Giscard, Don Quichotte d’Outre Manche
Décidément, il y a des sujets qui interpellent plus que d’autres à certains moments. Celui « qui fait débat », comme on s’exprime désormais, c’est l’énergie. Que ce soit à la une des médias, aux comptoirs des bistrots, lors des dîners d’amis… et même mon fils s’en est inquiété en voyant ce que me coûtait le dernier plein d’essence de notre boulimique automobile. Comparé aux tarifs de ses cours de guitare ou à celui de sa dernière paire de Converse, le montant lui a semblé exorbitant. Mon fils deviendrait-il responsable ? À quelques jours de la première partie de son bac, c’est inespéré, me suis-je dit.
L’énergie, oui… Tout le monde s’inquiète de l’inflation du précieux carburant aux stations services et sur les factures de chauffage, même si ces dernières ne sont à venir que dans quelques mois… sauf si le temps pourri persiste, hélas…
Il y a ceux qui râlent – qui râlent tout le temps, il paraît que c’est le caractère gaulois qui veut ça – et il y a ceux qui n’ont d’yeux, désormais que pour les énergies alternatives, celles qui seraient bien de chez nous, n’enrichiraient pas les basanés pas vraiment catholiques de l’autre bout du monde… et, cerise sur le gâteau, ne pollueraient pas !
À part quelques talibans de l’écologie qui verraient bien l’humanité pédaler pour se déplacer, se chauffer l’hiver aux crottins de bestiaux et s’habiller de guenilles laineuses et trouées, tricotées par de vilaines femmes mal lavées au fin fond du Larzac (plutôt là qu’ailleurs, camarades, ça rappellera ses vingt ans au grand-père), certains envisagent plus sérieusement le recours à l’énergie solaire, pas encore vraiment au point et au développement encore beaucoup trop onéreux… et d’autres enfin la production d’énergie éolienne qui, elle, explose littéralement : + 80 % entre 2006 et 2007. Partant de moins que pas grand chose, cette production-là reste toutefois encore modeste. Mais augmente ! Sans cesse !
Pollution visuelle, bruit, coûts… sont les reproches les plus fréquents contre celle-ci. Didier Pourquery(1) remarque toutefois que « les modernes “aérogénérateurs” (les éoliennes en français) ne sont pas plus laids que les pylônes à haute tension qui strient nos paysages. Leur installation est soumise à un débat public ouvert, des expertises soigneuses »… Quant à leurs coûts, il précise : « Les parcs éoliens sont prévus pour durer vingt ans ; leur entretien est peu onéreux ; le coût de l’énergie qu’ils produisent baisse de 3 % par an ; ils créent des emplois (45 000 en Allemagne)… Bref on comprend mal le procès qui leur est fait. »
D’où viennent donc ces levées de boucliers ? De quelques talibans de l’écologie, on s’en doute – Encore eux quoique ce ne sont pas forcément les mêmes que les autres malodorants cités précédemment –, mais également d’une vieille connaissance anciennement présidentielle, Valéry Giscard d’Estaing himself qui accuse « le puissant lobby germano-danois des éoliennes » de s’attaquer « à la campagne française depuis la haute Auvergne jusqu’à Chartres. »
Aux armes, citoyens ! Le Boche menace à nouveau, qui l’eût crû ? Ses cohortes militaires défilent d’ailleurs déjà sur les Champs-Élysées (pour le 14 juillet, rappelez-vous !) et sa Cinquième colonne colonise de fait nos verts pâturages.
Heureusement, c’est bientôt le 18 juin, l’occasion de se refaire la cerise. VGE, qui a déjà fait le don fort inutile de sa personne à la France, se prépare sans doute à un historique exil. C’est sûr, il va nous manquer.
1-Libération, vendredi 13 juin 2008. |