
En souvenir de Jean Thiriart
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25/11/02 |
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9.05 t.u. |
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Christian Bouchet |
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Il y a dix ans, le 23 novembre 1992, Jean Thiriart décédait d’un accident cardiaque lors d’une randonnée. Le mouvement NR paneuropéen perdait alors son principal théoricien, celui qui se voulait son conseiller politique et qui depuis le début des années soixante lui fournissait prospectives et analyses.
Jean Thiriart avait choisi, au début des années quarante, le camp de la Grande Europe, il y resta fidèle jusqu'à sa mort. Fondateur de l’organisation Jeune Europe en 1962, puis du Parti Communautaire Européen en 1965, il quitta la politique activiste en 1969 pour consacrer tout son temps à la théorie. Sans apparaître au grand jour, il fut alors le deus ex machina de diverses initiatives dont le mouvement Nouvelle Résistance en France et l’organisation transeuropéenne connue sous le nom de Front Européen de Libération. Dans les années quatre-vingt, la pensée de Jean Thiriart reçut un écho tardif dans l’URSS en voie de délitement. Il fut invité à se rendre à Moscou et il y rencontra divers officiels dont Egor Ligatchev et Guennadi Zouganov l’actuel dirigeant du Parti Communiste.
Partisan de la plus Grande Europe de Brest à Vladivostok, Thiriart écrivit plusieurs ouvrages pour défendre cette idée dont le célèbre Un empire de 400 millions d’hommes : l’Europe, qui fut traduit dans la plupart des langues européennes. Il proposa aussi dans divers écrits une doctrine économique, le communautarisme, véritable troisième voie entre le communisme et le capitalisme.
Il se peut que le nom de Jean Thiriart ait été ignoré jusqu'à ce jour par un certain nombre de mes lecteurs. Il est un fait que son audience reconnue est faible. Il y a peu de thiriartiens " pur jus " en Europe et ceux-ci ne se déclarent de surcroît pas toujours comme tels. Mais au delà de cette petite phalange qui maintient disponible ses ouvrages et fait connaître ses idées, la pensée de Jean Thiriart irradie par l’intermédiaires de penseurs politiques et d’activistes qui ont assimilé une partie de ses thèses.
Ainsi, ce qu’il y a d’intéressant chez Guillaume Faye est directement décalqué de Jean Thiriart ; ainsi, le géopoliticien Alexandre Douguine dont l’influence est grande dans les milieux dirigeants russes propose-t-il à ceux ci une idéologie directement inspirée du révolutionnaire bruxellois ; ainsi, l’influent quotidien romain Rinacista diffuse-t-il dans le monde politique italien des analyses dont la référence cachée est l’œuvre du fondateur de Jeune Europe ; etc.
On a parfois présenté Jean Thiriart comme le " Lénine de la révolution européenne ", il fut en fait plutôt son Karl Marx, celui qui donna au nationalisme eurasiatique une doctrine dont la pertinence ne diminue pas avec le passage des années.
Christian Bouchet
PS : une partie de l’œuvre de Jean Thiriart est disponible via notre librairie en VPC.
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