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Thierry Meyssan et le Grand Remplacement des journalistes

On nous parle de grand remplacement, mais il concerne tout et tout le monde. Prenons le journalisme. Depuis les années 80, j’en ai connu des journalistes, et des importants, qui ont édité mes premiers bouquins chez Filipacchi, aux Belles Lettres ou chez Albin Michel. Ils pouvaient être de droite, de gauche ou s’en moquer, mais ils étaient cultivés, informés, on ne leur faisait pas écrire n’importe quoi ! Ils ont été remplacés. J’avais commenté il y a quelques années une dépêche chinoise qui indiquait que le robot remplace le journaliste.

Je cite une interview de Thierry Meyssan. Je ne suis pas souvent d’accord avec lui, sur Trump par exemple que je mets au-dessous de tout, depuis qu’il a décidé de nous faire dépenser plus pour renforcer l’organisation obsolète qu’il dénonçait hier. Mais là Thierry Meyssan rappelle des faits concernant la disparition rapide du métier de journaliste-enquêteur remplacé par celui d’agitateur-programmeur d’opinion publique :

« La presse a profondément changé au cours des dernières années. Le nombre de journalistes aux États-Unis a baissé des deux-tiers depuis le 11-Septembre. »

J’aurai vu le bon journalisme disparaître en Espagne ! Au début des années 2000, il était marrant, brillant, provocant. C’était à qui se moquerait le plus des Bushmen et de leur invincible Armada. Après Obama est arrivé. Depuis c’est la nuit noire de la liberté d’expression. Il vaut mieux lire les journaux gratuits dans le métro. La soumission dénoncée jadis par Bourdieu ou Halimi de la presse économique au capital est générale aujourd’hui.

Explications ?

Passage à l’euro et renchérissement masqué de tout ; alignement du jadis très respectable El Pais sur le New York Times ou le Guardian (c’est un libelle néocon et néolibéral depuis), décadence intellectuelle (la société d’ilotes nourris au binaire et aux farines animales que dénonce un historien comme Stanley Payne par exemple), crise économique et licenciements massifs (les deux tiers aussi) du journaliste de classe moyenne, ou prolétarisé comme partout. Etonnez que ceux qui restent soient bien soumis ! D’ailleurs ils ne travaillent plus comme journalistes. Il y a des propagandistes et des agents (ceux qui trouvent des ADM ou qui font semblant d’en débattre à la télé). Meyssan parle du rôle des journalistes :

« En fait, il n’y a presque plus de journalistes, mais beaucoup de rédacteurs qui adaptent les dépêches d’agences à des publics différents. Ce n’est pas du tout pareil. »

C’est très vrai. Prenez la Rolls des classiques : l’article russophobe, sinophobe ou antipopuliste. On a ici en en-tête un marsouin qui apparait avec un nom peu espagnol et, en faisant la tournée des popotes, on découvre que cet ubiquitaire marsouin apparait dans tous les journaux provinciaux ou locaux. C’est la liberté de l’information ! On passe de Big Brother à Little Brother, le petit mensonge média pour toute chambre d’hôtel.

Et sur le Decodex, Thierry Meyssan ajoute encore justement :

« Une des caractéristiques de la propagande, c’est de se substituer à l’esprit critique. Lorsque nous étions à l’école, nous ne pensions pas qu’un texte avait plus de valeur selon son auteur, mais selon son contenu. Nous apprenions à le lire de manière critique. La Démocratie est fondé sur ce principe : nous devons accorder la même attention à ce que dit tout citoyen, tandis que l’Ancien régime n’accordait la parole qu’à la noblesse et au clergé (on dirait aujourd’hui aux politiques et aux journalistes). »

« Le Decodex fait exactement l’inverse. Il qualifie a priori un article de juste ou de faux selon son auteur. C’est intellectuellement stupide et profondément anti-démocratique. »

De là vient la prétendue révolte populiste. On est entrés dans l’ère de la restauration dont parlait Bourdieu à la fin des années 90. De vieilles élites bourgeoises et technocrates, un temps menacées par le marxisme ou le nationalisme, qui se tiennent la main sans le savoir, comme Barrès et Jaurès, ont alors décidé de contre-attaquer et de pousser à bout certains projets qui les arrangeaient : globalisme, OTAN, euro, Europe. Ces élites bourgeoises ont ici renié leur nation et elles se sont recyclées dans l’américanisme et l’européisme. Varoufakis a écrit dans son Minotaure que l’euro était bon pour leur immobilier.

Je précise que je suis opposé à toute théorie de la conspiration, et que je crois comme tout le monde à la perversion officielle… Je crois comme un charbonnier que les USA sont allés sur la lune, je crois comme un perdu qu’on a détourné quatre avions avec des barbus et des cutters en septembre 2001… Je crois que l’immeuble #7 s’est écroulé en se faisant mal… Enfin je sais que le président Kennedy est mort dans un accident de la circulation.

Bibliographie

  • Bonnal – les grands écrivains et la conspiration (Kindle)
  • Pierre Bourdieu – Contre-feux ; Sur la télévision (Editions Liber)
  • Debord – Commentaires, IV
  • Serge Halimi – Les nouveaux chiens de garde (Editions Liber)

 

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