L’emblème national de l’Inde, Bharat Mata, Mère Inde, tenant ici le drapeau nationaliste hindou à la place du drapeau tricolore officiel.
Les posters nationalistes hindous présentent souvent cette image, accompagnée de la légende :
Je suis l’Inde. La nation indienne est mon corps. Le Cap Comorin est mon pied et les Himalayas ma tête. Le Gange coule de mes cuisses. Mon pied gauche est la Côte de Coromandel, mon pied droit est la Côte de Malabar. Je suis tout ce pays. L’Est et l’Ouest sont mes bras. Comme ma forme est merveilleuse ! Quand je marche, je sens toute l’Inde bouger avec moi. Quand je parle, L’Inde parle avec moi. Je suis l’Inde. Je suis la Vérité, je suis Dieu, Je suis la Beauté.
Vande Mataram (Salut, Mère)
Chant national de l’Inde
(Bankim Chandra Chatterjee, 1875)
Mère, je m’incline devant toi !
Riche de tes courants rapides,
Brillante de l’éclat de tes vergers,
Fraîche de tes vents de délice,
De tes sombres champs ondulants, Mère de puissance
Mère libre !
Gloire des rêves de clair de lune
Au-dessus de tes branches et de tes courants altiers ;
Vêtue de tes arbres en floraison,
Mère, dispensatrice de bien-être,
Riant faiblement et doucement !
Mère, je baise tes pieds,
Toi qui parle faiblement et doucement !
Mère devant toi je m’incline.
Qui a dit que tu étais faible
Quand les épées jaillissent dans des millions de mains
Et quand des millions de voix grondantes
Crient ton nom de rivage en rivage ?
Je fais appel à toi, Mère et Déesse,
Détentrice d’une force incalculable,
Toi qui protège et sauve !
Je m’incline devant celle
Qui met en déroute ses ennemis
Et qui toujours reste libre !
Tu es la sagesse, tu es le dharma,
Tu es notre cœur, notre âme, notre souffle,
Tu es l’amour divin, l’élan sublime
Dans nos cœurs, qui vainc la mort.
Toi la force qui anime le bras,
Toi la beauté, toi le charme,
C’est ton image divine que nous adorons
Dans tous les temples.
Tu es Durga, Déesse et Reine,
Avec tes mains qui frappent
Et qui brandissent des épées brillantes,
Tu es Lakshmi sur son trône de lotus,
Et la Muse de toutes les inspirations,
Pure et parfaite, sans égale,
Mère je te salue !
Riche de tes courants rapides,
Brillante de l’éclat de tes vergers,
Mère au teint sombre, à l’âme pure,
Dans la gloire de ta parure,
Et de ton sourire divin,
La plus digne d’amour,
Détentrice des richesses,
Mère, ma mère !
Mère douce, je m’incline devant toi,
Mère grande et libre !
Cette version (en assez mauvais anglais) trouvée sur un site nationaliste hindou est un peu différente de la traduction anglaise de Sri Aurobindo (1909). En 1950, Vande Mataram ne fut pas choisi comme hymne national officiel de l’Inde à cause de ses résonnances « païennes » qui déplaisaient à la minorité musulmane (en effet, la Mère Inde est identifiée à la déesse Durga). C’est donc le chant composé par Rabindranath Tagore en 1911, Jana Gana Mana (« Tu es le souverain des âmes ») qui fut choisi comme hymne national. Vande Mataram, réduit aux deux premières strophes (composées par Bankim Chandra Chatterjee vers 1875, et publiées pour la première fois dans sa nouvelle Ananda Math en 1882), dut se contenter du statut de « chant national ».
Cependant, c’est bien Vande Mataram qui accompagna tout le combat de l’Inde pour l’indépendance, à partir de 1905, et de nombreux combattants de la liberté montèrent au gibet (britannique) en chantant Vande Mataram. C’est pourquoi ce chant conserve une valeur unique pour les Indiens. Comme l’écrivit Sri Aurobindo : « Le mantra avait été donné, et en un seul jour tout un peuple s’était converti à la religion du patriotisme. La Mère s’était révélée…Une grande nation qui a eu cette vision ne peut plus jamais courber la nuque sous le joug d’un conquérant ».
On peut légitimement penser que c’est Vande Mataram qui devrait être l’hymne de l’Inde hindoue, d’une Inde affirmant sans complexe son hindouité. A cet égard, les Européens se trouvent face aux mêmes problèmes concernant l’affirmation de leur identité. L’Europe et l’Inde, aux deux extrémités de l’arc indo-européen, ont partie liée. Les deux grandes civilisations-sœurs luttent pour leur survie, sous l’antique signe du Soleil, face à des ennemis intérieurs et extérieurs qui arborent tous des symboles nocturnes et lunaires (le drapeau de l’Union Européenne présente à cet égard une ambiguïté troublante, avec à la fois un aspect nocturne – une nuit étoilée – et un aspect solaire « potentiel » : piège ou signe d’espoir ?). Quand les Européens comprendront-ils que dans un monde globalisé, le temps des petits Etats-nations est définitivement passé ? Quand comprendront-ils que la seule vraie Patrie est l’Europe elle-même ? Quand auront-ils eux aussi la vision dont parle Sri Aurobindo ? Quand le mantra sera-t-il donné ?
Traduction de la version de Sri Aurobindo :
Je te salue, ô Mère,
Riche en eaux et riche en fruits,
Rafraîchie par les vents du sud,
Noire de récoltes
La Mère !
Et tes nuits pleines de joie
Dans la gloire du clair de lune,
Et tes plaines somptueusement
Vêtues d’arbres en fleur,
La douceur de ton rire, la douceur de ta voix,
La Mère, dispensatrice de faveurs et de félicité.
Terrible avec le cri poussé
Par soixante-dix millions de gorges,
Et le fil tranchant des épées brandies
Par deux fois soixante-dix millions de mains,
Qui a dit, Mère, que tu étais faible ?
Détentrice d’une force innombrable,
Je salue celle qui sauve
Je salue celle qui met en déroute
Les armées de ses ennemis
La Mère !
Tu es connaissance, tu es dharma
Tu es notre cœur, notre âme, notre souffle.
Dans le bras, tu es force, Ô Mère,
Dans le cœur, Ô Mère, tu es amour et foi,
Et c’est ton image que nous adorons
Dans tous les temples.
Car tu es Durga brandissant
Ses dix armes de guerre,
Lakshmi jouant au milieu des lotus
Et la Muse de toutes les inspirations.
Je te salue !
Je m’incline devant toi, déesse de prospérité,
Pure et sans pareille,
Riche en eaux et riche en fruits,
Toi, la Mère !
Je te salue,
Mère au teint sombre, âme pure,
Souriant avec douceur, dans la gloire de ta parure,
Détentrice des richesses, Dame d’abondance,
La Mère !