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Dimanche, 23 Octobre 2005 |
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Hitler et les trésors culturels européens
En avril 1943, face à l’ampleur des destructions causées par les bombardements aériens anglo-américains, Adolf Hitler, soucieux de préserver le patrimoine et culturel allemand et européen, prit une décision importante. Dès le début des hostilités, en 1939, les autorités du Reich avaient pris des mesures pour la protection et l’évacuation des œuvres d’art menacées.
Mais en 1943, il s’agit d’autre chose. Considérant le nombre toujours croissant des églises, des monastères et des palais détruits par les bombes, Hitler « donna l’ordre de faire des photos en couleur des plafonds et des murs sur lesquels se trouvaient des fresques de valeur. On commença par les districts occidentaux de Cologne, Düsseldorf, Aix-la-Chapelle et on prit en même temps des photos des sculptures, des stalles et du mobilier. Un an et demi plus tard, Hitler décréta : « Compte tenu du nombre croissant de biens artistiques et culturels irremplaçables détruits par la guerre aérienne, je crois souhaitable qu’on photographie de toute urgence et aussi largement que possible – c’est-à-dire dans leurs moindres détails – les monuments de valeur et les œuvres d’art fixes » (2).
L’opération fut organisée et financée par le Ministère de la Propagande (Reichsministeriums für Volksaufklärung und Propaganda) dirigé par le Dr. Goebbels, sous le nom "Hauptabteilung Bildende Kunst". Les équipes de photographes, qui comprenaient également des universitaires, des historiens de l’art et des chimistes, prirent à travers toute l’Allemagne et l’Europe occupée plusieurs dizaines de milliers de clichés de très grande qualité.
Ce sont ces photographies, ou tout au moins une partie d’entre elles, récemment exposées pour la première fois à l’Institut d’histoire de l’art de Munich (Zentralinstitut für Kunstgeschichte), qui sont à partir d’aujourd’hui (21 octobre 2005) rendues accessibles sur Internet, sur le site www.zi.fotothek.org. Jusqu’à une date récente, l’existence de cette collection n’était connue que d’un petit nombre de chercheurs. Il est inutile de souligner l’intérêt que représentent ces photographies, qui permettent de faire revivre en couleurs des œuvres aujourd’hui disparues, pour les historiens et les restaurateurs d’art.
Quelques lectures sur le sujet
BLANK (Ralf) et MARRA (Stephanie), Air-raid precautions for art and cultural assets in the "Third Reich", Germany 1939-1945. A general survey, in MANISCALCO (Fabio) (Hg.), Arte in diffesa. La tutela dei Beni Culturali in area di crisi, Neapel 2002 [Mediterraneum 2].
FRIEDRICH (Jörg), L’Incendie. L’Allemagne sous les bombes 1940-1945, Paris, Ed. de Fallois, 2004.
SACHSSE (Rolf), „Die größte Bewährungsprobe für den Kleinfarbfilm“ – Der Führerauftrag zur Dokumentation wertvoller Wand- und Deckenmalereien in historischen Bauwerken, in: Dom Tempel Skulptur, Architekturphotographien von Walter Hege, Ausstellungskatalog, Agfa Foto-Historama, Köln 1993, herausgegeben von Angelika Beckmann und Bodo von Dewitz, pp. 68-72.
RALF (Peters), Gerettet : die Farbdokumentation "kulturell wertvoller Wand- und Deckenmalerei in historischen Baudenkmälern Großdeutschlands" von 1943 – 1945, In: Kunstchronik, 55, 2002, pp. 242-244.
1. FRIEDRICH (Jörg), Der Brand. Deutschland im Bombenkrieg 1940-1945. Berlin, Propyläen Verlag, 2002, 592 pp. (ISBN : 3549071655).
2. FRIEDRICH, op. cit., p. 475, qui cite GROEHLER (Olaf), Bombenkrieg gegen Deutschland, Berlin, 1990, p. 313.
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