Le Crif n'est plus intouchable : Le « dérapage » qui a gâté le dîner des « bons »
Le dîner annuel du Crif est pour le moins une curiosité de notre république laïque. Tous les ans, les dirigeants de la République viennent renouveler leur adhésion politique et morale à une lecture communautaire de l’actualité et de l’histoire. Une tradition pour bien montrer que la sensibilité juive et la place des juifs dans la République reste une priorité de la laïcité. Petit à petit, cette laïcité a accordé une place de plus en plus importante à une autre communauté de plus en plus nombreuse, la musulmane. Des musulmans qui avaient toute leur place au dîner du Crif en tant que communauté victime elle aussi du racisme.
Or ce bel antiracisme, fondement de notre laïcité communautariste n’est plus tenable face à un terrorisme issu de l'islam et qui fait du juif l’ennemi prioritaire. Le président du Crif, lui aussi, a bien compris cette notion d’ennemi prioritaire. C’est pourquoi, même si le Fn reste infréquentable pour le Crif au regard de ses fondateurs historiques parfois liés à l'antisémitisme d'hier, Marine Le Pen, sur ce sujet, est moins sulfureuse que son père. Elle n’est donc pas invitée…. Mais.
Mais la violence est attribuée en exclusivité aux jeunes musulmans radicalisés et les efforts de Marine vis a vis d’une communauté qu’elle veut défendre contre le djihadisme est pris en compte par de nombreux juifs. La menace a changé, le président du Crif le dit et, se faisant, il rompt le dogme républicain autour du racisme et de l’antisémitisme. Ce dîner marquera certainement un tournant. le Crif n’est plus tabou et en tout cas les musulmans, du moins des associations musulmanes, se sont donnés le droit de le critiquer et de le boycotter.
Cette année encore, plus que les précédentes, voir le président de la communauté juive et le président du Conseil français du culte musulman à la même table était un symbole très attendu, la meilleure réponse à opposer aux islamistes et aux discours antisémites qui prospèrent impunément sur le Net.
Mais en affirmant lundi matin que « toutes les violences aujourd’hui sont commises par des jeunes musulmans », Roger Cukierman a provoqué la colère de Dalil Boubakeur qui du coup a boycotté le dîner du Crif. Et comme dans la même interview sur Europe 1, le même Roger Cukierman a aussi jugé Marine Le Pen « irréprochable » dans son discours, à la différence de son père, le président du Crif a réussi l’exploit, en moins d’un quart d’heure, de se mettre à dos à la fois les représentants du culte musulman et bon nombre de personnalités de sa propre communauté…
Lors de son arrivée, l’ancien président Nicolas Sarkozy a confié à Serge et Arno Klarsfeld, qui avaient condamné les premiers les propos de Cukierman sur Marine Le Pen: «Heureusement qu’il y a des gens dans la communauté (juive) qui tiennent des propos sensés». Quelques minutes plus tard, il a eu un vif échange avec le numéro 2 du Crif, Francis Khalifa. Roger Cukierman a tenté de faire retomber la pression en exprimant, en introduction de son discours, son «vif regret» de l’absence du Cfcm. Quant aux musulmans, ils ont marqué une nouvelle limite à la liberté d’expression, il s'agit du terme repris par Manuel Valls, d’islamo–fascisme… qui ne passe pas.
«Juifs et musulmans, nous sommes sur le même bateau, j’espère que le contact sera rapidement rétabli», a déclaré Roger Cukierman, rappelant son amitié «ancienne et sincère» avec Dalil Boubakeur. La tension retombera mais ce dîner raté ne sera pas oublié. Il marque un tournant religieux dont notre intraitable laïcité se serait bien passée. Le discours de François Hollande paraissait assez décalé par rapport à l'incident qui était l’actualité du soir.
« Les juifs sont chez eux en France, ce sont les antisémites qui n’ont pas leur place dans la République. » Invité d’honneur du 30ème dîner du Conseil représentatif des institutions juives de France, le Président de la République a lancé un appel aux Français de confession juive à rester au sein de la nation, au terme d’un discours d’une trentaine de minutes. « Français juifs, vous êtes ici chez vous ici dans votre patrie, elle vous doit une part de son identité. Vous lui avez tant donné, la France le sait, le dit et le montre et elle s’est levée il y a un mois pour dire non au fanatisme et à l’antisémitisme. »
Pourtant une annonce très importante a été faite.
L’antisémitisme, le racisme et l’homophobie ne devraient ainsi plus relever du droit de la presse mais du droit pénal commun. Une mesure que M. Cukierman, le président du Crif, avait appelé de ses vœux.
La liberté d'expression n’est pas faite pour ceux qui ne sont pas invités au dîner du Crif. C’est au sujet d’Internet que François Hollande a été le plus virulent. Appelant les grands groupes à la « responsabilité », il a estimé que « le monde numérique n’est pas hors de réalité, il ne pourra donc pas être hors de la légalité ». Avant de lâcher à propos des sites de partage de vidéos en ligne qui laisse des vidéos djihadistes : « l’indifférence devient complicité. »
Il est bien évident que le droit de tout dire et de tout nommer n’est plus une valeur de la république…. même le président du Crif l’a appris hier à ses dépends