La victoire de Trump n’aura surpris ou choqué que ceux qui ignorent tout de la société américaine, et ils sont légion en France comme en témoignent les réactions d’un bout à l’autre du « spectre idéologique » ; de l’extrême gauche à l’extrême droite cette victoire du conservatisme réel (et non du néo conservatisme qui lui est en réalité opposé) est tantôt analysée en terme de lutte des classes, tantôt de conflit de race…ceux qui se réjouissent de la nouvelle présidence américaine partagent le plus souvent les mêmes erreurs que les pleurnichards qui auraient souhaité voir la première puissance mondiale tomber entre les mains de l’hystérique Clinton et de ses commanditaires lobbyistes et financiers.
Bien des français projettent ainsi leurs désirs propres sur le résultat de cette élection, adoptant une grille de lecture strictement européenne dans un cadre qui ne s’y prête guère: la victoire de Trump n’est pas celle d’une classe ou d’une race, mais fait suite à une profonde remise en question du mode de vie américain par les magistratures des dernières décennies. En tant que nation récente, le peuple américain semble avoir conservé ses réflexes d’autodéfense lorsqu’il se sent véritablement menacé. Ce sont les racines philosophiques américaines qui ont été attaquées aussi bien par l’administration républicaine néo-conservatrice que par les démocrates libéraux-sociaux au cours de la dernière décennie, si bien que l’Amérique se soit aujourd’hui tournée vers un patriotisme paléo-conservateur, un courant américain à proprement parler1. La victoire de Trump ce n’est donc pas simplement celle des « ouvriers blancs », mais celle également des agriculteurs, des entrepreneurs, des professions libérales, des militaires et vétérans, toutes races confondues.
Les changements pour les états-unis sont dores et déjà perceptibles au travers de mesures dont la portée est aussi bien pratique que symbolique: nominations de personnalités « radicales », mesures destinées à accroitre l’emprise de l’administration politique sur la réserve fédérale2 – aujourd’hui émancipée du politique et entre les mains de quelques individus – retour des grandes entreprises autrefois délocalisées sur le sol américain3.
Mais cette élection aura de profondes répercussions sur la France et l’Europe, obligeant les différents courants politiques – tout du moins ceux qui cultivent encore une véritable vision du monde – à réviser leur positionnement quant aux états-unis. L’anti-américanisme radical semble ainsi ne plus être de mise dans la mesure où le conservatisme de Donald Trump n’est pas seulement protectionniste mais tend vers un certain isolationnisme, puisqu’il implique l’arrêt de la politique interventionniste qui fut celle des gouvernements précédents4. C’est cet interventionnisme que partagent les démocrates et les républicains néo-cons qui est comme chacun sait à l’origine aussi bien du chaos au moyen orient que de la destruction des Balkans, et plus récemment de la déstabilisation en Ukraine.
Nous ne considérerons pas ici l’anti-américanisme gauchisant qui ne correspond qu’à un réflexe de haine à l’égard d’un pays puissant ayant la volonté de le rester, quand ce qu’il convient malheureusement d’appeler « l’idéologie française » cultive la petitesse, la castration et le masochisme. Cet anti américanisme souvent très pédant qui ne rate jamais l’occasion de brandir pour sa défense « l’exception française » ou le « modèle social français » (concepts aujourd’hui caduques car battus en brèche par la réalité) cache sa faiblesse derrière le mépris et est aujourd’hui aussi bien le fait de la gauche – bien entendu – que de la droite et plus encore l’extrême droite.
Quoi qu’il en soit après le Brexit, et de concert avec la politique néo-impériale de Poutine en Eurasie, l’accès de Donald Trump à la magistrature suprême des états-unis vient porter un coup dur au cœur de l’idéologie mondialiste et de ses dogmes. Il ne reste désormais plus que l’Union Européenne pour défendre corps et âme l’utopie de la « gouvernance mondiale »…avec pour capitale Jerusalem, comme aurait ajouté Jacques Attali.
Malheureusement la France est aujourd’hui le fer de lance de l’ensemble des dogmes globalistes et anti civilisationnels, se jetant de manière automatique et pathologique sur tous les projets et idées pouvant aggraver ses blessures. La France est aujourd’hui une lépreuse mourante se délectant de ses plaies…
Le courant NR s’était employée au cours des dernières décennies à dénoncer le fameux axe Washington-Tel Aviv auquel la quasi totalité des mouvements politiques de l’extrême droite à l’extrême gauche tendent toujours plus à se rallier, ainsi que la mise sous tutelle des gouvernements occidentaux par les lobbies communautaires. Là encore la France est aujourd’hui la nation la plus zélée en termes de soumission au communautarisme, phénomène observable non seulement dans les relations internationales tant l’alignement de la France sur les intérêts israéliens est frappant, mais également en matière de politique intérieure comme l’a récemment illustré l’affaire Poisson, qui a vu un candidat aux primaires de droite ramper aux pieds d’un député israélo-français pour avoir simplement évoqué la proximité de Clinton avec les lobbies sionistes5…
Changement de Weltanschuung donc puisque nous pouvons (et devons!) hélas parler aujourd’hui d’un véritable axe Paris-Tel Aviv, nouvelle réalité géopolitique qui fait face outre atlantique à un détachement, voir une certaine défiance du nouveau pouvoir en place vis à vis du traditionnel allié israélien6 ; Hillary Clinton s’était ainsi attaquée à la neutralité de Trump vis à vis d’Israël dans l’un de ses discours devant l’AIPAC en mars dernier7.
Alors que nous appelions depuis des années et de tous nos vœux la naissance d’un axe Paris-Berlin-Moscou, c’est à l’avènement d’un axe Washington-Moscou auquel nous assistons à la grande surprise générale.
Hors il est impératif de ne pas abandonner ce projet qui doit constituer demain l’armature d’un véritable bloc eurasiatique, au sein duquel la France doit jouer un rôle prédominant ; il ne s’agit pas là d’une rêverie idéaliste propre au nationalisme révolutionnaire ou aux rejetons philosophiques de la révolution conservatrice car n’oublions pas que Jacques Chirac lui même, alors qu’il était président de la République, souhaitait œuvrer dans cette direction8.
A l’approche des élections présidentielles en France nous devons désormais porter un regard nouveau sur des lignes idéologiques en mouvement, ne pas raisonner uniquement en terme de politique intérieure mais incorporer à nos réflexions les différents projets européens et internationaux proposés par les différents mouvements et partis. Exemple de fait marquant, le FN ne constitue plus une ligne de démarcation entre les ennemis du système en place et ses partisans ; celui incarne aujourd’hui sur le plan politique une droite dure – autant qu’aurait pu l’être le RPR des années 80 pour ceux qui se rappellent du « bruit et des odeurs » de Chirac9 et des prises de position musclées d’un Pasqua – qui dans le domaine économique flirte avec les classiques de la gauche.
La victoire écrasante de François Fillon – là encore en opposition totale aux prévisions médiatiques françaises, comme ce fut le cas avec Donald Trump – aux primaires de la droite semble relancer l’idée d’un rapprochement franco-russe10, suscitant un déchaînement politico-médiatique contre le futur candidat des républicains accusé d’être « conservateur », « rétrograde » ou « traditionnaliste » aussi bien par les figure de gauche que de droite. À l’inverse du côté de la droite dure, le maire d’Orange Jacques Bompard entend voter pour Fillon au second tour des primaires11…
Dans une optique de stratégie politique réelle destinée à faire sortir la France de sa spirale auto-destructrice pilotée par les « élites » mondialo-gauchistes, le choix des radicaux doit être clair : voter pour celui des candidats susceptibles de faire véritablement changer la France de cap, et de s’entendre non seulement avec la nouvelle administration américaine, mais plus encore avec la Russie de Poutine. Et ce peu importe la famille politique dont est issu ce candidat, dont seules les orientations, alliances et la capacité à gouverner doivent nous intéresser.
Notes
1 Le paléo-conservatisme demeure profondément inconnu en Europe y compris au sein de la droite nationale, le plus souvent aveuglée par un anti-américanisme de principe. Pourtant la philosophie de Russell Kirk semble être ce qui, dans la pensée américaine, peut le plus se rapprocher de la notion de Tradition. Sur le plan politique les positions d’une personnalité telle que Pat Buchanan rejoignent celles de la droite nationale française, voir parfois celles d’un certain nationalisme révolutionnaire !
2 www.globalresearch.ca
3 onlineconservativepress.com
4 Ainsi Trump a-t-il affirmé lors du débat l’ayant opposé à Clinton que les états-unis n’auraient jamais du aller en Irak. (lien) En Syrie Trump a déclaré à plusieurs reprises que les états-unis ne devaient en aucun cas soutenir les rebelles, mais au contraire « laisser les russes bombarder ISIS » (lien)
5 Voir le facebook de Meyer Habib, joaillier et député « des français de l’étranger » qui a donc accepté avec toute la condescendance qu’on lui connaît de « pardonner » à un autre député de la « République » (lien)
6 www.youtube.com
7 Le point « Clinton attaque indirectement Trump sur Israël et la violence » (lien)
8 www.lemonde.fr
9 www.youtube.com
10 Le monde du 24 novembre 2016 « Vladimir Poutine loue les qualités de François Fillon » (lien)Voir également sur le même site : « Poutine et Fillon, une amitié géopolitique » (lien)
11 L’express 23/11/2016 « Primaire à droite: mais qui sont les « soutiens d’extrême droite » de Fillon? » (lien)