Le souffle de l’esprit sous le feu à Ostankino, une commémoration sur la ligne de front
Cet article parle du soulèvement de 1993 contre le régime de Yeltsin. Le Parlement d’Etat (plus tard renommé avec le terme russe traditionnel : la « Douma ») s’opposa à Yeltsin, à ses alliés et aussi à leurs politiques étrangère et intérieure. Les parlementaires refusèrent d’exécuter les ordres de Yeltsin et se barricadèrent dans l’immeuble du Parlement. Yeltsin envoya alors les tanks et les troupes tirer sur le bâtiment. D’autre part, de nombreux volontaires du petit peuple vinrent là pour combattre pour la vraie démocratie et pour les valeurs traditionnelles, contre le régime corrompu – ce furent des jours qui prouvèrent que dans les périodes de désastre des forces politiques différentes sont capables de s’unir : communistes, nationalistes, croyants orthodoxes et gens du peuple.
Ce fut la naissance de l’axe Rouge-Brun en Russie. La bataille se déroula à deux endroits principaux : à la Maison du Parlement et à Ostankino, un quartier du sud de Moscou où se trouve la tour de la télévision. Il semble que 1 500 personnes furent tuées aux deux endroits. Le gouvernement nie toujours ce chiffre, mais vous pouvez lire certains passages du brillant « Cent ans de solitude » de Gabriel Garcia Marquez pour avoir une idée de la manière dont les choses se passèrent. Beaucoup de gens commémorent la date tragique chaque année – les communistes et les nationalistes et ceux qui sentent la grande injustice de tout ce qui s’est passé et de ce qui se passe toujours.
Les 4 et 5 octobre sont de tristes dates dans l’histoire russe moderne.
Il y a six ans, le régime pro-occidental, libéral-capitaliste, mondialiste et atlantiste tira sur les partisans de la voie russe, sur les héros de la résistance russe. Ce furent des jours de sévère défaite, où il sembla que non seulement nos frères et nos sœurs et nos enfants étaient tombés, mais aussi toute la structure de l’histoire russe.
On ne peut pas se rappeler calmement de ces journées. J’étais à Ostankino, lorsque quelqu’un depuis un bâtiment obscur tira sur notre camarade qui se tenait près de l’entrée avec un lance-grenade sur l’épaule. J’étais debout et je me demandais si les hommes et moi devions nous précipiter dans l’immeuble, qui avait des vitres brisées ici et là, et plonger dans l’obscurité.
Et alors ça commença. Il semblait que les coups de feu étaient tirés en l’air, juste pour effrayer la majorité des gens désarmés. Mais ils tiraient sur nous. Par rafales. Tout le monde se jeta sur le sol et commença à ramper. Il y avait beaucoup de jeunes filles, d’adolescents et de vieillards. Le tir visait tout le monde.
Pour me protéger des balles, je me jetai derrière la voiture qui se trouvait à plusieurs mètres de l’immeuble. En tombant je poussai légèrement un homme qui se cachait déjà là. Et pendant un certain moment il s’était trouvé lui-même à la portée des balles pleuvant à partir des fenêtres. Dans une telle situation on n’a pas le temps de penser, de simples fractions de seconde décident de tout. Mais au lieu de me repousser avec colère, méchamment ou hystériquement, ce qu’un corps humain vivant peut faire involontairement, l’homme, s’exposant lui-même à un risque fatal, avait repris sa position précédente et me couvrait de son corps, me protégeant des tirs.
J’ai nettement senti le souffle de l’Esprit, celui qui est au-dessus de la chair et au-dessus de la vie.
L’Esprit de la Vérité, qui nous bénissait tous : les vieilles femmes nous appelant désespérément à être courageux, les jeunes dans un petit bois près de là et un garçon sur une bicyclette, les jeunes filles en jupe de cuir tombant sous les tirs sauvages, s’effondrant dans des flaques de sang sur l’asphalte.
A Ostankino, il devint clair pour moi que c’était la défaite. Et tout ce qui arriva pendant le sauvage lendemain matin n’était plus aussi surprenant.
Ce furent l’horreur, la douleur, la rage, la furie, une mauvaise amertume suffocante de défaite et d’impuissance. Mais le résultat du combat était terriblement clair.
Ils ont gagné. Six années ont passé.
Ce fut dégoûtant et difficile de vivre pendant toutes ces années. Il était impossible d’oublier et de s’humilier, il était aussi impossible de réaliser obstinément notre volonté. Du moins de la même manière. Les événements de cette époque devinrent les plus importants dans la vie de beaucoup de gens.
Ensuite il y eut la campagne de Tchétchénie, qui par sa nature sanglante et complètement stupide éclipsa la tragédie d’Octobre pendant quelque temps.
Mais nous n’avons rien pardonné et rien oublié. Nous ne sommes pas moins nombreux, nous ne sommes pas devenus plus obéissants et nous n’avons pas accepté le statu quo. Nous avions à adoucir les expressions et les formules, et nous l’avons fait. Nous avons tenté de pénétrer dans les échelons du pouvoir, mais ce ne fut pas complètement possible. Nous avons tenté de rester radicaux et irréconciliables, et ce ne fut pas possible non plus. Nous, le parti vaincu, humilié, écrasé, pouvons difficilement nous vanter de quelque chose depuis ces six années. Nous avons fait ce que nous pouvions, nous nous sommes heurtés à un mur. C’est sans importance que cela fut fait d’une manière décousue, discordante ou ridicule, ou que nous ayons honte de nous-mêmes, étant incapables de trouver les paroles et les gestes appropriés. Mais nous avons conservé la chose la plus importante et bien que nous soyons dispersés, éparpillés, divisés et séparés, nous avons conservé précisément l’Esprit qui souffla alors.
C’est sans importance qu’il ne souffle plus, car il est évident qu’il couve indépendamment, il brûle en nous, nous tourmente.
L’opposition révolutionnaire ne s’est pas développée dans ce sens, ni sur la périphérie ni dans les formations et les milieux conformistes. Mais l’Esprit n’a pas disparu. A travers une épaisseur de rêves, son goût lointain et doux est difficilement perceptible. Nous n’avons rien rejeté.
Nous sommes toujours là où nous étions. Et s’il devient possible de diriger l’histoire dans la direction que nous voulons, juste légèrement, d’un millimètre, d’un simple brin, alors tout reviendra immédiatement. Et une haine passionnée fera fondre nos âmes avec le feu clair d’une nouvelle action.
Pas un seul ennemi n’échappera à notre riposte. Nous pardonnerons à nos ennemis, nous leur pardonnerons sincèrement lorsque le hurlement mortel de la repentance, du tourment et de la douleur sortira de leurs bouches répugnantes. Satan agissait à travers eux. Il n’est pas facile de purifier les récipients humains de sa présence infecte. Leur corps doivent souffrir.
Personne n’échappera à la punition.
Nous pouvons encore attendre. Attendre longtemps si cela est nécessaire. Six, dix ans. Et nous jouerons avec les règles ou sans elles, cela dépend. Mais nous devons être prêts à saisir notre chance à tout moment. Maintenant c’est clair. Même demain.
Durant les mêmes journées d’Octobre, la haine et l’amour parleront en nous avec leur souffle de feu. Et nous sommes remplis du flot de notre idée, de notre Russie, de notre plus haute destination nationale.
Bénis soient les noms de ceux des nôtres qui sont tombés !
Que disparaissent les hordes puantes des traîtres et de leurs sales exécuteurs !
Tout est calculé, compté et pesé.