à la recherche de femmes rangées...

En Irak, avec l'embargo, les femmes n'ont plus d'argent, et donc plus de toilettes à montrer : le voile permet de dissimuler son degré de dénuement…

Beaucoup de jeunes Algériennes le portent simplement pour avoir la paix, pour ne pas être importunées par le regard des hommes. Même chose dans le métro du Caire.

Ce que je veux dire, c'est que le voile volontaire ne signifie pas un alignement sur les idées intégristes : porter le voile peut être une revendication féministe, une façon d'affirmer qu'on veut avoir son mot à dire dans la cité, en tant que femme et loin de la tutelle des hommes.

Mais ces féministes-là ne font-elles pas le jeu des intégristes ?

Là est le piège dans lequel il faudrait ne pas tomber.

Quelque part, en effet, existe ce risque d'une récupération par les fondamentalistes, profitant du fait que les Occidentaux sont prompts à faire la confusion, par méconnaissance...

Note

(1) Une correction, concernant l’Iran : Il est inexact de faire du tchador une obligation vestimentaire, en… RI d’Iran en tout cas. La législation actuelle (rappelons-nous que l’Iran est une démocratie islamique et parlementaire et que ce sont les députés qu votent les lois) ne spécifie que de se voiler. Le port du tchador, cape et voile à la fois, est strictement facultatif. Pour qui connaît la rue iranienne, l’aspect général (contrairement au “tri” des images effectués par des media américanolâtres) est assez coloré et dépend aussi de la… mode. Ainsi d’une année à l’autre la couleur “tendance” du voile peut être le rouge, voire même le… noir ! En fait, la phrase " un autre voile, moderne, assumé, un voile anti-tradition, dont même la découpe est différente ", s’applique assez à cet Iran islamique où les Iraniennes ont un accès égal à l’éducation. Quant à l’emploi, de nombreux secteurs appliquent l’égalité des salaires…


Le voile islamique - Histoire et actualité, du Coran à l'affaire du foulard , Editions Favre.

© Association des Musulmans des Alpes Maritimes http://amam-online.org/article.php3?id_article=73.

 
lgne
derniers_titres
ttl ttr

dot
15/01/05
..::Propos clairvoyants de l'évêque de Bâle
Par rapport aux craintes qui règnent dans la société, le problème n'est pas la force...::..
Agence télégraphique suisse

dot
15/01/05
..::La « Constitution » européenne contre les droits sociaux
Nous le constatons d’année en année, dans tous les pays, la politique impulsée par l’Union...::..
Jean Duverne

dot
09/01/05
..::Immigration et pédophilie
On a jugé récemment dans l'Est de la France, neuf jeunes gens qui avaient mené une campagne...::..
Correspondant

tbl tbr
accueil_rubrique
imprimer
envoyer
haut
    cbl cbr