La scène se passe ainsi : on présente à Patrick Devedjian, secrétaire général délégué de l’UMP le tout nouveau député lyonnais de son parti Michel Havard, qui a battu la centriste Anne-Marie Comparini. Devedjian du tac au tac et de façon très sonore précise : “Cette salope”. La scène a été filmée et diffusée sur le journal de TLM, d’ou un scandale médiatique qui a occupé la classe politique quelques jours.
Chacun y a été de son refrain.
Le conseil régional de Rhône-Alpes, dont Anne-Marie Comparini est membre, a adopté une motion de soutien. Ségolène Royal a fait part de sa solidarité, Rachida Dati et Roselyne Bachelot de leur réprobation. Nicolas Sarkozy a été choqué par les propos de son proche conseiller : "Ce n'est pas des façons de parler aux femmes ni à qui que ce soit", a-t-il déclaré. François Fillon, lui, a estimé qu’"Il ne faut jamais insulter les gens, encore moins les élus". Etc.
Tant et si bien que Patrick Devedjian a du présenter à l’insultée des excuses « publiques et privées ».
Ce fait divers politique me fait me souvenir d’un autre.
Au début de l’année 1992, Bernard Tapie déclarait « si M. Le Pen est un salaud, ceux qui votent pour lui sont des salauds”, quelques jours plus tard il précisait qu’il « continuerait jusqu’à la fin de ses jours à traiter Le Pen de salaud ».
Le silence de la classe politique fut alors assourdissant et, même s’ils ne l’exprimaient pas à haute voix, tous ses membres – ou presque - étaient sur le fond d’accord avec le Ministre de la ville fort en gueule.
Nous savons depuis trop longtemps qu’il y a « eux » et « nous », pour nous étonner de cette différence de traitement.
Cela écrit, on se souviendra qu’Anne-Marie Comparini fut bien une salope (et encore le terme me semble faible…) en 1998, quand elle fut la cheville ouvrière de la lutte contre l’alliance Millon-FN au Conseil régional de Rhône-Alpes et quand elle n’hésita pas à faire une alliance avec les élus de gauche pour renverser un exécutif régional auquel participaient divers élus nationaux.
Mais en ce début de millénaire les opinions fortes n’ont plus droit de cité – sauf quand il s’agit de nous dénoncer et de nous ostraciser – et c’est la langue de coton du politiquement correct qui règne. L’affaire Comparini nous l’aura prouvé une nouvelle fois.