13/10/02 18.33 t.u. Christian Bouchet

Il n’est pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre et il n’est pas pire imbécile que celui qui ne veut pas comprendre.

Une fraction du mouvement national, s’est trouvée depuis quelques années, et de manière beaucoup plus virulente depuis un an, un nouvel adversaire : l’islamisme.

L’Europe est en effet en grand péril, les partisans d’Oussama s’organisent dans les banlieues et les hordes de Mawdudi, d’al-Tourabi et d’al-Banna s’apprêtent à déferler sur notre continent.

Je ne sais si les « intellectuels » de la droite nationale qui produisent des textes justifiant ces fantasmes sont sincères où s’ils ne font que vouloir instrumentaliser une peur qu’ils croient avoir perçue. Quoiqu’il en soit, je me dis qu’il n’ont rien compris...

Pendant plus de quarante ans, les USA se sont servis d’un « péril soviétique » très largement fantasmatique pour maintenir leur domination sur l’Europe. Quand l’URSS s’est effondrée, on s’est rendu compte que le tigre n’était que de papier et que les officiels yankees le savaient depuis très longtemps mais qu’il fallait bien que nous ayons peur pour être dociles.

Nous voici dans une situation similaire : une peur très fantasmatique mais bien utile pour que tout le monde s’aligne derrière les USA.

Et nos anticommunistes d’hier, deviennent les anti-islamistes d’aujourd’hui, et au nom de cet anti-islamisme ils sont prêts à tous les reniements : les USA ne sont plus l’ennemi mais l’adversaire, des agents d’influence recensés de l’entité sioniste deviennent des gens très fréquentables dont les ouvrages méritent, bien sûr, d’être sur toutes nos tables de chevet.

Peu importe que des universitaires sérieux comme Roy, Etienne ou Kepel, montrent que l’islamisme est fini, liquidé et que l’on est entré dans le post-islamisme, ils ne peuvent être que des kollabos ! D’ailleurs Samuel Huntington nous donne raison, nous sommes dans l’ère du choc des civilisation, à l’aube d’une guerre planétaire où les yankees seront une fois de plus nos alliés et nos sauveurs !

Peu importe qu’Huntington soit un ancien cadre du Conseil national de sécurité des USA, peu importe qu’il ait publié ses textes dans la revue du Council on Foreign Relations, peu importe qu’il ait travaillé pour la Commission trilatérale et qu’il soit encore administrateur de la Freedom House, l’un des think tank de la CIA.

Peu importe en effet, il vaut mieux cacher tout cela au militants et l’oublier soi-même très vite.

Variante moderne du virus occidentaliste l’anti-islamisme n’est pas seulement aberrant en terme de politique étrangère, il l’est aussi en terme de politique intérieure et de propagande. Cela, car il divise le combat contre l’immigration et sous-entend que certains immigrés sont acceptables (ceux qui ne sont pas musulmans). Cela, car il n’est même pas porteur auprès des populations « de souche » les plus « au contact » de l’immigration qui comme le relève le chercheur Catherine Wihtold de Wenden ne sont pas « sensibles au danger transnational de l’islam intégriste. Ils n’ont pas du tout ça en tête. En termes électoraux cela joue beaucoup moins que le type qui se fait emmerder toutes les nuits par des gamins qui font du bruit, roulent dans des grosses bagnoles ou vendent de la drogue au coin de la rue ».

Mais admettre cela voudrait dire qu’il faut faire une politique de terrain, une politique de la cage d’escalier, qu’il faut s’intéresser au véritable peuple et à ses problèmes... Cela est ingrat et pas très enthousiasmant... Il est beaucoup plus agréable de se réfugier dans ses fantasmes, de se palucher en rêvant de reconquista, de guerre ethnique, de nouvelle croisade, etc. et le rêve ne demande ni cohérence, ni intelligence...

Christian Bouchet