
La dictature molle
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03/03/04 |
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8.26 t.u. |
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Christian Bouchet |
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Dans un récent éditorial du mensuel Résistance, j’évoquais le slogan : « ce que nous voulons ce n’est pas le pouvoir, c’est la liberté » et je montrais comment celui-ci est de plus en plus d’actualité.
Les « malheurs » de Dieudonné aujourd’hui, comme ceux de Shamir avant hier ou ceux de Le Pen et de Mégret hier, ou comme la difficulté à trouver un diffuseur pour le film La Passion, me faisaient pester de nouveau contre la dictature molle que nous subissons chaque jour, quand j’ai reçu le service de presse des deux volumes de la Bibliographie générale des droites françaises d’Alain de Benoist que publient les éditions Dualpha (et que l’on peut se procurer en ligne à www.librad.com :: lien ::).
La lecture de la préface ne m’a pas sortie de mon pessimisme. Voici en effet quelques lignes terribles pour ce qu’elles révèlent de formatage de notre culture, de refus de la liberté de penser et de dictature au quotidien :
« Jusqu’au milieu des années soixante-dix, la plupart des auteurs « de droite » figuraient aux catalogues des plus grands éditeurs, et leurs oeuvres étaient fréquemment publiées en éditions de poche. Jean Mabire était édité chez Fayard et Balland, Saint Loup aux Presses de la Cité, François Brigneau chez Gallimard. Ce serait aujourd’hui impensable. La porte s’est refermée partout. La plupart des grands classiques de droite ne sont plus réédités aujourd’hui que par des maisons d’édition plus ou moins marginales ou confidentielles. Aucun des principaux livres de Robert Brasillach, par exemple, n’est plus disponible aujourd’hui chez un grand éditeur, alors que dans les années soixante ses oeuvres étaient publiées chez Plon, chez Stock, à la Table Ronde, au Livre de poche et par toute une série de clubs de livres. A peine dix titres de Maurras peuvent être fournis aujourd’hui chez l’éditeur, alors qu’en 1960, on en comptait encore cinquante - et aucun de ces livres n’a été publié par une grande maison d’édition. Montherlant lui-même n’est presque plus réédité depuis sa mort. Pour expliquer cette situation, on pourrait alléguer les passions politiques liées à l’Occupation. Mais curieusement, les auteurs « de droite » sont aujourd’hui beaucoup plus tenus en suspicion qu’ils ne l’étaient quinze ou vingt ans seulement après la fin de la deuxième guerre mondiale. C’est que le passé a pris une dimension mythique, si bien que l’instrumentalisation manichéenne de ce passé engendre paradoxalement l’oubli. Tenus pour sulfureux, car trop peu conformes à l’idéologie dominante, on préfère ne plus parler des auteurs qui ont incarné ou représenté une famille de pensée désormais traitée en proscrite. Les catalogues des grands éditeurs ont été épurés en conséquence, avec une simultanéité qui ne manque pas de frapper l’esprit ».
Tout cela est bien décourageant et l’on se dit que trente années de combat culturel, de nouvelle culture et de gramscisme de droite n’y ont rien changé.
L’ennemi est-il trop puissant ? Sommes nous trop médiocre ? Qui sait ?
Peut-être aurions nous du choisir plutôt l’option nietzschéenne : « ce qui doit tomber, il ne faut pas le retenir mais le pousser ».
Quoiqu’il en soit, un combat fut mené. On en retrouvera le souvenir en lisant l’excellentissime Liber amicorum Alain de Benoist qui vient de paraître. Pour les soixante ans du philosophe, un certain nombre de ses amis témoignent de combats passés qui furent souvent les nôtres. C’est à lire avec passion et ... nostalgie.
Christian Bouchet
Le Liber amicorum peut se commander à www.alaindebenoist.com :: lien ::
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